Depuis près de cinquante ans, le nombre des cheminots actifs diminue un peu plus chaque année, et ce, même en tenant compte de la vague d'embauches massives de la première présidence Mitterrand. De là à penser que la mort de la SNCF est programmée au profit des groupes privés, il n'y a qu'un pas que d'aucuns ont d'autant plus allègrement franchi que l'entreprise a dû céder du terrain face aux coups de boutoir de la concurrence étrangère.

Pourtant, l'entreprise publique a su se réformer pour intégrer les méthodes de gestion du privé. A coups d'OPA et de rationalisation des coûts, la SNCF, sous l'impulsion notamment de son actuel président Guillaume Pépy, a appris à jouer le jeu de la concurrence et à grignoter des parts de marché à ses principaux rivaux, dont la compagnie publique allemande, la Deutsche Bahn.

Des problèmes, cependant, demeurent : le fret semble irrémédiablement abonné aux déficits et la crise risque fort de compromettre y compris la formule gagnante du TGV, qui permet de renflouer les activités déficitaires. Mais tout reste à jouer. Si tous les secteurs de l'entreprise doivent passer sous le régime de la concurrence d'ici à 2012, la crise économique actuelle pénalise au moins autant la concurrence qu'elle ne gêne la SNCF. Elle pourrait, paradoxalement, accélérer sa transformation et rendre incontournable la mutation de la maison SNCF, condamnée à aller chercher à l'extérieur «avec les dents» les marchés qui se refusent à l'intérieur. Un défi gestionnaire et humain qui pourrait reléguer au musée des images d'Epinal la SNCF de papa.

François Regniault est responsable médias à la SNCF.