Jusqu'à présent, les hommes n'ont inventé que deux grandes méthodes pour réguler le fonctionnement des organisations : le respect des règlements et des normes et le partage d'une finalité commune connue de tous. Aujourd'hui, l'entreprise qui veut développer sa réactivité et son agilité ne peut plus se permettre une organisation pyramidale où les chefs ordonnent, distribuent le travail, contrôlent et arbitrent. La chaîne ainsi constituée est beaucoup trop lente et pauvre en innovation. Si le corps humain suivait des logiques exclusivement hiérarchiques, nous serions tous paralysés ! Ouvrir la porte au partage, à la collaboration, à l'initiative, à la qualité, nécessite de mobiliser l'intelligence collective. C'est là que le «management par le sens» trouve sa place : mieux approprié à notre monde actuel, mais exigeant tout de même.
Qui dit management par le sens dit vision partagée, que tout le monde comprend et à laquelle chacun adhère. Adopter la vision stratégique du patron est bien, mais construire ensemble une représentation commune de ce que l'on veut atteindre est plus puissant. Quand on s'entoure des bons appuis pour animer ces logiques participatives, le retour sur investissement est assuré.
L'organisation a aussi besoin de managers communicants. Avoir une vision commune n'est utile que si celle-ci est déclinée dans chaque équipe afin d'inspirer l'action. Toute la dynamique repose donc sur le management de proximité. Il s'agit de rappeler sans cesse les objectifs que l'on poursuit, transmettre un état d'esprit, prendre du recul en période troublée, former les personnes et les mettre en condition professionnelle et mentale pour qu'elles donnent le meilleur d'elles-mêmes. Quand les tensions entre les individus ou les services prennent de l'ampleur, il faut savoir rappeler que l'on travaille tous pour un même but et affirmer la primauté de cette finalité sur les querelles personnelles... Pas simple.
Enfin, le management par le sens suppose des règles du jeu vivantes et une éthique ouvertement discutée dans les échanges. Comment s'y prendre devant ce cas difficile, faut-il mettre dans la boucle tel autre département, doit-on réagir ou laisser passer, obtenir ce service de X justifie-t-il une déloyauté vis à vis de Y ?... De nos jours, les questionnements sont nombreux. Dans un monde qui va vite, l'intégrité de comportement demande du recul et du discernement pour ne pas se laisser séduire par les apparences. Les repères que sont les valeurs servent de boussole dans les arbitrages quotidiens. Encore faut-il prendre l'habitude de réfléchir aux différents contours d'une situation. Si j'agis de telle manière, quelles en seront les conséquences ? Attention aux fonceurs ou aux passionnés : rivés sur leurs objectifs, ils prennent rarement le temps d'évaluer les effets de leurs actes sur les autres parties prenantes. Ils oublient des personnes, en contrarient d'autres, se mettent à dos les troisièmes... A quoi servent les beaux discours sur l'intégrité et les valeurs si les actes suivent une autre logique ? On reconnaît le management par le sens quand le «comment agir» est autant valorisé que le résultat final.
Meryem Le Saget est conseil en entreprise à Paris. <
