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Pilotage de précision(s)

Dossier | publié le : 16.06.2009 |

L'idée d'un «plan régional de développement des formations professionnelles» est diversement appréciée. A cela s'ajoute la question très sensible de son pilotage : le conseil régional ou le préfet ?

L'article 20 du projet de loi prévoit l'adoption d'un «plan régional de développement des formations professionnelles», pour six ans, par le conseil régional, en concertation avec le préfet de région et le recteur, également signataires. Ce plan détermine les objectifs communs aux différents acteurs sur le territoire régional, notamment en termes de filières de formation professionnelle initiale et continue, sur la base d'une analyse des besoins en termes d'emplois et de compétences par bassins d'emploi.

Alain-Frédéric Fernandez : « Jusqu'ici, la loi était toujours un compromis entre les partenaires sociaux, alors que la contribution des entreprises, gérée par les partenaires sociaux, ne représente que le tiers de la dépense nationale de formation : environ 10 milliards sur les 27 milliards d'euros dépensés chaque année. Les partenaires sociaux perdent la main sur la politique globale de formation et sur la législation, mais leur pouvoir va enfin s'exercer là où il est légitime et utile, les branches et les entreprises. Par ailleurs, et légitimement, les régions sortent renforcées de cette prochaine réforme. »

« Cet article consacre donc une révolution nécessaire dans le paysage de la formation professionnelle. Le paritarisme qui présidait jusqu'à ce jour laisse la place à une plus grande diversité des acteurs : depuis l'Etat, qui fait les lois et les fait appliquer, aux régions, qui sont consacrées premier acteur local de la formation, et aux autres, qui interviennent dans leur domaine de compétences. »

Alain Bournazel : « La région est une fausse solution. L'Etat se défausse de la définition de la réforme sur les partenaires sociaux, et il est tenté de se décharger de sa mise en oeuvre sur les régions. Plusieurs rapports avancent l'idée d'un plan régional de développement des formations (PRDF) «prescriptif» à l'égard de toutes les parties, dont l'Etat : ce n'est pas la bonne voie. Pour être prescriptif, le PRDF devrait d'abord être opérationnel. Or, ce n'est pas le cas, et cette situation n'est pas susceptible d'évoluer rapidement. L'élaboration du PRDF exigerait, en effet, des outils sophistiqués de prospection et de programmation qui ne peuvent exister dans les 26 régions. »

Inutile et sans portée

« Au demeurant, le caractère prescriptif du PRDF est inutile ou sans portée. Inutile, car rien n'interdit dans la législation actuelle que les régions et l'Etat concluent des accords de programmation pluriannuels, à l'instar des contrats d'objectifs et de moyens ou des contrats d'objectifs territoriaux. Sans portée, car le caractère prescriptif d'un document n'implique pas qu'il soit respecté par l'Etat. Pour s'en convaincre, il suffit de se référer aux nombreux exemples des anciens contrats de plan. »

« La région a sa place, c'est sûr. Mais il faut résister à l'illusion du tout-régional. La coopération des régions n'est pas toujours évidente, même si les équipes qui les administrent ont la même couleur politique. De plus, l'inégale représentation des branches professionnelles au niveau régional est une réalité. Les entités qui sont hors du champ de l'ANI de 2003 ne sont pas représentées dans les structures régionales comme les Copire (1). Enfin, la segmentation des dispositifs au niveau régional, outre qu'elle remet en cause le principe d'égalité républicaine, pose, au plan pratique, des problèmes sérieux : est-il acceptable que les conditions de prise en charge de l'apprentissage varient selon les territoires ? Est-il concevable de demander aux branches professionnelles et à l'Education nationale d'élaborer 26 politiques de formation pour s'adapter aux choix des régions ? »

L'espace régional n'est pas toujours pertinent

« L'espace régional ne constitue pas le cadre pertinent pour toutes les actions. Il est, dans l'ensemble, approprié pour les formations de niveaux V et IV, à condition qu'il ne s'applique pas à des effectifs faibles, auquel cas, c'est le cadre interrégional qui s'impose. Le niveau régional est douteux pour les formations de niveau III, qu'il conviendrait pourtant de développer. Il est nul pour les formations de niveau II et I. Quant à l'objectif, souvent affiché, de croiser au niveau régional la logique sectorielle des branches et celle, transversale, des territoires, il relève d'une préoccupation légitime, mais loin d'être évidente. A défaut d'objectifs nationaux, la coordination au niveau régional n'a pas de sens. La notion de compétences partagées, souvent avancée dans l'imbroglio actuel, engendre un équilibre purement optique. Les compétences partagées, c'est aussi l'irresponsabilité partagée. Avec les régions, incapables de faire, et un Etat qui s'est défait de ses moyens de faire, la gouvernance de la formation est accrochée dans le vide. »

(1) Commission paritaire interprofessionnelle régionale de l'emploi.

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