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Déshabiller Pierre pour habiller Paul ?

Dossier | publié le : 16.06.2009 |

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Déshabiller Pierre pour habiller Paul ?

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La création du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) implique un «effet d'éviction» de financement direct des entreprises au profit du fonds. La question du retour, soit en financement indirect, soit en personnes qualifiées, est posée.

Déjà très médiatisé, l'article 9 du projet consacre l'existence d'un Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) créé par les partenaires sociaux dans le cadre de l'ANI du 7 janvier 2009. Le FPSPP est alimenté par un prélèvement, qui pourra varier de 5 % à 13 %, sur la participation obligatoire des entreprises au financement de la formation professionnelle continue, ainsi que par un prélèvement sur les excédents des Opca au titre des contributions de 0,5 % destinées à la professionnalisation et au DIF, et de 0,20 % destinées au congé individuel de formation. Un accord de branche peut moduler la répartition du prélèvement de 5 % à 13 % entre le plan de formation et la professionnalisation. A défaut, ce prélèvement est uniforme. Le montant du pourcentage retenu pour le prélèvement est fixé chaque année par arrêté sur proposition des organisations patronales et syndicales représentatives au niveau interprofessionnel.

Double conséquence Jean-Pierre Willems :

« La création du FPSPP et l'instauration d'un prélèvement systématique sur l'obligation légale de financement de la formation professionnelle continue ont une double conséquence. En premier lieu, et sauf accord de branche faisant supporter par la professionnalisation l'intégralité du prélèvement, toutes les entreprises seront désormais tenues de verser à un Opca une contribution au titre du plan de formation, ce qui ne pouvait, jusqu'ici, résulter que d'une obligation conventionnelle. En second lieu, les ressources disponibles dans les Opca seront amoindries des prélèvements destinés au FPSPP, qui serviront à financer des actions de formation en faveur des demandeurs d'emploi dans le cadre de la «préparation opérationnelle à l'emploi», et des «actions prioritaires» pour les salariés les plus exposés au risque de rupture de leur parcours professionnel, ceux peu ou pas qualifiés, ceux n'ayant pas bénéficié d'une action de formation depuis cinq années, ceux alternant fréquemment périodes de travail et de chômage et, enfin, les salariés des petites et moyennes entreprises. »

Augmentation des cotisations

« La création du FPSPP est donc de nature à réorienter sensiblement une partie importante des financements transitant par les Opca vers des actions définies comme prioritaires au plan national. Elle peut également avoir pour conséquence une augmentation des cotisations versées par l'entreprise à l'Opca et donc une diminution des sommes disponibles pour le financement direct de formations pour les entreprises. »

Nouvelle contribution Alain-Frédéric Fernandez :

« Le FUP, puis le FPSPP, va donc financer un certain nombre de formations d'accès à l'emploi en amputant de 13 % les contributions du 1,6 %, soit, en fait, en créant une nouvelle contribution de 0,33 % de la masse salariale brute payée par les entreprises et échappant à leur politique de formation. Ce qui va entraîner un nouveau calcul des contributions et un abaissement du disponible pour les salariés, mais aussi la possibilité, pour un certain nombre d'entre eux, de suivre une «préparation opérationnelle à l'emploi» financée par ce biais et d'accéder, ensuite, à un contrat de professionnalisation en CDI dans l'entreprise. »

Le CIF sans salaire

« L'article 6 du projet de loi est porteur d'une innovation majeure, assure Jean-Pierre Willems, consultant. Le congé individuel de formation pourra, désormais, être entièrement mis en oeuvre en dehors du temps de travail. La loi étend, dans ce cas, le régime de protection sociale contre les accidents du travail et les maladies professionnelles à la période de formation qui s'effectue sans rémunération et donc sans cotisations. Le congé individuel de formation pourra ainsi se concrétiser sans qu'une demande de congé ne soit formulée auprès de l'employeur ; et, éventuellement, sans que celui-ci ne soit informé de la démarche du salarié ! La possibilité de réaliser le CIF en tout ou partie pendant le temps de travail n'est pas modifiée pour autant. »

« C'est une très bonne nouvelle pour le développement du congé individuel de formation qui apparaissait trop souvent comme une rupture avec l'entreprise, juge Alain-Frédéric Fernandez, consultant. Malheureusement, pour une formation lourde, le salarié ne disposera pas de suffisamment d'heures à exposer hors temps de travail, des RTT par exemple. L'attitude de l'entreprise vis-à-vis du CIF doit changer. Le recours à ce dispositif doit être clairement prévu dans la politique de formation. Un CIF en hors temps de travail est un investissement du salarié qu'il convient de soutenir, voire d'abonder et de compléter. »

Versement des fonds formation des entreprises de moins de 50 salariés

L'article 14 du projet de loi prévoit que les contributions formation obligatoires des entreprises de moins de 50 salariés seront intégralement versées à un Opca qui les gèrera dans une section distincte. Cette disposition a pour effet de mutualiser toutes les ressources des entreprises de moins de 50 salariés, considérant que le montant de l'obligation légale ne permet pas de réaliser de véritables plans de formation dans les entreprises de cette taille. « Il s'agit de l'extension aux entreprises de moins de 50 salariés d'une mesure qui s'appliquait, jusque-là, aux entreprises de moins de 10 salariés », constate Jean-Pierre Willems, consultant.

« Le projet d'amener toute entreprise de moins de 50 salariés à verser l'intégralité de ses obligations à l'Opca en respectant les tranches de moins de 10, de 10 à 19 et de 20 à 50 salariés, ne semble affecter personne, à part les entreprises concernées qui n'ont peut-être pas encore compris - pour les 10 et plus - qu'elles prendront leur autonomie en matière de gestion de leurs fonds au titre du plan. Ce système, à n'en pas douter, apportera un flux financier très important vers les Opca. Il restera à être, ensuite, très clair sur leur affectation auprès des entreprises », estime Philippe Bernier, directeur de Caraxo Conseil.