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Les opérateurs privés jouent la carte de la complémentarité

Les pratiques | publié le : 09.06.2009 |

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Les opérateurs privés jouent la carte de la complémentarité

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Le résultat de l'appel d'offres, lancé par Pôle emploi pour le reclassement de 320 000 demandeurs d'emploi, sera connu début juillet. En attendant, les sociétés privés ont noué des alliances pour renforcer leur complémentarité et leur couverture territoriale.

Le suspense devrait être de courte durée. Si le calendrier est respecté, c'est à la mi-juin que Pôle emploi pourrait établir une première short list des opérateurs sélectionnés pour le deuxième appel d'offres lancé par le service public de l'emploi. Les entreprises candidates pourront alors entrer dans le vif du sujet, avec une phase de négociation sur les tarifs et le contenu des prestations.

Appel aux sociétés de placement privées

Après une première expérimentation en 2005 et un appel d'offres en 2006, Pôle emploi a, en effet, décidé de confier 320 000 demandeurs d'emploi en deux ans à des sociétés de placement privées (agences d'emploi, sociétés de réinsertion, cabinets de recrutement...).

Organisé par région ou bassin d'emploi, le marché comprend deux «lots». Le premier, le programme Trajectoire, concerne la prise en charge et le placement de 170 000 personnes éloignées de l'emploi. Il comprend six mois d'accompagnement et six mois de suivi en poste. Le second porte sur le retour à l'emploi de 150 000 licenciés économiques qui vont bénéficier de la convention de reclassement personnalisé (CRP). Il durera douze mois. Ce marché est prévu pour deux années. « Il sera reconductible pour une année supplémentaire. »

Les dossiers ont été déposés le 19 mai. Les opérateurs ont eu six semaines pour peaufiner leur feuille de route. Les résultats définitifs seront connus, au plus tard, « début juillet » pour un lancement à la rentrée. Les sociétés sélectionnées auront alors trente jours ouvrables pour se préparer, c'est-à-dire pour recruter le personnel dont elles ont besoin ou trouver de nouveaux locaux.

Bataille des alliances

Plus de 1 000 opérateurs se sont portés candidats. Il faut dire que la manne proposée par Pôle emploi aiguise les appétits. Les entreprises de travail temporaire, tout d'abord, qui ont vu leur activité chuter de plus de 35 % depuis le début d'année, attendent cet appel d'offres comme une véritable bouffée d'air. Les cabinets d'outplacement, ensuite, espèrent également tirer leur épingle du jeu. En coulisse, se joue la bataille des alliances. Le maillage territorial tout comme la méthodologie devraient être des critères importants. C'est pourquoi, les opérateurs n'hésitent pas à se rapprocher pour jouer la carte de la complémentarité.

« Cette année, par rapport au précédent appel d'offres, le nombre de demandeurs d'emploi a été multiplié par huit, indique Franck Yschard, directeur d'Adecco Parcours et Emploi, filiale du groupe Adecco, qui a candidaté sur une trentaine de «lots». La structure a réalisé une quinzaine d'alliances, notamment Aksis - déjà sur les contrats de transition professionnelle - et Alérys. Ces alliances permettent de bénéficier d'une force de frappe inestimable. » L'appel d'offres couvre, en effet, toute l'Hexagone et même les DOM-TOM.

Le britannique A4E (Action for Employment), prestataire de Jobcenter Plus, le service de l'emploi et de l'aide sociale du gouvernement britannique, spécialisé, jusqu'ici, sur les publics éloignés de l'emploi, s'est, lui, allié à des cabinets d'outplacement pour mettre toutes les chances de son côté. Horemis a également postulé à l'appel d'offres de Pôle emploi, avec l'appui d'Enthalpia, une autre filiale du groupe Hominis dédiée au travail temporaire, mais aussi avec le soutien de BPI.

Altédia (également du groupe Adecco) s'est associé à l'Afpa. Un rapprochement qui fait grincer des dents la profession. Car, pour beaucoup d'observateurs, cette alliance prive les autres acteurs régionaux d'un partenariat avec l'Afpa. Une situation dénoncée par Christine Bertrand, Pdg d'Enthalpia Nord-Est, partenaire de l'opérateur public depuis de nombreuses années.

D'autres opérateurs, enfin, ont choisi de travailler main dans la main avec des structures spécialisées dans la création d'entreprise.

Rémunération du prestataire

Le coût de la prise en charge n'est pas connu. Dans le dernier appel d'offres, la rémunération du prestataire était conditionnée à la réussite du placement : 30 % à l'accueil de la personne ; 35 % à la signature d'un CDI ou d'un CDD d'une durée minimale de six mois ; et 35 % s'il est constaté une ancienneté continue de six mois dans la même entreprise. Cette fois, les modalités de financement pourraient être revues ; la part liée au retour effectif à l'emploi devrait, ainsi, être abaissée à 25 % pour tenir compte du contexte économique dégradé. Une reprise d'emploi à temps partiel (minimum 78 heures par mois) ne donnera lieu qu'à une rémunération partielle du service rendu.

Coût de reclassement prévisible

Mais, de l'avis de plusieurs opérateurs, le coût prévisible du reclassement devrait être de 2 000 euros, voire en-deçà. Il était de 2 500 euros pour le précédent appel d'offres.

Quels seront les critères déterminants dans le choix des prestataires ? Les opérateurs sélectionnés lors du précédent appel d'offres comptent bien mettre en avant leur «ancienneté» par rapport à ce dispositif. Toutefois, tous les résultats ne sont pas connus. Il faudra attendre l'été 2010 pour faire un bilan définitif de ce contrat lancé en... 2006. Le nombre de demandeurs d'emploi suivis et la date d'échéance du dispositif ont été révisés. Les opérateurs ont obtenu, en effet, une prolongation de leur mission, à la fin mai 2009, ayant fait valoir que les demandeurs d'emploi n'entraient pas assez vite dans le dispositif et qu'ils ne pourraient pas honorer les objectifs fixés.

D'autres, en revanche, ont pu dépasser leurs objectifs. Sodie, par exemple, affiche un taux d'adhésion de 8 % à 15 % supérieur au prévisionnel, selon les sites. Au départ, il s'agissait de suivre 5 600 chômeurs entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2008. Chaque chômeur devait se présenter une fois par semaine, en moyenne, durant six mois. « Nous avons accueilli aussi bien des personnes ne parlant pas le français, comme un plongeur de grand restaurant parisien qui est venu accompagné de son enfant, qu'un ancien directeur d'événements au Stade de France, indique Patrick Cazorla, directeur national ressources humaines de Sodie emploi. Du reste, l'opération n'est pas terminée. »

Partenariats

USG-Restart, structure du groupe USG People France, souhaite mettre en avant un taux de placements d'environ 70 % lors de sa précédente expérience. Elle compte aussi sur ses partenariats déjà noués avec Pôle emploi, notamment sur le programme du bilan de compétences approfondi et son expertise pour le contrat d'autonomie. De même, A4E, qui ne possédait rien en France quand il a remporté le précédent appel d'offres, a, aujourd'hui, développé son activité. L'entreprise compte 56 salariés et s'est implantée dans le Val-de-Marne, la Seine-Saint-Denis, l'Essonne et la Seine-Maritime. A4E travaille sur l'insertion des publics bénéficiant des minima sociaux et l'entreprise a également noué un partenariat avec l'Agefiph pour accompagner les chômeurs handicapés.

Outre le savoir-faire technique, la solidité financière des candidats devrait également compter. Toute comme la capacité d'une équipe à se déployer rapidement sur un bassin d'emploi.

La CCI de Bordeaux dépasse ses objectifs

Retenue dans l'appel d'offres Unedic de 2006, la CCI de Bordeaux tire de bons résultats de l'opération lancée en 2006. Sur les 564 personnes orientées par l'ANPE pour l'accompagnement vers la création d'entreprise, 80 % ont intégré le processus, et une sur deux a effectivement créé son entreprise. En mai 2009, la CCI bordelaise compte 152 immatriculations effectives.

« Nous avons, sur les deux années, dépassé nos objectifs de près de 10 %, précise Eric Duret, responsable du service création à la CCI. Ces bons résultats sont en partie dus à la méthode utilisée : un suivi très individualisé proche du coaching, la mise en place d'outils communs de diagnostics de projets avec le Pôle emploi girondin et un suivi aval jusqu'à dix-huit mois après l'immatriculation. » Pour garantir la viabilité du projet, la CCI bordelaise a mis à disposition cinq conseillers pour un forfait d'une trentaine heures de conseil par candidat, soit 1 500 euros par reclassement.

Taux de pérennisation est très satisfaisant

La durée moyenne du processus de création est de 132 jours. Le taux de pérennisation est très satisfaisant, puisqu'un an après la création, seul 1 % des néoentrepreneurs ont mis la clé sous la porte. Mais, malgré ces résultats, la CCI de Bordeaux ne s'est pas portée candidate pour le nouvel appel d'offres.

LAUENCE LAFOSSE

L'essentiel

1 L'appel d'offres de Pôle emploi comprend deux programmes. Le premier, Trajectoire, concerne le placement de 170 000 personnes éloignées de l'emploi. Le second porte sur le retour à l'emploi de 150 000 licenciés économiques.

2 Les opérateurs n'ont pas hésité à nouer des alliances pour renforcer leur complémentarité et leur couverture territoriale.

3 Les modalités de financement devraient être revues ; la part liée au retour effectif à l'emploi devrait, ainsi, être abaissé à 25 %.