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Le social à l'heure de l'Europe

Les pratiques | publié le : 02.06.2009 |

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Le social à l'heure de l'Europe

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L'élection du Parlement européen se déroulera le 7 juin. Voici les principaux dossiers sociaux que les eurodéputés trouveront sur leur bureau. Certains sont bloqués, d'autres sont très avancés, d'autres encore sont en cours mais n'aboutiront pas dans l'immédiat.

Les sujets qui bloquent

Aménagement du temps de travail : tout est à recommencer

Fin avril, le Parlement et le Conseil européen n'ont pu parvenir à un compromis pour réformer deux aspects cruciaux de la directive sur le temps de travail. La proposition de directive étant caduque, la prochaine Commission devra donc présenter un nouveau texte. Cette proposition voulait restreindre les possibilités données aux salariés de déroger au maximum de 48 heures de travail hebdomadaire (clause de non-participation ou opt-out). Par ailleurs, elle établissait une distinction entre les périodes de temps de garde «inactives» et les périodes de temps de garde «actives», afin que seules ces dernières soient comptabilisées pour le calcul de la durée hebdomadaire du temps de travail. Aucun accord n'ayant été trouvé sur ce nouveau texte, la directive actuelle reste en vigueur.

La CES (Confédération européenne des syndicats, qui représente les salariés) continue donc d'en appeler à la Commission afin qu'elle supprime l'opt out qui nuit, d'après elle, au renforcement du modèle social européen. A l'inverse, Business Europe, qui représente les entreprises, se félicite du maintien de la clause d'opt-out, qui « contribue à la compétitivité de l'économie et permet aux salariés d'améliorer leurs revenus en travaillant davantage ».

Détachement des travailleurs : de nombreux contentieux

La directive du 16 décembre 1996, concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services, donne lieu à nombre de contentieux entre syndicats et employeurs. Cette directive s'applique aux employeurs qui détachent certains de leurs salariés sur le territoire d'un Etat membre, pour leur compte et sous leur direction, dans le cadre d'un contrat conclu entre l'entreprise d'envoi et le destinataire de la prestation de services.

En principe, les travailleurs détachés bénéficient de certaines protections. De nombreux contentieux concernent l'absence d'un délai clair fondant la définition d'un travailleur détaché : à quel moment un travailleur détaché cesse-t-il de l'être pour devenir un migrant qui déménage dans un autre Etat membre et relève des règles juridiques de ce dernier ? L'établissement d'un délai restrictif permettrait, selon les syndicats de salariés, de limiter le risque de dumping social.

Pour réduire ces contentieux, la Commission européenne a adopté, en avril 2008, une recommandation. Elle prône, notamment, une meilleure coopération administrative entre Etats membres, l'amélioration de l'accès à l'information des prestataires de services et des travailleurs détachés, l'échange d'informations et de bonnes pratiques entre Etats membres.

Pressions du Parlement européen et des syndicats

Reste que la Commission refuse, pour l'instant, de réviser cette directive, malgré les pressions exercées par le Parlement européen et par les syndicats. Elle attend les résultats d'une étude des partenaires sociaux européens sur la mobilité des travailleurs en Europe pour décider si la révision est nécessaire.

Temps de travail des conducteurs routiers : la directive a été rejetée

En mai dernier, le Parlement européen a rejeté une proposition de directive de la Commission visant à faire disparaître les limites imposées au temps de travail des transporteurs routiers indépendants.

Associée à la Fédération européenne des travailleurs des transports, la CES s'est félicitée de cette décision, qui est, selon elle, dans l'intérêt de la sécurité routière et dans celui des conducteurs.

L'adoption de la directive, estime la CES, aurait débouché sur la dérégulation sociale des transports routiers, ouvrant la voie à la concurrence déloyale entre faux indépendants et travailleurs réguliers.

Les dossiers au long cours

L'égalité hommes-femmes : à mi-parcours

En 2006, la Commission européenne a communiqué aux institutions européennes (Conseil, Parlement...) une «feuille de route» pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Celle-ci décrit six domaines prioritaires d'action sur la période 2006-2010 : une indépendance économique égale, la conciliation vie privée/vie professionnelle, une représentation égale dans la prise de décision, l'éradication de toute forme de violence fondée sur le genre, l'élimination des stéréotypes de genre et la promotion de l'égalité dans les politiques externes et de développement.

Cette feuille de route a fait l'objet, le 26 novembre 2008, d'un rapport pour évaluer son avancement à mi-parcours. Par ailleurs, le 14 novembre 2008, lors d'une réunion informelle consacrée à l'égalité professionnelle, la présidence française a proposé aux ministres européens compétents de fixer des objectifs de réduction d'écart de rémunération, de définir les moyens d'atteindre ces objectifs et de rendre publics les résultats.

Flexicurité du marché du travail : tout reste à faire

Après que les Etats membres ont adopté des principes communs de flexicurité lors du sommet européen de décembre 2007, la Commission a lancé, à la demande du Conseil, une «mission pour la flexicurité», pilotée par Gérard Larcher, ancien ministre délégué à l'Emploi, et par le commissaire européen à l'Emploi, Vladimir Spidla, en coopération avec les partenaires sociaux européens. L'objectif est de permettre aux travailleurs de passer plus facilement d'un emploi à un autre, tout en maintenant et en améliorant la compétitivité des entreprises, et en préservant le modèle social européen. Le rapport final de la mission, présenté le 9 décembre 2008, a fait diverses propositions encourageant la mise en oeuvre de principes communs oeuvrant en ce sens.

La CES considère que ces propositions donnent aux employeurs toute latitude pour licencier à moindres frais les travailleurs. Elle conteste les politiques de workfare qui obligent les salariés à accepter toutes sortes d'emplois même si ceux-ci sont précaires, et fournit aux employeurs une main-d'oeuvre disciplinée.

A l'inverse, pour Business Europe, les orientations de la Commission sur ce dossier vont dans le bon sens et sont susceptibles de corriger les faiblesses structurelles du marché du travail européen liées à sa rigidité.

Les directives très avancées

Conciliation vie privée et vie professionnelle : toujours en débat

La proposition de directive du 3 octobre 2008 vise à améliorer la sécurité et la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitant. Le texte propose, notamment, de faire passer la durée minimale du congé de maternité de 14 à 18 semaines sans perte de revenus. Les Etats membres auront toutefois la possibilité de fixer un plafond de paiement. Durant cette période, la protection contre le licenciement sera renforcée, de même que le droit de retrouver un emploi équivalent à la fin du congé de maternité. Ce texte fait actuellement l'objet d'un débat en commission au Parlement.

Opposition

La CES approuve ce projet. A l'inverse, Business Europe s'y oppose, considérant que le minimum légal actuel suffit à garantir la santé et la sécurité des femmes, et que l'extension des congés maternité nuirait à leur emploi.

La proposition de directive travail maritime approuvée par le Parlement européen

En janvier 2009, le Parlement européen a approuvé une proposition de directive sur le «travail maritime», portant sur des standards a minima de travail dans cette profession. Ce texte découle de l'accord conclu entre l'Association des armateurs de la Communauté européenne (ECSA) et la Fédération européenne des travailleurs des transports (ETF).

Cette proposition, très consensuelle, transpose en droit communautaire certaines dispositions de la Convention de l'OIT de 2006 sur le travail dans le secteur maritime. L'objectif est de réduire le dumping social et de faciliter la création d'emplois de meilleure qualité dans le secteur maritime.

La proposition de directive a été transmise pour approbation au Conseil européen. Le Parlement appelle, par ailleurs, les Etats membres à ratifier sans délai cette directive dès qu'elle entrera en vigueur.

La directive sur les CEE adoptée

Le 23 avril 2009, le Conseil a révisé la directive sur les droits des comités d'entreprise européens. Le nouveau texte améliore notamment les droits d'information et de consultation des travailleurs, en particulier lors des restructurations, et veut faciliter la création de comités d'entreprise européens (lire Entreprise & Carrières n° 938). Si la CES se réjouit de cette décision qui améliore les droits des salariés et renforce l'Europe sociale, Business Europe se montre circonspect, arguant que les dispositions précédentes étaient suffisantes.

L'essentiel

1 Trois dossiers sociaux, actuellement à l'étude à Bruxelles, sont bloqués ; il faudra les reprendre à zéro : l'aménagement du temps de travail ; le détachement des travailleurs ; le temps de travail des conducteurs routiers.

2 Les questions de «flexicurité» du marché du travail et d'égalité hommes/femmes avancent lentement et n'aboutiront certainement pas avant plusieurs années.

3 Deux dossiers sont très avancés : la directive sur la conciliation vie professionnelle/vie privée et celle sur le travail maritime.