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Vers la création de parcours personnalisés ?

Enquête | publié le : 02.06.2009 |

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Vers la création de parcours personnalisés ?

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Alors que le nombre de signatures de contrat pro dégringole, les pouvoirs publics s'attachent à restaurer une des vocations premières du dispositif : l'insertion des publics les plus éloignés de l'emploi.

Cinq ans après sa création, le contrat de professionnalisation subit de plein fouet les effets de la crise. Entre janvier et mars 2009, le nombre d'entrées dans le dispositif (28 929) a quasiment été divisé par deux par rapport à la même période de 2008 (44 482). En 2008, avec 178 000 bénéficiaires, le dispositif avait déjà connu une moindre progression (4 % contre 18 % l'année précédente). « Plus adapté aux besoins immédiats d'une entreprise que le contrat d'apprentissage, le contrat de professionnalisation est aussi plus sensible à la conjoncture économique », explique Pierre Courbebaisse, président de la commission alternance de la Fédération de la formation professionnelle.

Embauches quasi stoppées

« Dans certains secteurs comme l'immobilier, où les agences ferment les unes après les autres, ou encore dans l'industrie ou le commerce, l'embauche en contrat pro est quasi stoppée, précise Laurence Carlinet, directrice du développement de l'Agefos PME. Au point que nous nous inquiétons déjà du déficit de compétences que pourraient connaître certaines activités lors de la reprise. » Afin d'enrayer la chute, Nicolas Sarkozy a prévu, dans le cadre du «plan d'urgence pour l'emploi des jeunes» annoncé le 24 avril dernier, l'introduction d'une prime incitative de 1 000 euros pour l'embauche d'un jeune de moins de 26 ans en contrat de professionnalisation ; montant doublé si le jeune n'a pas le niveau bac. Pôle emploi, qui devra désigner des référents alternance dans chaque bassin d'emploi, s'est également vu conférer un objectif de placement de 25 000 jeunes.

Politique d'insertion

Outre le rebond quantitatif espéré - 170 000 contrats entre le 1er juin 2009 et le 1er juin 2010 -, les pouvoirs publics entendent également restaurer une des vocations premières du dispositif créé par la loi de 2004 sur la formation professionnelle, en substitution des contrats de qualification, d'orientation et d'adaptation : l'insertion des publics les plus éloignés de l'emploi. « Les employeurs semblent, en effet, se détourner des publics non qualifiés : 68 % des titulaires d'un contrat de professionnalisation ont au moins le bac », souligne Florence Lefresne, économiste à l'Institut de recherches économiques et sociales (Ires). « La logique du diplôme, due à la pression des familles, qui veulent être rassurées, et à celle des organismes de formation, qui souhaitent garantir leur activité, est l'une des contraintes pesant sur le contrat de professionnalisation, précise, de son côté, Laurence Carlinet. C'est un cercle vicieux, car le déficit actuel de l'offre de formation en certificats de qualification professionnelle (CQP), par exemple, entraîne, à son tour, une faiblesse de la demande. »

Atouts du contrat

A la suite du Grenelle de l'insertion, qui avait pointé du doigt cette faiblesse du dispositif, Jean-François Pilliard, le délégué général de l'UIMM, s'est vu confier la rédaction d'un rapport. Outre son coût, qui devrait se rapprocher de celui du contrat d'apprentissage - selon une simulation réalisée par Agefos PME, le coût moyen annuel d'un contrat de professionnalisation est de 12 150 euros, contre 7 084 euros pour un contrat d'apprentissage, soit 71 % plus cher - , le contrat de professionnalisation souffrirait, selon le rapport rendu le 7 mai, d'une large méconnaissance de ses spécificités et atouts (réponse à un besoin précis de l'entreprise, formation personnalisée et plus courte qu'en apprentissage, signature possible à tout moment de l'année).

Cartographie des compétences

Selon le texte, les branches et les entreprises n'ont, également, pas suffisamment su personnaliser les parcours de formation des bénéficiaires. A la suite d'un travail de GPEC visant à estimer les besoins de compétences non pourvus dans les PME de sa région, la CGPME Lorraine lance, actuellement, une expérimentation visant à réaliser la «cartographie» des compétences transversales des métiers. « Pour se rassurer, les dirigeants de PME préfèrent généralement embaucher un salarié surdimensionné plutôt que de prendre le risque de recruter une personne qualifiée à qui il manque une compétence technique, explique Mickaël Zenevre, le président. Grâce à notre cartographie, nous pourrons les aider à identifier, très rapidement, les parcours de formation appropriés leur permettant de recruter en contrat de professionnalisation. »

Déficit de compétences

Dans la même logique, la fédération de la plasturgie a créé, en 2006, sur la base du contrat de professionnalisation, un «parcours d'intégration et de professionnalisation (PIP)». « Les déficits de compétences techniques sont criants dans notre activité, souligne Florence Bonnet-Touré, la déléguée générale adjointe de la fédération. Plutôt que de privilégier la voie du diplôme ou de la certification, nous avons préféré valoriser les formations mises en place en interne par les entreprises elles-mêmes. Ces formations, limitées à 400 heures réparties sur douze mois, sont cependant encadrées par l'intervention d'un organisme externe. Notre Opca, Plastifaf, se porte, en outre, garant de l'adéquation entre l'entreprise, le bénéficiaire et le parcours de formation. De plus, ces contrats de professionnalisation aménagés ne peuvent être signés qu'en CDI. »

La faiblesse de l'encadrement prévu par la loi - contrairement à l'apprentissage, le tuteur n'est pas obligatoire dans le contrat de professionnalisation - conduit le rapport Pilliard à préconiser, également, le développement et le financement des Geiq (Groupement d'employeurs pour l'insertion et la qualification) et des ETTI (Entreprise de travail temporaire d'insertion). « Il n'existe, en effet, aucun dispositif permettant d'aider les publics les plus éloignés de l'emploi à surmonter les difficultés professionnelles ou extra-professionnelles qu'ils sont susceptibles de rencontrer », note le rapport. Une situation qui conduit les entreprises à se tourner vers des publics en moindre difficulté ou à préférer l'apprentissage.

Plus-value

« Au-delà de l'accompagnement quotidien au cours du contrat, le Geiq apporte une plus-value essentielle au moment du choix du dispositif, explique Etienne Boile, directeur d'un Geiq multisectoriel à Ham, dans la Somme. A un jeune en échec scolaire, on conseillera un parcours de formation moins lourd en apports théoriques. On réorientera également peut-être vers un contrat de professionnalisation, et donc un centre de formation plus proche, celui qui a été orienté une première fois vers l'apprentissage, mais qui habite à deux heures de route de son CFA. »

Le rapport Pilliard, enfin, ne fait pas l'impasse sur la nécessaire simplification des démarches administratives liées au contrat de professionnalisation. « S'il y a un hic dans ce dispositif, relève Adrien Béchonnet, directeur des relations écoles et universités du groupe Total, c'est sa lourdeur administrative. Dans mon service, la gestion de ce contrat requiert deux fois plus de temps que celle d'un contrat classique. »

A. D.

* Coût moyen annuel d'un contrat pour une entreprise de 10 à 19 salariés embauchant un jeune de 18 ans inscrit à Pôle emploi, d'un niveau de qualification inférieur au bac, avec une rémunération équivalente au minimum légal.

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