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Enquête

La solution «nearshore»

Enquête | publié le : 19.05.2009 |

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La solution «nearshore»

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Amiens, Le Mans, Laval et, plus récemment, Reims offrent des opportunités aux entreprises de services - et notamment aux centres d'appels - qui veulent maîtriser leurs coûts et leur turn-over.

A pleine vitesse, le TGV dessine un nouveau territoire. Une curieuse carte de France, qui paraît chiffonnée comme du papier, et où des villes comme Le Mans, Laval et, surtout, Reims se sont singulièrement rapprochées de Paris (voir ci-contre). Désormais située à 45 minutes de la capitale, la cité des ducs de Champagne s'est soigneusement préparée à son nouveau statut de « 21e arrondissement », comme aime à l'appeler Jean-Yves Heyer, le patron d'Invest in Reims, agence de développement local créée près de quatre ans avant l'arrivée du TGV.

Dernier gros coup de cet infatigable promoteur du bassin d'emploi : l'implantation de Sciences po, avec le plus gros campus de province, qui accueillera 1 800 élèves. Le bilan de l'agence affiche aussi 54 entreprises pour un ensemble de 2 717 emplois. ING Direct se prépare à y installer 200 emplois de back-office ; l'opérateur de tourisme Kuoni a complété à Reims son centre d'appels de la rue d'Amsterdam à Paris et y transfère les postes au fil des départs naturels à Paris (lire ci-contre). Sans compter un siège social français pour le n° 1 de l'optique néerlandais Hans Anders, qui y effectuera aussi les tâches de polissage des verres et de montage des lunettes.

Gros avantage de Reims : un prix du m2 de bureau en location de 165 euros par an, comparés aux 515 euros de La Défense (92) ou aux 650 euros du quartier de l'Opéra, à Paris. Et le tout à 30 minutes de Roissy.

Locaux prêts à l'emploi

Laval ou Le Mans, à peine plus éloignées de Paris, jouent la même carte. La cité mayennaise a, ainsi, obtenu, en mars dernier, l'implantation d'un centre d'appels de Coriolis de 250 personnes, brûlant la politesse à d'autres villes en permettant à l'opérateur de s'installer très rapidement dans des locaux blancs, prêts à servir.

« Laval se trouve à 1 h 30 de Paris, avec dix rotations de TGV par jour, explique Olivier Hérault, le directeur général de Coriolis. Mais nous l'avons aussi choisie parce qu'un seul autre centre d'appels se trouve dans ce bassin de 200 000 personnes. Cette activité était bien plus présente à Rennes ou au Mans, avec des risques pour nous de délais de recrutement et de tensions sur les salaires. »

Des formations au métier de la relation client existant à Laval, Coriolis y a ajouté celle du téléphone. « Le turn-over est moins élevé en province, tout comme le taux d'absentéisme, poursuit Olivier Hérault. Et, sur des bassins d'emploi de taille plus réduite, il est aussi plus facile d'acquérir une image d'employeur de référence. » Son entreprise avait déjà créé une petite sensation en ouvrant, il y a quelques années, un centre d'appels d'une centaine de personnes à Saint-Augustin, un village corrézien de 1 000 habitants. Elle possède aussi, depuis dix ans, un centre de 650 personnes à Amiens.

Alternative

Ces villes de la très grande ceinture proposent une alternative «nearshore» à l'externalisation des centres d'appels vers l'étranger. Elles le pourront aussi longtemps qu'un délicat équilibre sera maintenu : « Ce type d'activité occupe 0,5 % de la population active sur le bassin rémois, explique Jean-Yves Heyer. A partir de 2,5 %, on commence à constater des tensions sur le marché de l'emploi, et une inflation sur les salaires. »

G. L. N.

Kuoni : un centre d'appels à Reims pour lutter contre le turn-over parisien

Pas de licenciements, mais un principe de vases communicants : c'est la démarche qu'a suivie le voyagiste Kuoni pour transférer une partie de l'activité de son centre de réservation parisien vers celui de Reims, ouvert depuis août 2007. Une quinzaine de conseillers chargés de la réservation «circuits», produit le plus simple à détailler auprès de quelque 3 500 agences de voyages clientes en France, reçoivent, désormais, les appels à Reims. « Le transfert de l'activité a été réalisé grâce au turn-over, détaille Charles de Vivie, le DRH. Au fur et à mesure des départs naturels du centre parisien, les postes ont été ouverts à Reims. » Permettant cette solution douce, le turn-over des salariés était aussi le problème à régler pour la direction. Les conseillers du centre de réservation de la rue d'Amsterdam, à Paris, où se trouve encore le siège de Kuoni pour quelques semaines, avant son départ à Saint-Ouen (93), étaient particulièrement sollicités par la concurrence sur le bassin d'emploi francilien. Résultat : 15 % à 20 % de départs chaque année. Cette volatilité a évidemment quasiment disparu avec la crise actuelle, mais elle pourrait croître de nouveau en période de reprise.

Un effet TGV

« A Reims, le vivier de candidats potentiels était certes plus restreint, explique Charles de Vivie. Mais, aucun acteur majeur du tourisme ne s'y trouvant, nous espérions un turn-over bien plus réduit. » Faute de formation spécifiquement dédiée à ses métiers, l'entreprise a ciblé des profils BTS tourisme et autres bac + 2 tourisme, accueil, commercial, quitte à doubler, de quinze jours à un mois, le temps de formation à la prise de poste, organisée par l'entreprise.

Dans le choix de la ville, l'effet TGV, qui met Reims à 45 minutes de Paris, a été prépondérant : il permet des déplacements rapides de managers de la capitale vers la Champagne, tous les 10 à 15 jours, mais aussi des opérations de formation en intra à Paris, pour les salariés de Reims, le temps d'une journée.

Si l'entreprise a également gagné sur les coût immobiliers, elle n'a pas cherché à optimiser la masse salariale sur cette activité, assure le DRH. Les mêmes rémunérations qu'à Paris ont été proposées à Reims pour ces conseillers voyages.

L'opération lui apparaît aujourd'hui comme une réussite, même si certains éléments sont peu quantifiables : le turn-over est faible (un ou deux départs à déplorer en deux ans), de même que l'absentéisme, les salariés logeant plus près de leur lieu de travail et les trajets étant moins chaotiques, ce qui se traduit par une meilleure productivité et, selon Charles de Vivie, une meilleure qualité de service.

G. L. N.

KUONI FRANCE

• Activité : voyagiste.

• Effectifs : 450 salariés.

• Chiffre d'affaires 2007 : 278 millions d'euros.