E & C : Vous venez de publier, avec la sociologue Aline Conchon, un ouvrage sur les administrateurs salariés*. Quels sont leur rôle et leurs pouvoirs ?

M.-N. A. : Ils ont les mêmes droits et les mêmes devoirs que les autres administrateurs : déterminer la stratégie de l'entreprise, nommer et révoquer les dirigeants. Ils ont voix délibérative. Mais ils se distinguent des autres administrateurs par leur indépendance vis-à-vis du président. Ils n'appartiennent pas au sérail de ces administrateurs qui siègent dans plusieurs conseils d'administration (CA). Eux travaillent dans l'entreprise et la connaissent de l'intérieur. Grâce à eux, le CA peut savoir directement ce que pensent les salariés, sans passer par le filtre des dirigeants.

E & C : Ont-ils une influence sur le dialogue social ?

M.-N. A. : Ils peuvent s'intéresser aux questions sociales mais ce ne sont pas de «superdélégués». Ils laissent les questions d'emploi et de salaire aux CE et CCE. D'ailleurs, en France, le mandat d'administrateur salarié est incompatible avec celui de représentant du personnel. Je dirais plutôt que c'est dans les entreprises où il règne un bon niveau de dialogue social que les administrateurs salariés existent et jouent le mieux leur rôle.

E & C : Combien y a-t-il d'administrateurs salariés et quel est leur profil ?

M.-N. A. : Pour 2008, Aline Conchon a recensé 545 administrateurs salariés dans 160 entreprises françaises. Ils siègent dans les CA de sociétés à capitaux publics et entreprises nationalisées - où ils sont prévus statutairement - et aussi au conseil de certaines sociétés anonymes à capitaux privés. Ce sont essentiellement des hommes, quinquagénaires, mais les femmes sont cependant plus nombreuses que parmi les administrateurs classiques.