logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Les pratiques

Avec la crise, le congé de mobilité trouve son public

Les pratiques | publié le : 24.03.2009 |

Image

Avec la crise, le congé de mobilité trouve son public

Crédit photo

Conçu pour favoriser les évolutions professionnelles dans le cadre d'une GPEC, le congé de mobilité sert aussi aux réductions d'effectifs lors d'un PSE. Peu utilisé jusqu'ici, ce dispositif, créé en 2007, commence à prendre son envol.

Faurecia, Accor Hôtellerie, Schneider Electric, Sanofi Aventis... Autant d'entreprises ayant recours au congé de mobilité, un dispositif réservé aux entreprises de plus de 1 000 salariés dotée d'un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Toutes ont, théoriquement, conçu leur congé de mobilité «à froid» pour accompagner les candidats dans une démarche d'évolution professionnelle. Mais toutes l'utilisent, aujourd'hui, «à chaud» pour réduire leurs effectifs sur la base du «volontariat». Car le dispositif peut aussi faire partie des mesures d'un plan de sauvegarde de l'emploi. Il constitue alors une alternative «innovante» au congé de reclassement que toute entreprise de plus de 1 000 salariés doit proposer à tout licencié économique. Les deux dispositifs visent le retour à l'emploi et une rupture du contrat de travail «d'un commun accord». Mais, alors que le congé de reclassement doit se dérouler sur 4 à 9 mois, la durée du congé de mobilité ne connaît aucune contrainte de temps. Il permet, de plus, de tester ou d'accepter un travail en CDD ou CDI avant la rupture du contrat de travail. « Le salarié peut remplir des missions courtes pour valoriser ses talents dans une PME, une collectivité territoriale ou une association », se félicite un expert.

Schneider Electric avait négocié un accord GPEC en 2008. Le texte, signé par tous les syndicats, prévoit des congés de mobilité de 8 à 18 mois selon l'ancienneté, des enveloppes pour la formation, des primes de départ s'ajoutant aux indemnités de licenciement. Et l'appui de Schneider initiatives emploi pour conseiller les porteurs de projet et valider leur dossier.

« Il s'agit de disposer d'outils pour former des salariés peu qualifiés afin qu'ils puissent changer de métier en cas de délocalisations », explique Jean-Paul Pernin, coordinateur CFDT. Mais, un avenant a dû être signé, par la CFDT et FO seules, pour des « départs volontaires » dans le cadre des 600 suppressions d'emploi. « Pour ces départs, nous avons obtenu que les salariés puissent être accompagnés par des représentants du personnel afin de s'assurer de leur volontariat », précise Jean-Paul Pernin.

Chez Sanofi Aventis aussi, l'accord GPEC date de 2008. Le congé de mobilité y concerne les seuls métiers de la visite médicale ; « 320 salariés sont déjà partis dans ce cadre », indique l'entreprise, en précisant qu'elle n'a aucun objectif chiffré. Le dispositif, accessible sans limite de temps, va désormais servir «à chaud» pour 927 emplois à supprimer. « Nous avons baptisé cet accord «GPSE», car il favorise l'exode plus que les mobilités internes », déplore le syndicaliste Gérard Fourmal.

Eviter les licenciements secs

« Les partenaires sociaux se montrent souvent réticents quand on leur parle de congé de mobilité tout en prévoyant des réductions d'effectifs », confirme Jean-François Carrara, d'Algoe. Pourtant, note Sébastien Tillou, de BPI, « mieux vaut privilégier les congés de mobilité plutôt que les ruptures conventionnelles susceptibles d'être contestées et requalifiées en licenciements économiques ».

L'équipementier automobile Faurecia mise, ainsi, sur le congé de mobilité pour se «redimensionner». La direction n'a pas souhaité s'exprimer, mais la CFDT précise que ce dispositif figure dans le PSE concernant près de 1 215 salariés à Flers (61), Nogent-sur-Vernisson (45), Magny-Vernois (70) ou encore à Cercy-la Tour (58). Pour le DS CFDT, « il s'agit d'éviter au maximum les licenciements secs ». Des formations et des financements ainsi que l'accompagnement par un espace mobilité emploi sont prévus pour les salariés optant pour une reconversion ou une création d'entreprise. Chez Accor Hôtellerie, le congé de mobilité s'adresse aux directeurs d'hôtel et prévoit un entretien professionnel pour élaborer un projet, dans ou hors de l'entreprise. Mais sa durée semble chiche : 3 à 6 mois.

Jusqu'ici, le congé de mobilité ne semblait pas faire recette. Seuls 7 accords de GPEC signés en 2007 le prévoyait et 15 en 2008, apprend-on au ministère du Travail. Mais le dispositif pourrait, avec la crise, connaître un succès inattendu. Seule condition : « Qu'il soit inscrit dans les accords GPEC », indique Jean-François Carrara. Les entreprises peuvent alors recourir au congé de mobilité plutôt qu'aux licenciements économiques. Pour ce consultant, le congé de mobilité suppose, néanmoins, une « période calme », alors qu'avec la crise, « les DRH ne savent plus anticiper, ils manquent de visibilité ». Par ailleurs, la procédure de mise en place est lourde. « Si plus de 10 salariés prennent ce congé, il faut procéder à la double consultation du CE, comme pour un PSE », explique Sébastien Tillou, dont plusieurs clients ont renoncé. De plus - avantage ou inconvénient ? -, beaucoup de thèmes sont à négocier. L'initiative peut être donnée au salarié, à l'employeur - sachant que le salarié peut refuser - ou aux deux. La durée et le contenu du congé sont libres. Le délai de la priorité de réembauche peut être allongé au-delà des douze mois minimum.

Un panel d'incitations

Le succès du dispositif repose sur le volontariat des salariés, lesquels subissent des injonctions contradictoires. Rester dans l'entreprise pour ne pas sauter dans un marché de l'emploi où le chômage s'aggrave. Quitter le navire quand y sévissent la morosité et la mise en berne des projets...

La rupture différée du contrat de travail, à la fin du congé de mobilité, joue comme filet de sécurité. Pendant le congé, l'employeur doit verser un salaire, égal au minimum à 65 % de la rémunération antérieure, exonéré de cotisations sociales.

Ce salaire est suspendu en cas d'embauche en CDD ou CDI. Mais, pour séduire les salariés, les entreprises déploient tout un panel d'incitations, financières ou non. Tel est le cas chez Schneider Electric, avec des prêts et subventions aux porteurs de projet. Et chez Sanofi Aventis, où le congé - de 18 à 24 mois - avec maintien du salaire permet de préparer, par exemple, le diplôme d'infirmier, un BTS nutrition et diététique ou de suivre des formations au management... Mais, pour assurer l'avenir professionnel des partants, les DRH doivent surtout veiller au bon fonctionnement de leurs antennes emploi et au bien-fondé des décisions des commissions de validation des projets, généralement paritaires.

Mode d'emploi

Le congé de mobilité est réservé aux entreprises de plus de 1 000 salariés ayant signé un accord de GPEC.

Il vise à permettre aux entreprises de mieux anticiper les mutations économiques, et aux salariés, de trouver un nouvel emploi.

Il peut concerner toute l'entreprise ou être limité à certains emplois ou catégories de salariés.

Il prend fin par une rupture d'un commun accord.

L'essentiel

1 Plusieurs entreprises mettant en oeuvre un PSE proposent, actuellement, un congé de mobilité. Un dispositif jusqu'ici peu utilisé.

2 Ce dispositif peut jouer un rôle précieux d'amortisseur de crise.

3 Mais, le congé de mobilité doit être inscrit, au préalable, dans un accord de GPEC.