Neuf entreprises italiennes sur dix appartiennent à une famille et sont gérées par celle-ci. Et deux tiers d'entre elles doivent désormais affronter un changement de génération à leur tête. Actuellement, plus du tiers des patrons ont plus de 65 ans tandis que 43 % sont âgés de 51 à 65 ans.

Parmi eux, 7 % seulement ont déjà établi un plan de succession. Or, selon la Confindustria (Medef italien), au premier passage générationnel, 30 % des PME plongent dans une crise irréversible en raison d'un manque de programmation et de gestion du processus de succession. « Cette situation est étroitement liée à l'allongement de la durée de vie, remarque Adriana Luciano, professeur de sociologie du travail à l'université de Turin. Par le passé, les conflits entre générations étaient limités par une mortalité naturelle alors qu'aujourd'hui, les octogénaires restent à leur poste de commande et les héritiers leur succèdent tardivement, nourrissant ainsi le cercle vicieux de la gérontocratie ».

Les «success stories» des années 1970 et 1980, celles «du miracle économique» lié au capitalisme familial, ne sont plus d'actualité. Même si l'expérience de l'entreprise typique italienne - lorsqu'elle sait marier valeurs du passé et nouvelle culture d'entreprise - demeure un modèle d'excellence.

La famille Ricasoli, à la tête de l'entreprise agricole «Barone Ricasoli» depuis l'an 1141, en constitue un des exemples les plus remarquables. Elle a su préserver la force familiale, répartir les rôles entre les héritiers, tout en s'ouvrant aux ressources externes. « C'est ce qu'ont du mal à faire la plupart des entreprises familiales, observe Sheyla Rega*, pionnière dans l'utilisation, en Italie, des techniques de business coaching. Le patron, c'est encore le padre padrone qui ne veut ni se sait déléguer, qui cultive le lien symbiotique entre famille et entreprise, qui perçoit le manager comme un corps étranger déstabilisant parce qu'il remet en question le rôle de leader naturel. »

Dans les cas de succession, le coach se révèle particulièrement utile pour aider à dépasser les obstacles liés au transfert de la direction et de la propriété. « Cet accompagnement professionnel est très important au niveau des processus relationnels, souligne Sheyla Rega, car il faut transformer la dépendance en autonomie. De cette manière, on peut éviter les échecs classiques. Par exemple, un fils est appelé à succéder à son père, sans avoir été assez préparé. Il risque donc, soit de s'identifier totalement au père tout-puissant, soit de le rejeter. » Dans un cas comme dans l'autre, l'asphyxie de l'entreprise menace, à plus ou moins long terme.

Sheyla Rega travaille aussi bien avec des PME qu'avec des multinationales en difficulté, que ce soit par rapport à leur stratégie de communication, à l'optimisation de leurs potentiels, à la division des rôles au sein de la famille ou encore à la gestion des alliances internationales. Elle estime qu'en cette période de crise, les entreprises familiales doivent faire un effort supplémentaire pour ouvrir leurs portes aux cadres dirigeants et développer une politique d'investissement dans la formation.

« L'Italie est, souligne-t-elle, un des pays qui a le plus de difficultés à passer d'une organisation très verticale à une organisation horizontale comportant plus de délégation, ainsi qu'à utiliser la formation comme outil d'anticipation des changements et des évolutions. »

De fait, en Italie, la majorité des petites entreprises ne connaissent pas l'existence du Fonds social européen (FSE), auquel elles pourraient demander des financements.