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Enquête

Difficile de rompre avec le modèle du permanent

Enquête | publié le : 17.02.2009 |

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Difficile de rompre avec le modèle du permanent

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En l'espace de quelques semaines, l'industriel Nexter a mené à bien le reclassement de 28 ex-permanents syndicaux. Principal point d'achoppement pour les intéressés : la prise en compte des compétences acquises au cours des mandats.

Eloignés des opérations pendant en moyenne douze ans, les 28 ex-permanents syndicaux de Nexter ont réintégré, depuis le 1er janvier, un poste en production, montage, achats, ou prévention hygiène et sécurité. Opéré en l'espace de quelques semaines, ce reclassement n'est pas la conséquence de mandats perdus à la suite d'élections professionnelles : celles-ci n'auront lieu qu'en décembre 2009.

Le fabricant d'armements terrestres a, en fait, renégocié, au cours des dix-huit derniers mois, l'ensemble de ses accords d'entreprise. Relatif au droit syndical, le dernier d'entre eux, signé le 1er décembre 2008 par quatre organisations syndicales - la CGT n'a pas signé -, rompt avec un cadre extrêmement favorable, hérité de la période où l'ex-Giat Industries faisait partie des établissements d'Etat rattachés au ministère de la Défense. Il accordait, alors, un surplus de 31 000 heures de délégation réparti entre les syndicats en fonction des résultats aux élections professionnelles. Il en résultait une pléthore de permanents, que le nouvel accord s'est attaché à supprimer.

Dispositif inadapté

« Conçu pour une entreprise de 10 000 salariés, ce dispositif se révélait totalement inadapté », explique Jean-Christophe Benetti, le DRH. Aujourd'hui, l'entreprise n'en emploie plus que 2 500. « En outre, le système de pot commun dans lequel chacun venait puiser ses heures de délégation rendait illisibles les attributions de chacun », poursuit-il. Pour le DRH, il était, aussi, important de rompre avec le modèle, également dépassé, du permanent : « La qualité du dialogue social ne se mesure pas au nombre d'heures de délégation, précise-t-il. Il me semblait essentiel de maintenir le lien entre l'activité de l'entreprise et la représentation syndicale. »

Vingt-huit permanents à reclasser

Dans le nouvel accord, la direction s'est donc engagée à reclasser, sur des postes opérationnels, les vingt-huit permanents concernés. Le texte prévoit, notamment, des bilans de compétences, des formations, des VAE, du tutorat. Au 1er janvier 2009, 60 % des intéressés avaient donc repris un poste correspondant à leur affectation d'origine ; 40 % s'étaient vu proposer une nouvelle orientation de carrière. « Dans chaque cas, le poste correspond à la fois aux besoins de l'entreprise et aux compétences et aspirations des salariés », souligne le DRH. En clair : pas de «placard» pour les anciens permanents.

Ce n'est pas Jean-Pierre Brat, le DSC CGT, qui formulera ce reproche : « Ce qui m'inquiète plutôt, c'est l'absence totale de réflexion de l'entreprise sur la compatibilité entre les postes proposés et les temps de délégation restants. » Lui-même totalise, selon les nouvelles règles, 100 heures de délégation mensuelles, auxquelles s'ajoutent 40 heures accordées en 2009 aux DSC et à leur adjoint afin de faciliter la transition entre les deux systèmes et de préparer les prochaines élections professionnelles de décembre 2010. Or, il vient de se voir réaffecté sur un poste de monteur, après avoir refusé un poste de gestionnaire de production. Un « piège », selon lui. « En nous proposant des postes avec des objectifs, la direction cherche à nous mettre en difficulté professionnellement. Un bon moyen d'avoir les mains libres. »

« Nous craignons de pénaliser le service qui nous accueille », relève, de son côté, Daniel Coutaudier, le DSC CFDT. En cumulant des mandats, un délégué peut n'effectuer que 10 % de son temps à son poste de travail, ce qui complique l'organisation du service.

Mi-temps impossible

« A fortiori dans une entreprise très rationalisée, qui affecte chaque salarié à une fonction précise, il n'est plus guère possible d'intervenir en support comme autrefois », poursuit Daniel Coutaudier. Une situation que la direction a tenté d'éviter en limitant ce cumul à un mi-temps, mais sans y parvenir.

Pour les reclassés, le principal point d'achoppement reste, cependant, la prise en compte des compétences acquises au cours des mandats. Pourtant expressément prévue dans l'accord, cette disposition n'est pas parvenue à satisfaire l'ensemble des attentes : si certains, anciens élus au CHSCT, embrassent aujourd'hui une nouvelle carrière d'agent de prévention ou de gestionnaire hygiène sécurité, la non-prise en compte de l'expérience syndicale fait grincer les dents de nombreux ex-permanents. « Les compétences acquises au cours d'un mandat syndical sont souvent difficiles à valoriser, à plus forte raison dans une entreprise où la fonction RH, très centralisée, n'offrait que peu de postes disponibles, précise Jean-Christophe Benetti. En revanche, certains négociateurs de talent ont trouvé une nouvelle affectation dans le cadre de la fonction achat. »

Retrouvez l'accord signé chez Nexter sur

< www.wk-rh.fr >, rubrique Entreprise & Carrières, «compléments d'articles».

NEXTER

• Activité : fabricant d'armements terrestres.

• Effectifs : 2 500 salariés.

• Chiffre d'affaires 2008 : 587 millions d'euros.