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« Les Opca ne sont pas tous à mettre dans le même sac »

Enquête | publié le : 10.02.2009 |

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« Les Opca ne sont pas tous à mettre dans le même sac »

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Pour Alain Meignant (1), le critère du seuil de collecte des Opca n'a de pertinence que dans une logique technocratique à base de ratios.

« Une nouvelle réforme de la formation professionnelle s'annonce, alors que la précédente n'était pas encore complètement digérée !

Un des enjeux évidents de cette réforme est le contrôle des financements. Le milliard d'euros devient l'unité de compte. Les Opca en gèrent quelques-uns, et différents rapports, avec une tendance suspecte aux généralisations, en dénoncent la faible efficacité. Tous les professionnels savent qu'il y a des Opca léthargiques et d'autres, actifs et efficaces. Les mettre dans le même sac n'a pas de sens, et le critère du seuil de financement n'a de pertinence que dans une logique technocratique à base de ratios. Les regroupements obligés généreraient de faibles économies de gestion, beaucoup de dégâts dans les actions engagées par les plus dynamiques, et, sans doute, des conflits qui détruiraient les actifs immatériels considérables acquis par certains d'entre eux. Les partenaires sociaux ont donc eu raison de refuser d'entrer dans cette logique et de mettre en avant le primat de la proximité et de la libre adhésion. Il n'en reste pas moins qu'une dynamisation de ces structures de collecte est nécessaire. Un groupe de travail est créé. Attendons ses conclusions... ou un «oukase».

Les publics cibles du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) sont, en partie, des demandeurs d'emploi, y compris les 160 000 jeunes que l'Education nationale - étrangement silencieuse pendant ce débat qui la concerne pourtant au plus haut point - libère chaque année sans qualification sur le marché du travail. Cette question a, au début de la négociation, été soulevée par la délégation patronale, qui s'est vu signifier que c'était hors sujet.

Entreprises dubitatives

Les entreprises peuvent légitimement se demander si, au nom de la solidarité avec les grands enjeux nationaux, une partie des fonds de la formation professionnelle ne va pas être utilisée à payer une seconde fois ce qu'elles paient déjà avec leurs impôts et leurs cotisations sociales, alors même que les services publics concernés montrent une grande réticence à se réformer profondément. Surtout si des projets importants de formation pour ces entreprises ne pouvaient plus être financés par la mutualisation.

La confusion entre formation, au sens classique de l'enseignement pour adultes, et compétence reste entretenue par le texte. Ce n'est pas parce qu'une personne a suivi un cours, même excellent, qu'elle est professionnellement compétente et reconnue comme telle dans son entreprise.

Parcours professionnel

La notion de parcours professionnel était l'une des grandes avancées de la période précédente. Elle recèle un potentiel d'innovation dans les démarches d'apprentissage qui est loin d'avoir encore été exploité. Attention donc à ce que le jeu des intérêts des acteurs et la prégnance des modèles pédagogiques dominants ne renforcent pas une sorte de néoscolarisation des parcours. Il ne s'agit pas de nier l'importance de l'acquisition de connaissances et de savoir-faire, mais de prendre conscience que ceux-ci ne se transforment en compétences pour des adultes que par une mise en oeuvre effective. Ce qui suppose des actions sur l'organisation du travail et le management des personnes qui dépassent largement le champ de ce qui est imputable au titre de la formation, et, a fortiori, de l'acquisition d'un diplôme. C'est d'ailleurs sur ce terrain que les Opca les plus dynamiques ont innové de la manière la plus efficace.

Mise à niveau

Il semble bien que le dispositif se tourne prioritairement vers la «mise à niveau» des salariés les moins qualifiés. Il est évident que cela est socialement essentiel, surtout dans la période de crise économique que nous abordons. Mais, l'une des conditions essentielles de la sortie de crise pour nos entreprises réside dans leur capacité à innover, donc à créer et à exploiter des compétences que leurs concurrents n'ont pas encore, et qui, par définition, ne peuvent être trouvées prêtes à l'emploi dans les programmes de formation. Nous sommes à l'évidence en fin de cycle long de développement économique, et les gagnants dans le prochain cycle seront ceux qui auront trouvé des solutions nouvelles solvables aux défis climatiques, technologiques, financiers, énergétiques, qui convergent brutalement, aujourd'hui, dans la crise.

Un dispositif de formation efficace sera celui qui apportera une contribution efficace, aux côtés de la recherche et développement, à ces questions, pas celui qui cherchera à pérenniser un monde qui est derrière nous. Le rapport sur La qualité de l'offre et de l'achat de formation, remis en décembre 2008 au ministère de l'Economie, est, malheureusement, bien silencieux sur cette question. »

(1) Directeur d'Alain Meignant Consultant/Réseau 3U, auteur de Manager la formation, éditions Liaisons, 2006.

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