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Où sont vraiment les volontaires ?

Enquête | publié le : 03.02.2009 |

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Où sont vraiment les volontaires ?

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Natixis, Sanofi-Aventis, Nouvelles Frontières, Caylon, ArcelorMittal... Les plans de départs volontaires ont le vent en poupe. Mais la crise a mis à mal les projets des entreprises. Malgré des aides financières importantes, les volontaires se font plus rares.

Une «annus horribilis» pour l'économie en 2009. Alors que se profile le spectre de la récession, les plans de départs volontaires se multiplient : 1 400 départs chez ArcelorMittal ; 3 550 chez PSA ; 900 chez France-Télévisions ; 500 chez Caylon, la banque d'affaires née de la fusion entre le Crédit Lyonnais et le Crédit agricole... Reste à savoir si les salariés se jetteront sur ces mesures quand nombre d'entreprises réduisent la voilure, gèlent les embauches et annoncent des plans sociaux. De mai à octobre 2008, ces derniers ont déjà été multiplié par deux.

« Le volontariat ne marche pas bien, indique Eric Beaudoin, directeur général d'Oasys, un cabinet spécialisé en ressources humaines. Le contexte actuel rend plus délicate la réussite de ce genre de départs. » « C'est plus dur, aujourd'hui, poursuit Olivier Labarre, directeur général adjoint de BPI. Comme le marché de l'emploi s'est tendu, les principaux volontaires sont ceux qui se trouvent proches de la retraite ou qui ont un projet de création d'entreprise bien défini. »

Les grands moyens

Afin de rendre ces plans populaires, les DRH n'ont pas lésiné sur les moyens. Natixis, par exemple, a provisionné 120 millions d'euros pour pousser vers la sortie 800 salariés employés principalement à la Banque de financement et d'investissement (BFI), qui a enchaîné les difficultés ces derniers mois.

Sanofi-Aventis propose un congé de mobilité de 18, 24 et même 36 mois pour permettre aux salariés, notamment aux visiteurs médicaux touchés par les sureffectifs, de préparer leur projet ou de reprendre leurs études, afin de suivre, par exemple, des études d'infirmier. Adecco (700 salariés), qui prévoit 600 suppressions de poste, compte, de son côté, sur ses propres forces : l'entreprise mettra à disposition des volontaires son réseau d'offres d'emploi interne mais aussi externe, comprenant plusieurs centaines de propositions sur toute la France, accessibles par tous les conseillers spécialisés en recrutement.

Forums emploi

Peugeot Motocycles (1 000 salariés) a, lui aussi, mis les formes : cinq consultants d'Altedia, dont une personne spécialement chargée de la prospection de nouveaux emplois, travaillent à plein temps dans la cellule. Par ailleurs, l'entreprise a initié des forums emploi en invitant les institutionnels locaux, la Maison de l'emploi de Montbéliard ou encore l'Afpa. Des ateliers d'information sur la VAE et la rédaction de CV sont aussi organisés...

Le groupe ArcelorMittal - qui s'est limité à des mesures d'âge en proposant un départ uniquement aux personnes nées en 1950, 1951 et 1952 - a, lui aussi, voulu être attractif : l'entreprise prend en charge le rachat des cotisations retraite allant jusqu'à huit semestres au lieu de six initialement. Quant au départ volontaire avec projet professionnel ou personnel, il est doté d'une indemnité complémentaire dégressive dont le montant a été revu à la hausse. Ainsi, pour un départ le premier mois, le salarié touchera sept mois de salaire, avec un minimum de 17 500 euros ; pour un départ le deuxième et le troisième mois, l'indemnité sera de quatre mois de salaire, avec un minimum de 10 000 euros. Les salariés ont jusqu'au 30 juin pour se porter candidats.

Les DRH veulent tenir leurs promesses

Mesures suffisantes ? Les DRH affirment vouloir tenir leurs promesses. En clair, éviter pour tout candidat partant une inscription aux Assedic. « Nous exigeons un CDD ou une mission d'intérim d'une durée raisonnable, c'est-à-dire d'au moins six mois », rappelle Isabelle Michalak, DRH de Nouvelles Frontières, qui a ouvert, en novembre dernier, un guichet de départs pour 89 salariés de la division tour-operating.

« Par ailleurs, poursuit-elle, nous acceptons tous les projets professionnels nécessitant des formations qualifiantes ou diplômantes. Les salariés ont aussi la possibilité d'ouvrir ou de reprendre une agence Nouvelles Frontières, soit en franchise ou par la location-gérance. » Pour faciliter les transitions professionnelles, l'entreprise compte sur son service RH, qui a développé, depuis l'an passé, un accompagnement à la mobilité externe. L'entreprise a également misé sur un site intranet - «J'y vois plus clair»- pour aider les salariés à prendre leur destin en main. Idem chez Adecco. « Si le projet est flou, le candidat ne peut pas partir, assure Luc Fayet, DRH du groupe. Notre responsabilité est de ne laisser personne au bord du chemin. »

Natixis, par exemple, travaille avec BPI et Sodie pour affiner les projets naissants, analyser la pertinence d'un business plan ou valider l'intérêt de telle ou telle formation. « Chaque projet, création d'entreprise, poste à l'extérieur, formation, est présenté à une commission de suivi composée de représentants de la DRH et de partenaires sociaux, indique une porte-parole de l'entreprise. C'est elle qui valide les projets. » Après examen, 95 dossiers ont été refusés. « Soit ils ne rentraient pas dans le périmètre des départs ciblés, soit ils ont été refusés par la hiérarchie en raison de pertes de compétences que ces départs pouvaient engendrées. »

Maigre bilan

Mais, le bilan est maigre : « On est dans le brouillard », confie Christian Pellet, DRH de Peugeot Motocycles ; 250 postes sont concernés (sur 1 000). Selon le dernier pointage de novembre, 46 volontaires se sont déclarés. Avec la crise de l'automobile, le bassin d'emploi est moribond. Les projets de recrutement, évoqués par PSA Sochaux, à quelques encablures du site de Montbéliard, portant sur 1 200 postes, ont actuellement été gelés. Soit autant de promesses d'embauche qui se sont envolées avec la chute de l'activité.

Espaces conseils

Le plan de départs, lancé par Sanofi-Aventis, en mai dernier, a donné lieu à 1 800 contacts de salariés qui ont sollicité au moins trois entretiens avec BPI, le cabinet chargé de l'accompagnement. Les salariés viennent s'informer dans les «espaces conseils» mis en place dans l'entreprise. Ils ont également la possibilité d'effectuer anonymement un bilan de compétences. La véritable interrogation est, aujourd'hui, de savoir quel sera le taux de conversion de ces entretiens en départs réels. Six mois après le lancement de la phase pratique, Olivier Bruges, DRH de la filiale France, se refuse à tout pronostic. Seule certitude : 250 départs ont été confirmés au 15 janvier alors que l'entreprise compte 2 480 visiteurs médicaux.

Besoin de souplesse

« Les marges de manoeuvre sont étroites », insiste José Allouche, responsable de la chaire de recherche «mutations, anticipations, innovations» de l'IAE de Paris. La crise réduit les possibilités des DRH, qui ont besoin de beaucoup plus de souplesse pour gérer les sureffectifs. Faute de quoi, si le quota n'est pas rempli, nous allons assister au retour des licenciements secs. » De fait, ici et là, la prévision s'avère réaliste. Les plans B se multiplient.

Adecco n'est pas dupe. Spécialiste du marché de l'emploi, il connaît bien les contraintes du moment pour ceux qui doivent rebondir : « Notre stratégie repose sur un plan en deux temps, assure Luc Fayet. La première phase consiste à proposer des départs sur la base du volontariat. Mais il est clair que si nous n'obtenons pas les résultats souhaités, nous serons contraints de passer à la seconde phase, c'est-à-dire à la mise en place d'un PSE avec les mesures classiques de ce type de plan : préretraite dès 55 ans, antenne-emploi... C'est ce plan d'ensemble que nous avons présenté à nos organisations syndicales. »

Sans attendre de miracle sur son plan de départs volontaires, Sanofi-Aventis a également pris les devants en déclenchant, fin décembre, un PSE comptant 927 suppressions de poste (817 postes de visiteur médical et 110 postes au siège). Les premiers licenciements seront prononcés fin mars.

Les limites de la méthode

Chez Natixis, les compteurs seront arrêtés fin février. « On est dans les clous », assure un porte-parole de l'entreprise. D'ores et déjà, selon le dernier baromètre, fin décembre, 503 dossiers de départ ont été validés ; 200 personnes ont déjà quitté la banque. Mais, malgré ces résultats, et sans attendre la fermeture du guichet de départs, le 28 février, la direction de l'entreprise a décidé de stopper net son expansion internationale. Elle a déclenché, fin décembre, un plan d'adaptation des effectifs, entraînant, cette fois, la suppression pure et simple de 450 postes dont une centaine en France. Pas de doute : les départs volontaires ne viendront pas au bout des sureffectifs. La méthode montre déjà ses limites...

L'essentiel

1 Caylon, Renault, PSA, Schering-Plough, ArcelorMittal, Nouvelles Frontières... Les entreprises tentent de gérer leurs sureffectifs en troquant des licenciements subis contre des départs volontaires accompagnés.

2 De nombreuses fonctions sont touchées : administratives, financières, commerciales, RH, et, notamment, les visiteurs médicaux. Dans l'automobile, tout l'organigramme est concerné.

3 Mais les volontaires se font attendre. Les marges de manoeuvre sont étroites.