E & C : Vous avez présenté, le 26 janvier, une étude consacrée à l'impact de la séropositivité et de l'hépatite C sur l'emploi. Quel était son objectif ?

F. B. : Ce travail de recherche, mené pendant deux ans auprès de 60 personnes séropositives (VIH et VHC), visait à mettre en évidence l'articulation entre le travail et la maladie. Il s'inscrit dans le cadre d'une convention ANRS (Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites) sous la direction de Dominique Lhuilier, professeur au Cnam.

E & C : Quelles sont les principales difficultés rencontrées par les personnes séropositives ?

F. B. : Ces personnes subissent généralement une forte précarité professionnelle. Nombreuses sont celles qui ont perdu en employabilité après être restées durablement éloignées de l'emploi. Auprès d'un employeur, elles ont parfois du mal à justifier ces «trous» dans leur CV.

Les contraintes liées à leur maladie limitent également leurs choix professionnels. Certaines, en dépit d'une forte aspiration à la sécurité, ont, ainsi, opté pour l'indépendance. D'autres, en raison de la fragilité de leur santé, savent qu'elles ne pourront accepter qu'un contrat à temps partiel. Pour les personnes en emploi - et qui, dans leur très grande majorité, cachent leur maladie, y compris au médecin du travail -, travailler suppose d'élaborer des stratégies parfois complexes, à la fois pour maintenir le secret et s'adapter, seules, aux conditions de travail existantes, de façon à préserver leur santé.

E & C : Malgré ces fortes contraintes, votre étude met en lumière l'importance de l'activité pour les personnes séropositives.

F. B. : Non seulement travailler permet de se décentrer de la maladie, mais, pour les personnes qui sont restées longtemps éloignées de l'emploi, la reprise d'activité est une source de fierté, à plus forte raison lorsque l'entourage personnel lui-même ignore la cause des arrêts de travail.