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Un deal à 900 millions ?

L'actualité | publié le : 13.01.2009 |

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Un deal à 900 millions ?

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Les partenaires sociaux proposent de ponctionner environ 900 millions d'euros aux Opca pour former 500 000 salariés les moins qualifiés et 200 000 demandeurs d'emploi par an. Mais seulement si l'Etat met la main à la poche de son côté.

Le 7 janvier, les négociations paritaires sur la formation professionnelle (menées par le Medef, la CGPME, l'UPA et les cinq confédérations de salariés) ont abouti à un texte. Les partenaires sociaux ne l'ont pas encore signé, et se donnent jusqu'à la fin du mois pour y réfléchir. Grosso modo, ils proposent un deal au gouvernement. S'en contentera-t-il ?

Pour comprendre ce nouveau texte, il faut garder deux éléments en tête. Premièrement, se rappeler que les partenaires sociaux n'étaient pas demandeurs d'une nouvelle négociation sur le sujet. Pour eux, la réforme de 2003-2004 (augmentation des obligations de financement, création du DIF...) était suffisante ; il fallait la laisser vivre et, au besoin, l'ajuster. Mais une cascade de critiques, plus ou moins justifiées (rapport sénatorial, Cour des comptes...) les ont poussés à s'y mettre, sous forte pression gouvernementale.

Deuxièmement, depuis des mois, le gouvernement répète aux partenaires sociaux qu'ils doivent participer au financement de l'effort de réinsertion des chômeurs, via les Opca. Cet appel aux liquidités des collecteurs de fonds est devenu plus pressant encore avec l'accélération de la crise et les nombreuses nouvelles entrées au chômage.

Dans ces conditions, les partenaires sociaux ne pouvaient pas se permettre une politique de la chaise vide, mais ont abouti à un texte moins «créatif» que celui de 2003.

Financer des actions de requalification

Ces préliminaires posés, lire le texte en l'attaquant par la fin permet de faire rapidement sortir les points saillants.

Premier point important : pour 2009, « à titre transitoire et pour faire face à l'urgence sociale », les partenaires sociaux proposent de financer des actions de requalification pour les salariés et les demandeurs d'emploi en difficulté, à partir des ressources disponibles au Fonds unique de péréquation (FUP). « En tant que de besoin », le taux que doivent reverser les Opca au FUP, actuellement fixé à 5 % de leur collecte professionnalisation, pourrait être fixé à 10 %. Le Comité paritaire national pour la formation professionnelle (CPNFP) se réunira le 21 janvier prochain pour évaluer le montant de cette enveloppe.

Un geste vis-à-vis des attentes gouvernementales

Cette proposition marque un changement d'attitude. Il y a quelques mois, pour éviter de se faire ponctionner sa trésorerie par l'Etat, le FUP, géré par les partenaires sociaux, n'était pas trop pressé de prélever ces 5 % ou 10 %. Aujourd'hui, il se met en situation de faire un geste vis-à-vis des attentes du gouvernement.

Deuxième point important : transformer ledit Fonds unique de péréquation en «Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels» (FPSPP). Ce fonds serait alimenté par une ponction maximale de 13 % de toutes les obligations légales collectées par les Opca et Opacif (plan de formation, professionnalisation, congé individuel de formation). Le taux serait défini, chaque année, par le CPNFP, au plus tard le 31 octobre, pour l'année suivante. Les Opca devraient reverser ces sommes au FPSPP avant le mois de juin de l'année suivante.

Ces fonds serviraient à former des salariés faiblement qualifiés et des demandeurs d'emploi. « L'ambition des partenaires sociaux est de former, chaque année, 500 000 salariés supplémentaires parmi les moins qualifiés et 200 000 demandeurs d'emploi de plus qu'aujourd'hui. Au total, ce sont 900 millions d'euros qui devraient être affectés au fonds à partir de 2010 », assure Jean-François Pilliard, négociateur en chef du Medef. Mais, préviennent les partenaires sociaux, ces moyens doivent faire l'objet d'un cofinancement de l'Etat, et/ou de Pôle emploi, et/ou des régions. « Le financement affecté par les partenaires sociaux à ce fonds de sécurisation dépendra de la contractualisation avec ces partenaires, remarque Jean-François Pilliard. Pour contractualiser, il faut être au moins deux. »

Montant plancher

Cette idée du donnant-donnant plaît-elle au gouvernement et à son administration ? Le 8 janvier, au lendemain de la dernière journée de négociation, Laurent Wauquiez, secrétaire d'Etat chargé de l'Emploi, s'est félicité de cette idée de Fonds de sécurisation, mais a ajouté que l'absence d'un montant plancher pour l'alimenter est « une question qu'il faudra se poser ». Un représentant de son administration a été plus dur : « Nous ne sommes pas contents du texte : nous n'avons pas la main sur la gestion de ces 13 %. » « Et puis quoi encore ?, a commenté un négociateur paritaire. On apporte 900 millions ! Ils auraient voulu qu'on signe une décharge ? S'ils veulent les fonds sans le paritarisme, qu'ils assument politiquement de les préempter ! »

La parole au gouvernement

D'ici à la fin du mois de janvier, les partenaires sociaux et l'Etat diront ce qu'ils pensent définitivement de ce texte. Si le gouvernement le prend comme tel s'en suivra une version législative, avec le problème de l'extension des dispositions aux secteurs «hors champ», c'est-à-dire dont les organisations patronales n'appartiennent ni au Medef, ni à la CGPME, ni à l'UPA (agriculture, professions libérales, économie sociale, presse...).

Autre possibilité : l'Elysée ignore ce texte et impose le sien.

DIF «portable», réforme des catégories du plan...

Hormis les propositions présentées ci-dessus, le texte paritaire du 7 janvier 2009 sur la formation avance d'autres idées, dont :

Rendre «portables» les heures de DIF, via les Opca et les fonds professionnalisation.

Ne retenir que deux catégories dans le plan de formation de l'entreprise. La première, les actions d'adaptation au poste de travail et celles liées à l'évolution ou au maintien dans l'emploi. La seconde, les actions liées au développement des compétences.

Créer un groupe de travail avec l'Etat, avant le 30 juin 2009, sur l'imputabilité des formations, pour simplifier la gestion administrative.

Offrir un suivi social spécifique (logement, santé...) via un «tuteur externe» aux personnes en contrat de professionnalisation les plus éloignées de l'emploi.

Créer un groupe de travail, avant le 31 janvier 2009, sur l'optimisation du DIF et du CIF, avec rendu des conclusions au plus tard le 30 avril 2009.

Instituer un abondement financier des pouvoirs publics correspondant au coût moyen d'une année de formation, pour les personnes ayant achevé leur formation initiale avant le premier cycle de l'enseignement supérieur.

Opca : des préconisations de réforme d'ici à fin mars

Concernant la restructuration des Opca, le projet de texte des partenaires sociaux botte en touche.

Sur la transparence de leurs activités, il propose qu'à partir de critères d'évaluation fixés par le CPNFP, les Opca fassent, chaque année, le bilan financier, qualitatif et quantitatif de leurs activités et qu'ils le transmettent au Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.

Mais, concernant les questions du nombre des Opca et de leurs critères d'agrément, il répète que « la prise en compte du seuil de collecte des Opca n'est pas le seul critère pertinent et que l'agrément des Opca doit être déterminé au regard de leur capacité à exercer le rôle et les missions qui leur sont confiés, ainsi que de mettre en oeuvre des règles de gestion harmonisées. Les éventuels regroupements doivent reposer sur une double logique de proximité professionnelle et de libre adhésion des différentes parties concernées ».

En conséquence, les partenaires sociaux proposent que soit mis en place un groupe de travail paritaire pour émettre des préconisations à cet égard avant le 31 mars 2009 ; et que s'ouvrent des travaux relatifs à la révision du plan comptable des Opca.

Offre et achat de formation

Le 8 janvier, le groupe de travail sur l'offre et l'achat de formation, mis en place en octobre 2008, dans le cadre de la réforme, a rendu son rapport (1) à Laurent Wauquiez, secrétaire d'Etat chargé de l'Emploi. Il préconise « une inscription libre et gratuite des organismes de formation sur un portail-répertoire, préférable à un enregistrement administratif qui n'offre aucune garantie de qualité mais qui peut le laisser croire ».

(1) www.minefe.gouv.fr/directions_services/sircom/emploi/090108rapport_validation_acquis_experience.pdf

VAE : « Une négociation paritaire tous les trois ans »

Le 8 janvier, le groupe de travail sur la VAE, mis en place en septembre 2008 dans le cadre de la réforme de la formation, a présenté son rapport au secrétaire d'Etat chargé de l'Emploi, Laurent Wauquiez. Ce groupe préconise, notamment, de renforcer la coordination territoriale via les conseils régionaux, de renforcer la VAE dans les politiques de branche professionnelle, et d'inscrire les processus VAE dans une démarche qualité.

Laurent Wauquiez a déclaré retenir, d'ores et déjà, trois pistes : faire de la VAE un sujet de négociations pour les partenaires sociaux tous les trois ans, mettre en place un cadre commun pour les CQP, via, par exemple, une doctrine commune aux différentes branches, et instaurer au plus vite une boîte à outils VAE dans chaque agence de Pôle emploi. L. G.

(1) www.minefe.gouv.fr/directions_services/sircom/emploi/090108rapport_qualite_formation.pdf