logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Enquête

Un risque à assurer ?

Enquête | publié le : 13.01.2009 |

Image

Un risque à assurer ?

Crédit photo

Assurer les entreprises contre les conséquences financières liées aux AT/MP est un marché émergent, mais encore marginal.

Est-ce un futur eldorado dans le secteur de l'assurance ? Des assureurs commencent, en effet, à proposer à leurs clients des produits visant à pallier les augmentations de leurs taux de cotisation AT/MP... sans pour autant se précipiter. Deux sociétés, la japonaise Tokio Marine et l'américaine ACE se partagent, pour l'heure, le créneau.

« Le marché n'en est qu'à ses balbutiements, précise Patrice Appéré, consultant au cabinet Lefebvre Assurances. Le produit, très technique, est compliqué à mettre en oeuvre et contraint les assureurs à former des spécialistes des accidents du travail. » Côté entreprises, les volontaires ne se bousculent pas non plus : en France, seules 2 000 à 3 000 sociétés auraient franchi le pas. « C'est peu, en effet, reconnaît Stéphane Baj, directeur de l'activité assurance des personnes chez ACE Europe. Globalement, les services RH s'intéressent encore peu aux risques financiers liés à la santé, sauf à compter en leur sein un responsable rémunération et avantages sociaux. »

La prévention en jeu

Ce sont le plus souvent les fédérations professionnelles qui informent leurs adhérents de l'existence de l'assurance. Les Cram n'en parlent pas car elles ont peur que la prévention diminue. « C'est une erreur, s'insurge Marie-France Greiner, commerciale chez ACE Europe, car notre prime d'assurance tient compte de la prévention existant en entreprise. » Pour cette raison, ACE Europe offre à ses clients, depuis 2007, un diagnostic sécurité sur leur conformité réglementaire. Aujourd'hui, l'assureur, qui a pénétré le marché français le premier, en 1990, réalise 10 % du chiffre d'affaires de sa branche accident des personnes avec son produit «ACE Equilibre». Ses clients appartiennent majoritairement aux secteurs de la santé, du transport, de l'agroalimentaire, de l'automobile ou de la grande distribution.

Risques significatifs

Qu'ils soient infirmiers, kinésithérapeutes, aides-soignants ou médecins, les 200 salariés de Santé-Service Bayonne sont exposés à un risque significatif de troubles musculo-squelettiques, du fait de la manipulation des patients. En 2001, cette société de services à la personne spécialisée dans le soin infirmier à domicile a souscrit une garantie pour ses taux d'incapacité égaux ou supérieurs à 10 % qui engendrent une rente versée par la Sécurité sociale.

« Lors de la souscription de notre contrat, nous avions un taux d'AT/MP de l'ordre de 2 % de la masse salariale, calcule Alain Etchenique, directeur administratif et financier de Santé-Service Bayonne, soit 80 000 euros par an. » La garantie souscrite auprès de ACE Europe lui coûte 10 000 euros par an. Les quatre premières années, elle est inutilisée, Santé-Service n'enregistrant qu'une moyenne de 15 AT/MP bénins par an. Mais, à partir de 2005, une mauvaise série débute : 17 AT/MP, dont trois incapacités permanentes supérieures à 10 % ; en 2005, 26 AT/MP, dont une incapacité permanente, en 2007. « Cette augmentation vient du fait que nos salariés vieillissent, précise Alain Etchenique. Aujourd'hui, 20 % d'entre eux ont plus de 50 ans : ils souffrent de lombalgie, de syndrome du canal carpien. C'est une population qui n'a pas été formée à la prévention des risques et qui a travaillé à l'époque où les lits des malades n'étaient pas adaptés comme aujourd'hui. »

Un surcoût couvert par l'assurance

Le taux de cotisation AT/MP de Santé-Service Bayonne représente, aujourd'hui, 4,2 % de sa masse salariale. « En 2008, le surcoût de notre cotisation s'est élevé à 80 000 euros. Il sera de 100 000 euros en 2009. Sur trois ans, la Sécurité sociale nous a répercuté 220 000 euros de cotisations supplémentaires », calcule Alain Etchenique. Des frais entièrement couverts par l'assurance. « Si ça n'avait pas été le cas, nous aurions vu disparaître nos bénéfices, se félicite-t-il. Il aurait suffi de deux accidents donnant lieu à une rente supplémentaire pour mettre en jeu la survie de la société. »

D'avoir échappé au pire n'empêche pas Santé-Service Bayonne d'investir dans la prévention. Désormais, tous ses salariés sont formés à la manutention. Un effort qui va, à l'avenir, être encouragé par les assureurs : entre 2005 et 2006, les clients d'ACE ont déclaré 126 % de sinistres en plus.