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Le casse-tête des fins de carrière des navigants

Enquête | publié le : 02.12.2008 |

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Le casse-tête des fins de carrière des navigants

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Allonger de cinq ans la carrière de l'ensemble des personnels navigants pour aligner l'âge de cessation d'activité sur les normes internationales ? La décision aurait des conséquences importantes sur l'organisation d'Air France. Mais, de toute manière, la compagnie n'est pas décisionnaire.

Laurent Wauquiez en a fait un symbole : évoquant, en juin dernier, la priorité donnée à l'emploi des seniors, il a annoncé vouloir « faire bouger certains accords, comme ceux d'Air France, où des catégories de personnels sont mises à la retraite d'office à 55 ans ». De quoi rallumer un débat déjà très vif dans les rangs des personnels navigants commerciaux (PNC), dont la carrière doit s'arrêter à 55 ans, et des personnels navigants techniques (PNT, les pilotes), qui ne peuvent plus exercer après 60 ans.

La question des 4 150 pilotes a été tranchée le 17 novembre dernier : ils pourront exercer leur métier jusqu'à 65 ans (lire encadré ci-dessous). Celle des 20 000 PNC reste ouverte.

La décision de repousser l'âge de cessation d'activité des personnels navigants n'est pourtant pas du ressort d'Air France : elle est inscrite dans le Code de l'aviation civile et ne peut être prise que par le Parlement. La compagnie aérienne est, en revanche, responsable de la suite de la carrière des personnels navigants touchés par la limite d'âge.

La taille des appareils joue contre l'emploi

Pour l'heure, faute de leur proposer de nouvelles affectations au sol, elle finit presque systématiquement par les licencier. Et ce n'est pas près de s'arranger : l'augmentation de la taille des appareils réduit le nombre de personnels nécessaires par vol. Et au sol, les agents d'exploitation sont de plus en plus remplacés par des automates.

Les personnels au sol disposaient, d'ailleurs, d'un accord de GPEC qui, dès 2006, comportait un volet seniors prévoyant, notamment, un entretien de seconde partie de carrière, un engagement sur la formation, des indicateurs de mobilité professionnelle par catégories d'âge, des dispositifs de transmission intergénérationnelle... La renégociation d'un nouvel accord de GPEC, couvrant à la fois les personnels au sol et les PNC, devrait débuter dès les premiers jours de 2009, alors qu'une réforme de la Caisse de retraite du personnel navigant de l'aéronautique civile (la CRPN) est prévue pour 2010.

Pénibilité

« Ces deux négociations ne pourront faire l'impasse sur la question de la pénibilité », prévient Gilles Nicoli, secrétaire général de la CFDT Air France. Pour équilibrer le régime de retraite, une négociation avait été engagée pour retarder de deux ans le départ des personnels navigants commerciaux.

« L'amendement portant l'âge de départ des pilotes à 65 ans a mis toute la négociation par terre et radicalisé les positions », soupire un délégué syndical. La preuve : une grève, initialement prévue début novembre, a été reportée - et devrait être encore plus massive - pour début décembre.

Pilotes de ligne : l'âge du capitaine

Les quatre jours de grève, du 14 au 17 novembre, des pilotes d'Air France n'y changeront rien : l'agence européenne pour la sécurité aérienne (EASA) portera prochainement l'âge de cessation d'activité de tous les pilotes européens à 65 ans.

Elle se calera, ainsi, sur les normes internationales... et les 27 Etats membres de l'Union européenne seront tenus d'adopter cette nouvelle norme, sans avoir besoin de la transposer.

«Rester ou partir»

La France a pourtant pris les devants en adoptant, le 17 novembre, le très controversé article 61 bis du Plan de financement de la Sécurité sociale : à compter du 1er janvier 2010, les pilotes pourront, s'ils le souhaitent, continuer à exercer leur métier jusqu'à 65 ans. De quoi satisfaire les tenants de « la liberté de rester ou de partir », notamment la très active association PNT65, inspiratrice de l'amendement déposé au Sénat. Son président ne cesse de dénoncer une situation ubuesque : Air France doit verser des indemnités de licenciement à des pilotes qui partent exercer, jusqu'à leurs 65 ans, leur métier chez des concurrents.

Cette décision soulève pourtant bien des questions. Notamment quant au déroulement de carrière, qui repose sur le seul principe de «séniorité» : la carrière des jeunes pilotes sera forcément ralentie si les aînés prolongent la leur de cinq ans. A fortiori dans une conjoncture tendue pour le transport aérien, qui pourrait voir Air France supprimer 300 postes de pilote (sur 4 150) à moyen terme...

AIR FRANCE (SANS KLM)

• Activité : transport aérien.

• Effectifs : 63 600 salariés, dont 74 % de personnels au sol ; 7 % de personnels navigants techniques, et 19 % de personnels navigants commerciaux.

• Chiffre d'affaires : 24,11 milliards d'euros au 31 mars 2008 (groupe Air France-KLM).