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Derrière la crise financière se profile le malaise social

L'actualité | publié le : 18.11.2008 |

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Derrière la crise financière se profile le malaise social

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Deux enquêtes publiées la semaine dernière constatent un climat social dégradé dans les entreprises. Toutefois, les experts n'anticipent pas de conflits majeurs.

Une crise peut en cacher une autre. Deux études, publiées la semaine dernière, pointent l'existence, si ce n'est d'une crise, du moins d'un malaise social, moins visible mais plus ancien que les crises bancaires et boursières. Selon une enquête Cegos sur le climat et les relations sociales dans les entreprises (1), présentée le 13 novembre, le désenchantement des salariés est grandissant et quantifiable : 63 % des DRH notent « une augmentation de l'absentéisme » ; 53 % témoignent de « dérives comportementales » ; et 51 % constatent une « baisse d'implication dans le travail ».

Double mouvement

La 5e édition du baromètre Liaisons sociales - CSC - Entreprise & Personnel, élaborée au cours du premier semestre 2008, et présentée également le 13 novembre, décèle un double mouvement : une baisse des indicateurs classiques de la conflictualité (grèves, incivilités, litiges aux prud'hommes...), et une progression sensible de l'absentéisme, indice d'un climat social dégradé. A l'occasion de la présentation du baromètre, le DRH de La Poste, Foucault Lestienne, notait, ainsi, une « inquiétude latente par rapport à la charge ou à l'organisation du travail, ainsi qu'une recrudescence des arrêts de travail de courte durée, signe d'un certain désengagement ».

Stratégie de protestation

Pour Thierry Heurteaux, associé au cabinet Pactes Conseil (2), « l'augmentation de l'absentéisme de quelques jours est révélateur d'une stratégie de protestation de la part des salariés : au mieux, il s'agit d'un désengagement ; au pire, d'une manière d'instruire un procès à l'entreprise ». L'enquête Cegos remarque, en outre, que, depuis deux ans, les réclamations individuelles gagnent du terrain sur les réclamations collectives, au point que les premières sont aujourd'hui plus nombreuses que les secondes : elles représentent 59 %, contre 41 % pour les réclamations « majoritairement collectives ».

Précarité et perte de lien social

Les causes du mécontentement des salariés ne datent pas d'hier. « Les salariés sont lassés par la course à la performance, la précarité et la perte de lien social. Leur résistance se caractérise par le désengagement et la montée d'une culture contestataire, y compris chez les cadres », analysent les auteurs du baromètre Liaisons sociales - CSC - Entreprise & Personnel.

Compte tenu de cet arrière-plan, la crise financière actuelle va-t-elle déboucher sur une augmentation des conflits ? « Rien n'est moins sûr : si le chômage remonte, les salariés vont faire le dos rond », note Thierry Heurteaux.

DRH de la Société générale, Anne Marion-Bouchacourt craint, en revanche, que les inévitables réorganisations qu'entraînera la crise dans son sillage n'accentuent encore la pression des managers sur leurs collaborateurs : « Au cours de la période qui s'ouvre, la fonction RH devra veiller à ce que la remise en cause des zones de confort ne génère pas plus de désengagement chez les salariés », recommande-t-elle.

Les directions vont devoir être à l'écoute

La balle est donc dans le camp des directions. « Face à la crise qui monte et qui crée un sentiment inédit de peur chez les salariés, l'attitude du patronat sera fondamentale. » Dixit Jacques Coquerel, Pdg de la Cegos. « Les directions vont devoir écouter vraiment leurs salariés, être exemplaires en matière d'économies, et prendre des engagements forts au prochain retour de croissance », insiste-il.

Problème, les salariés n'ont pas confiance dans le management, voire dans le pilotage général de l'entreprise. Selon la Cegos, seuls 51 % des collaborateurs affirment avoir « confiance en leur manager », et 52 % avoir « confiance dans l'avenir de leur entreprise ». Le pire est atteint concernant les directions générales : pour 69 % des salariés, celles-ci ne sont tout simplement pas « attentives au climat social ».

Echanges

Pour Thierry Heurteaux, le salut des directions passe par un dialogue social de terrain - échanges oraux avec de petits groupes de salariés - axé sur les réalités économiques. La communication écrite ne venant qu'ensuite, pour confirmer ce qui a été dit oralement. Dans un contexte de crise, mieux vaut négocier sur des sujets concrets et bien délimités : « Une direction qui s'occupe des petits problèmes du quotidien montre qu'elle comprend les contraintes des salariés et cherche à les résoudre, même si elle n'y consacre pas de gros moyens », explique-t-il.

(1) Enquête auprès de 166 DRH et de 2 000 salariés d'entreprises de plus de 100 salariés, interrogés en octobre 2008 sur le climat social dans leur entreprise.

(2) Vient de publier Les projets sociaux des entreprises. Impactes 2009, éditions Liaisons, octobre 2008.

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