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Jalousie, quand tu nous tiens...

Enjeux | Chronique de Meryem Le Saget | publié le : 18.11.2008 |

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Jalousie, quand tu nous tiens...

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Elle se manifeste dès la cour de récréation. On pense qu'elle va s'estomper avec l'âge, grâce à l'éducation. Pourtant, il n'en est rien : elle sévit toujours avec vivacité dans nos vies professionnelles. Jalousie, quand tu nous tiens...

Il est vrai que certaines situations prédisposent à la rancoeur. Prenez les systèmes de récompense au mérite, par exemple. Au départ, ces méthodes sont censées motiver l'individu. Mais collectivement, elles augmentent fréquemment la comparaison et la concurrence entre les personnes. Lorsque l'entreprise souhaite marquer encore plus nettement les différences dans la distribution des bonnes et mauvaises notes, le phénomène de jalousie s'exacerbe, accompagné d'inévitables sentiments d'injustice. Il faut beaucoup de transparence et des règles du jeu bien établies pour réussir cet exercice sans créer la zizanie.

La porosité croissante entre catégories est un autre facteur soufflant sur les braises. En cinquante ans, de nombreuses barrières entre les classes sociales, les fonctions, les rôles se sont estompées. Aujourd'hui, tout le monde peut accéder à tout, on aime s'imaginer sans limite, alors que la hiérarchie existe encore bel et bien. Notre langage s'est également banalisé. On a beau se tutoyer, parler de tout et travailler ensemble, le directeur n'est pas le collaborateur ni vice versa. Forcément, devant des différences aussi clairement étalées, et pas toujours justifiées aux yeux des personnes, la comparaison crée des tiraillements. Le mental analyse, soupèse, jauge, critique. Il décèle des inégalités flagrantes. Mais au coeur de la jalousie, il y a surtout la personne elle-même. Rendre le système responsable serait trop facile.

En fait, la jalousie est une grosse flemme. On emprunte la porte de sortie qu'a trouvée la psyché pour éviter de se tourner intérieurement. C'est une manière habile d'échapper à soi-même. La voie de la comparaison nous attire, on s'y engouffre aveuglément sans réaliser que c'est l'école du malheur. Car on trouvera toujours quelqu'un de plus riche, plus veinard, mieux nanti. Au passage, on omet soigneusement de regarder ceux qui disposent de beaucoup moins que soi. Va-t-on rester longtemps campé à sa fenêtre à jalouser le jardin du voisin, au lieu d'apprendre à vivre en paix avec soi-même ? Quand la nature primitive de l'homme ressort dans toute sa splendeur, c'est le moment de nettoyer son regard...

Alors que la comparaison avec autrui est spontanée depuis l'enfance, il faut un travail personnel pour reconnaître qui l'on est et ce que l'on possède. L'excellence et la beauté de son jardin ne dépendent pas de sa taille. Chacun peut accomplir de très belles choses avec ce qui lui est donné. C'est à travers cet effort d'élévation au-dessus du mental primaire, d'«humanisation» volontaire, pourrait-on dire, que la personne se libère de la jalousie.

Meryem Le Saget est conseil en entreprise à Paris. <lesagetconseil@wanadoo.fr>