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Les bonnes pratiques d'Air France transfusées à l'EFS

Les pratiques | publié le : 23.09.2008 |

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Les bonnes pratiques d'Air France transfusées à l'EFS

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En Rhône-Alpes, l'EFS, l'établissement français du sang, a élaboré des formations avec des consultants, pilotes d'Air France, pour souder ses équipes itinérantes.

«J'ai sous ma responsabilité 60 personnes qui ne travaillent jamais toutes ensemble. En quinze ans de métier, je n'ai jamais connu pareille cohésion. » Chrystelle Morand, médecin responsable de la collecte de produits sanguins à l'Etablissement français du sang (EFS) Rhône-Alpes, ne boude pas son plaisir. Pour elle et ses équipes, qui se déplacent dans les villages de l'Isère, dans les entreprises ou à l'université, la révision de l'organisation du travail a été une « bouffée d'air frais ».

Voilà huit ans que les réseaux de collecte de l'EFS ont été nationalisés. En Rhône-Alpes, cinq structures co-existaient sous statut public ou associatif : elles ont été regroupées sous une seule entité régionale de 900 salariés. Près d'un tiers d'entre eux exercent une activité nomade, souvent à temps partiel : chauffeurs de camion, infirmières, secrétaires médicales... Ils sont les interlocuteurs directs des donneurs de sang, une «clientèle» que l'EFS veut fidéliser.

Comme un équipage d'avion de ligne

Fin 2006, la direction décide de professionnaliser ces personnels en osant cette comparaison : une équipe de collecte, c'est un équipage d'avion de ligne. Elle s'est sans doute inspirée de l'avis de son chargé de mission en sciences sociales, Bernard Cunéo, sociologue issu d'Air France. Le DRH de l'EFS Rhône-Alpes, Pierre Bourniquel, programme, en 2007, deux séminaires de formation, animés par des consultants indépendants de Aloa Formair - centre de formation spécialisé dans l'aéronautique - qui sont aussi commandants de bord de la compagnie aérienne.

« Nous avons tout d'abord ciblé les médecins, explique-t-il. Leur mission est aussi exigeante que celle du pilote de ligne : en plus de sa maîtrise technique, il a la responsabilité de son équipage et des personnes embarquées. » Quatre-vingts médecins participent à une session collective. Elle est fondée sur l'écoute d'un pilote, puis complétée par des échanges sur les moyens d'agir. Etienne Fiquet, l'un des deux intervenants commandants de bord, prévient qu'il ne s'agissait pas, pour lui, d'imposer sa recette : « Les médecins avaient besoin d'asseoir leur légitimité, ce qui est une préoccupation pour bon nombre de pilotes. Nous avons été formés pour maîtriser notre appareil et nous découvrons le management en situation de travail. »

Rompre avec un management du «laisser-faire»

Une deuxième action, sur la cohésion d'équipe, est proposée à tout le personnel itinérant, soit 260 salariés qui confrontent leurs pratiques avec celles d'un pilote, d'un chef de cabine et d'une hôtesse de l'air. « Chacun a pu mesurer son rôle dans notre chaîne de transfusion », souligne le DRH. L'analogie avec une profession «d'élite» a permis, du même coup, d'adresser un signal positif de reconnaissance. « Nous sommes arrivés, par ce moyen, à rompre avec un management du «laisser-faire» dans lequel personne ne se sentait obligé visà-vis du responsable de collecte, puisque chacun était réputé connaître son métier », explique le DRH.

Résultat : les salariés ont opté pour la mise en place de briefings et de debriefings systématiques. Ainsi, le médecin annonce les objectifs du jour, vérifie sa check-list de conditions favorables (hygiène, équipements disponibles...) et supervise le protocole d'accueil des donneurs. Le debriefing passe en revue les résultats obtenus et les contraintes rencontrées, celles-ci étant communiquées aux services concernés (analyses, production...) ou aux associations de donneurs. Toutes ces procédures sont consignées dans un guide remis à chaque équipe.

Une meilleure compréhension mutuelle

Sur 2008, l'EFS Rhône-Alpes a vu sa production annuelle progresser de près de 5 %. Le Dr Morand retient surtout « une meilleure compréhension mutuelle du travail de chacun ». « Cette formation n'est qu'une conséquence, dit-elle, de la politique de la direction, qui a multiplié les initiatives pour rapprocher les professions médicales et administratives. »

L'essentiel

1 En Rhône-Alpes, dans l'entité régionale de l'ESF, un tiers des salariés sont nomades : chauffeurs, infirmières, secrétaires médicales... sous la houlette de 80 médecins.

2 Pour une meilleure cohésion, une formation au management a ciblé les médecins, et s'est inspirée du travail d'un commandant de bord d'Air France.

3 Afin de ressouder ses équipes, l'EFS a également fait appel à l'expérience de pilotes de ligne, d'hôtesses ou de chefs de cabine...

EFS RHÔNE-ALPES

Activité : opérateur public de transfusion sanguine.

Effectifs : 900 salariés, dont 50 intérimaires.

Chiffre d'affaires : 74 millions d'euros en 2007.

Une opération unique

Dès 2000, la direction régionale d'EFS s'est heurtée aux clivages culturels entre sites, mais aussi entre les personnels médicaux et administratifs. Plusieurs actions de formation ont été déployées dès 2001 pour y remédier : montage de pièces de théâtre d'entreprise par des équipes interprofessionnelles ; épreuves de rafting pour 60 cadres administratifs et médico-techniques pour éprouver leur cohésion ; formation au montage de films pour autant de volontaires en vue de participer à un festival du court-métrage... Un autre film est en bouclage : il montre comment tous les métiers de l'EFS interviennent dans la prise en charge d'un jeune leucémique. La formation des pilotes de ligne a, quant à elle, été demandée par l'EFS de Bretagne et de Paca. Étienne Fiquet, consultant et commandant de bord, prévient qu'elle restera un « one shot » pour ce seul établissement public.