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Les pratiques

Italie Berlusconi restaure la lettre de démission sans date

Les pratiques | publié le : 23.09.2008 |

La loi du gouvernement Prodi, qui mettait fin à la pratique des lettres de démission non datées entraînant des licenciements abusifs, aura vécu moins de quatre mois. Sylvio Berlusconi, de retour au pouvoir, l'a déjà abolie.

Le 5 mars dernier, un décret mettait fin à une pratique très répandue dans les PME italiennes : l'obligation pour un nouvel embauché, au moment de la signature de son contrat de travail (CDD-CDI ou contrat dit atypique) de signer simultanément une lettre de démission avec date en blanc. Si la loi adoptée par le gouvernement de Romano Prodi remonte à octobre 2007, son application avait nécessité du temps car elle bouleversait radicalement les modalités de résiliation du contrat de travail par démission volontaire.

Surtout des femmes enceintes

Tout travailleur démissionnaire devait dès lors remplir un formulaire, assez complexe, qu'il pouvait soit télécharger en se connectant au site Internet du ministère du Travail, soit retirer auprès des directions provinciales du travail et des centres d'emploi. Ce module comportait un code alphanumérique progressif d'identification afin d'avoir la certitude de la date réelle de démission. Il devait être cosigné par le démissionnaire et son employeur et transmis au ministère du Travail dans un délai de deux semaines, sous peine de nullité.

Fini, donc, les licenciements déguisés ! Une victoire pour des milliers de travailleurs et surtout de travailleuses. En effet, sur les 40 000 cas de licenciement masqué en démission, recensés par les syndicats pour la seule année 2007, la majeure partie concerne des femmes enceintes.

« Elles posent un problème d'organisation et de gestion aux employeurs, surtout dans les entreprises de moins de 15 salariés, explique Livia Ricciardi, du syndicat CISL. Sur le plan économique, une femme enceinte ou un travailleur malade peuvent également représenter une charge supplémentaire. L'allocation du congé de maladie ou de maternité versée par l'Institut national de la prévoyance sociale (l'Inps) représente 80 % du salaire. Mais les conventions collectives prévoient souvent que l'employeur verse les 20 % restants. »

«Formalisme absurde» pour la Confindustria

La «nouvelle loi», saluée par les syndicats, les associations et la presse féminine, a subi les foudres de la Confindustria (équivalent italien du Medef), qui évoquait un «formalisme absurde».

Dès son retour au pouvoir, en avril dernier, la droite berlusconienne, dont un des principaux réservoirs de votes est constitué par les petits patrons, a donc planché sur de nouveaux projets de loi visant à alléger la bureaucratie et à accentuer la flexibilité. De là est né un décret-loi intitulé «Dispositions urgentes pour le développement économique, la simplification, la compétitivité et la stabilisation des finances publiques [...]», converti en loi le 22 août. Mais l'article abolissant l'obligation pour les travailleurs d'utiliser la procédure télématique en cas de démission est entré en vigueur dès sa publication dans la Gazetta Ufficiale, le 25 juin !

Retour en arrière

De nouveau, une simple lettre de démission suffit. Les employeurs du secteur privé ont donc toujours autant intérêt à exercer un chantage à l'emploi lors de la signature d'un contrat d'embauche, pour obtenir cette lettre signée mais non datée. Les recours en justice sont ensuite très rares car il est pratiquement impossible pour l'ex-salarié de prouver qu'il a dû parapher cette lettre au moment de son embauche et non à la date inscrite par la suite.

Pour les syndicats, il s'agit d'un retour en arrière d'autant plus déplorable qu'il n'y a eu aucune concertation entre gouvernement et partenaires sociaux. « Nous étions pourtant ouverts à des modifications, affirme Livia Ricciardi, mais à condition de garantir les droits des travailleurs. »