logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Enquête

Dix minutes pour être convaincu

Enquête | publié le : 09.09.2008 |

Dérivé du speed dating, le speed recruiting, ou recrutement express, a fait son entrée dans l'arsenal des outils de recrutement. Les candidats doivent séduire en quelques minutes. Les entreprises qui ont testé la méthode louent son efficacité.

« Commerciaux, déclarez-nous votre flamme ! » ; « RDV commercial galant pour grande histoire d'amour, rencontrons-nous tout de suite sur un amourdeboite.fr. » Non, ce ne sont pas des annonces du dernier site de rencontres coquines à la mode, mais quelques-uns des messages à coeurs roses déclinés par Konica Minolta pour son opération de speed recruiting, le 14 février dernier, jour de la Saint-Valentin.

100 entretiens

Trois semaines de préparation avec une agence de communication RH ; 250 inscriptions sur le site Internet dédié ; 4 chargés de recrutement et 7 opérationnels pour recevoir les candidats le jour J dans son «show-room» de Courbevoie ; 100 entretiens de recrutement d'une demi-heure chacun : au final, le professionnel des solutions et matériels d'impression a embauché 10 personnes, pour 50 postes de commercial à pourvoir dans l'année.

Gain de temps

« Certes, c'est un investissement, mais on a divisé par deux le temps de recrutement. Avec une méthode classique, il faut un mois et demi pour parvenir à ce résultat. Sans compter les retombées en termes d'image ! », se réjouit Julie Applincourt, responsable du recrutement et de l'évolution professionnelle chez Konica Minolta. La Poste, qui a organisé sa première soirée de job dating à Paris et dans neuf villes de province en avril dernier pour des postes de conseiller financier et conseiller clientèle, confirme : « Nous avons reçu 5 500 CV, soit quatre fois plus de candidatures que via des offres standards dans la presse ou sur les sites Internet emploi », indique-t-on à la DRH. « Sans donner le montant du coût d'une telle opération, nous pouvons dire qu'elle en vaut la peine tant en matière de qualité que de motivation des personnes qui sont venues. »

La Poste, qui a, ainsi, déjà réalisé 100 recrutements, avait fait le choix de trier les CV et de ne convier que 1 300 personnes. GFI Informatique avait aussi présélectionné les 37 personnes qui étaient attendues à sa première soirée «speed recruiting salsa», le 12 juin dernier, dans un café de Nantes. « Nous avons au préalable vérifié l'adéquation entre le profil et les postes proposés, lors d'un entretien téléphonique, pour nous garantir ainsi un taux de transformation maximum », explique Noël Feuteun, responsable RH en charge du recrutement.

Possibilité de convaincre

La stratégie inverse a été retenue chez Konica Minolta. « C'est l'intérêt du speed recruiting, estime Julie Applincourt. On contourne le barrage que peut représenter le CV. Nous donnons à tous les candidats qui pensent avoir le profil la possibilité de nous convaincre, alors que sur CV, nous les aurions peut-être écartés d'emblée. »

Problème d'évaluation

Reste, ensuite, à ne pas se tromper dans le choix des futurs collaborateurs. Les entretiens avec des représentants RH durent en moyenne une dizaine de minutes et sont couplés à des conversations informelles avec des opérationnels. Suffisant pour évaluer un futur salarié ? « En sept minutes, un CV en main, un professionnel du recrutement peut valider de nombreux points », estime Noël Feuteun. Cependant, un deuxième entretien a généralement lieu quelques jours plus tard. Ainsi, La Poste a utilisé sa première soirée de job dating comme « une première prise de contact importante, qui a débouché sur des prises de rendez-vous dans les dix jours, ou sur des sessions de sélection pour les candidats en alternance ». Sur les 800 candidats rencontrés, 520 ont été sélectionnés pour participer au deuxième tour.

Mais le speed recruiting n'est pas conseillé pour tous les métiers, reconnaissent les entreprises. « Cette méthode est particulièrement pertinente pour recruter des commerciaux. C'est le moment pour eux de démontrer qu'ils savent vendre et convaincre. En revanche, je ne le ferais pas sur d'autres populations », estime Julie Applincourt.

Premier tri

« Je ne m'y risquerais pas sur des profils pointus, notamment dans des domaines technologiques », confirme Noël Feuteun. « C'est certainement concevable pour les métiers dont l'essence est de convaincre en quelques minutes. Cela permet de faire un premier tri, guère plus, car on reste en surface du candidat », estime, pour sa part, Manuelle Malot, directrice des carrières et de la prospective à l'Edhec, qui s'exprimait récemment dans une conférence sur les nouvelles méthodes de recrutement. « Pour cette raison, le speed recruiting restera sans doute de l'ordre de l'anecdote. » L'avenir le dira.

Vite embauchés, vite licenciés

Le 13 décembre et le 18 mars derniers, Accenture Technologies Solutions a organisé deux opérations de job dating intitulées «One night, one job», ouvertes à des informaticiens, jeunes diplômés ou expérimentés. Sur 150 candidats inscrits, plus d'une centaine s'étaient vu proposer un poste. Or, avant même d'avoir commencé à travailler, certains de ces salariés ont été virés, a dénoncé la CFDT, début juin.

« Une quarantaine de personnes ont été remerciées pendant leur période d'essai, alors qu'elles étaient dans l'attente d'une affectation sur une mission chez un client. La direction se contente de nous dire qu'il y a eu un bug », relate Carole Coqué, déléguée syndicale CFDT du groupe Accenture. Les personnes recrutées ne correspondaient-elles pas aux attentes de l'entreprise ? La direction ne répond pas. En tout cas, vite embauchées, elles auront été tout aussi rapidement licenciées.

REPÈRES

Les plus La rapidité du processus.

Les moins La difficulté à évaluer un candidat. Ne correspond pas à tous les métiers. Une préparation assez longue.