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Les nouvelles règles du dialogue social

L'actualité | publié le : 15.07.2008 |

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Les nouvelles règles du dialogue social

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L'Assemblée nationale a adopté, le 8 juillet, la loi «portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail». Elle fait des élections professionnelles un rendez-vous majeur pour les syndicats et pour les directions des entreprises.

La présomption irréfragable de représentativité est supprimée. La représentativité d'un syndicat sera désormais fondée sur plusieurs critères, dont l'audience, et n'emportera d'effets qu'au niveau où elle est reconnue.

Représentativité dans l'entreprise

Situation actuelle

Présomption irréfragable de représentativité pour les syndicats affiliés à l'une des cinq confédérations ; représentativité prouvée pour les autres syndicats.

Ce qui change

Représentativité conditionnée au respect des sept critères suivants : respect des valeurs républicaines ; indépendance ; transparence financière ; ancienneté de deux ans ; audience de 10 % au premier tour des dernières élections des titulaires CE ou DP ; influence ; effectifs d'adhérents et cotisations.

Effets de la représentativité

Situation actuelle

Monopole de présentation d'un candidat au premier tour des élections professionnelles ; monopole de constitution d'une section syndicale ; désignation d'un délégué syndical ; monopole de négociation et de signature d'un accord.

Ce qui change

Fin du monopole de présentation d'un candidat au premier tour des élections professionnelles. Fin du monopole de constitution d'une section syndicale. Capacité de négocier et de signer un accord uniquement au niveau où la représentativité a été reconnue.

Compte tenu de l'importance que revêtent maintenant les élections professionnelles, faut-il s'attendre à des contentieux ?

Jean-Emmanuel Ray, professeur à l'université Paris-1*: « Du fait que le dépassement de seuils d'audience (10 %, 30 %, 50 %) déclenche des droits, les risques de contentieux augmentent dès qu'on s'approche de ces seuils. Ainsi, sachant qu'un syndicat disparaît s'il n'atteint pas 10 % d'audience, il faut s'attendre à ce qu'il combatte pied à pied pour se situer au-delà. En tant qu'organisatrices des élections, les entreprises doivent absolument les sécuriser et donc porter une attention particulière à la négociation et à la rédaction du protocole d'accord préélectoral, ainsi qu'aux modalités pratiques de l'élection (isoloir...). »

Les entreprises seront tentées de peser sur la campagne...

J.-E. R. : « Si les entreprises s'affranchissent de leur obligation absolue de neutralité, elles s'exposent à un délit d'entrave. En revanche, elles peuvent expliquer aux salariés les nouveaux enjeux de l'élection professionnelle. »

Elections professionnelles

Situation actuelle

Premier tour réservé aux organisations représentatives.

Ce qui change

Premier tour ouvert :

- aux organisations syndicales qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d'indépendance, constitué depuis au moins deux ans ;

- aux organisations syndicales reconnues représentatives dans l'entreprise ou l'établissement.

Aux syndicats affiliés à une OS représentative aux niveaux national et interprofessionnel.

L'ouverture du premier tour des élections va-t-elle entraîner une inflation de candidatures ?

J.-E. R. : « On peut effectivement le craindre. »

Mesure de l'audiance

Situation actuelle

Décompte des voix obtenues par chaque syndicat au premier tour des élections professionnelles, à condition que le quorum soit atteint.

Ce qui change

Décompte des voix au premier tour des élections professionnelles quel que soit le nombre de votants.

La future loi annule la jurisprudence Adecco. Cette jurisprudence continue-t-elle de s'appliquer aux accords signés avant la promulgation de la loi ?

J.-E. R. : « En principe oui, mais certaines dispositions de la loi étant d'ordre public, elles s'imposeront. »

Implantation syndicale

Situation actuelle

Seuls les syndicats représentatifs peuvent constituer une section syndicale et désigner un DS.

Ce qui change

Peuvent constituer une section syndicale et désigner un représentant de la section syndicale (RSS) :

- les syndicats représentatifs dans l'entreprise ;

- les syndicats affiliés à une OS représentative au niveau national et interprofessionnel ;

- les OS, constituées depuis plus de deux ans, qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d'indépendance.

Peuvent désigner un délégué syndical :

- les OS représentatives dans l'entreprise ou l'établissement.

La fin du monopole de constitution d'une section syndicale, accordé jusqu'alors à un syndicat représentatif, va-t-elle se traduire par l'implantation de nouveaux syndicats dans l'entreprise, comme, par exemple, Sud ?

J.-E. R. : « Des syndicats non représentatifs pourront, en effet, se présenter au premier tour des élections professionnelles, moyennant, toutefois, plusieurs conditions, dont une ancienneté de deux ans. Afin de prendre date, Sud est d'ailleurs actuellement en train de multiplier les dépôts de statuts. »

Délégué syndical

Situation actuelle

Le DS est désigné par un syndicat représentatif ; il dispose du monopole de négociation.

Ce qui change

Le DS est désigné par une organisation syndicale à la triple condition que cette OS soit représentative (voir plus haut), qu'il soit candidat aux élections professionnelles et qu'il y ait recueilli au moins 10 % des suffrages.

Les salariés auront leur mot à dire dans le choix des DS. Cela aura-t-il un impact pour ces derniers ?

J. -E. R. : « Les prochaines élections professionnelles vont sans doute entraîner une réduction massive du nombre de DS, qu'on peut estimer entre 20 % et 30 %. Par ailleurs, on assistera, vraisemblablement, à un passage de relais du DS militant et politisé au DS aguerri sur le plan de la communication. »

Représentant des la section syndiclae (RSS)

Situation actuelle

Le RSS n'existe pas.

Ce qui change

Le RSS dispose des mêmes prérogatives que le DS, à l'exception du pouvoir de négocier des accords.

Son mandat prend fin à l'issue des élections professionnelles suivant sa désignation, dès lors que son syndicat n'est pas reconnu représentatif.

Le RSS qui perd son mandat ne peut être désigné à la même fonction jusqu'aux six mois précédant les élections professionnelles suivantes.

La réduction du nombre de DS va-t-elle se traduire par une inflation de RSS ?

J.-E. R. : « Il y aura sans doute report de l'un à l'autre. Toutefois, ce calcul peut se solder par un échec à l'élection. Le RSS perd alors son mandat et sa protection, avec le risque de perdre aussi son emploi. »

Validité des accords

Situation actuelle

Absence d'opposition de syndicats ayant recueilli la majorité aux dernières élections professionnelles.

Ce qui change

Signature par des syndicats ayant recueilli au moins 30 % des suffrages aux dernières élections professionnelles, et absence d'opposition des organisations majoritaires.

A quelle date les nouvelles règles prennent-elles effet dans l'entreprise ?

J.-E. R. : A compter du 1er janvier 2009.

* Auteur de Droit du travail : droit vivant, éditions Liaisons, 17e édition reprenant la nouvelle loi, septembre 2008.

Temps de travail : ce qui change

- Quelle sera la durée légale ?

Les 35 heures restent la durée légale du travail (1 607 heures par an) et le seuil de déclenchement du calcul des heures supplémentaires. Seuls maxima : 10 heures de travail par jour, 48 heures par semaine, sauf pour les «forfaits», et au moins 11 heures de repos par jour (plus une journée de repos hebdomadaire).

- Accord de branche ou d'entreprise ?

L'article 16 du texte vise à permettre à chaque entreprise de négocier la durée du travail et ses contreparties en dérogeant aux obligations fixées par les branches. Concrètement, l'employeur pourra immédiatement dépasser le contingent d'heures supplémentaires actuel (220 heures par an) sans avoir à demander l'autorisation de l'inspection du travail, sous réserve de ne pas dépasser 48 heures par semaine.

- Que se passe-t-il pour les heures supplémentaires ?

Le paiement des heures supplémentaires continuera de donner droit à une majoration de salaire de 25 %.

Pour les forfaits jours, les journées de travail à partir de la 219e devront être payées en plus du salaire de base et majorées d'au moins 10 %.

- Quel est le plafond pour le forfait jours ?

Comme aujourd'hui, la durée légale pour les forfaits annuels en jours reste à 218. Mais un accord d'entreprise pourra aller au-delà de ce seuil. La seule limite à ces accords, en tenant compte du repos hebdomadaire obligatoire et des congés payés, est de 235 jours (25 jours de congés payés, les week-ends et un jour férié).

« Le mérite de la loi, explique Sylvain Niel, directeur du département RH du cabinet d'avocats Fidal, est d'avoir fixé ce plafond, alors qu'il n'existait pas dans les lois Aubry, ce qui apporte plus de sécurité juridique. »

- Les entreprises doivent-elles renégocier leurs forfaits jours selon la nouvelle loi ?

Non, mais le plafond des 235 jours s'appliquera automatiquement. Toutefois, pour Sylvain Niel, un employeur devra, dès lors, payer la majoration de rémunération pour tout temps supplémentaire travaillé au-delà de 218 jours. Cette majoration ne pouvant être inférieure à 10 %. Pour les nouveaux embauchés, le contrat de travail devra préciser le nombre de jours travaillés mais aussi la majoration des journées travaillées au-delà du plafond.

« Si un jeune ingénieur des fluides négocie à son arrivée dans l'entreprise un taux de majoration de 25 % pour chaque jour travaillé au-delà du seuil de 218 jours, le principe de l'égalité de traitement entre salariés s'appliquera. Ce qui signifie que l'ensemble des ingénieurs de cette spécialité, voire l'ensemble de cette catégorie professionnelle, devra être rémunéré de la même façon, sauf à démontrer des contraintes particulières pour tel ou tel type de fonction. » Et, dans ce cas, un nouvel accord concernant le forfait jours sera nécessaire.

ANNE BARIET

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