Le parasol sous lequel vous allez vous protéger durant l'été a toutes les chances d'être... chinois ou vietnamien, voire indien. Daniel Debladis, président de l'entreprise Sauvagnat Loisirs, installée à Aurillac (Cantal) et qui fabrique des parasols depuis 1962, est un ancien cadre de l'entreprise, qu'il a reprise en son nom propre en mars 2003, après de multiples reventes ; selon lui, l'affaire est pliée : « Le marché baisse. Dans les plus belles années, nous produisions jusqu'à 300 000 pièces annuellement. Ce sera 50 000 cette année, peut-être même 40 000. Les produits venant de Chine, du Vietnam, d'Inde et, globalement, d'Asie nous concurrencent implacablement.»

« Paradoxalement, poursuit-il, ce n'est pas qu'ils soient meilleur marché que les nôtres, ils sont aussi souvent de meilleure qualité ! Ainsi, nos montures en acier sont moins bien adaptées que celles, chinoises, en bois ou en aluminium. Or, les fabrications chinoises incorporent de plus en plus de technologie dans leurs produits, ce ne sont pas seulement des séries bas de gamme : ces entreprises ont de vraies logiques industrielles. En Europe, on n'a pas suivi. » Et, de fait, le dernier fabricant britannique de montures acier pour parasols, Hoyland Fox, a fermé. Reste une usine italienne... « C'était inéluctable, analyse Daniel Debladis. Déjà 95 % du parapluie est chinois. »

A cette puissance de production s'ajoutent des pratiques commerciales neuves : « Les centrales d'achat des grandes enseignes de distribution de ce type de produits ne passent plus par nous, elles vont directement à la source. » Sauvagnat Loisirs arrête donc, ce mois-ci, sa production de parasols. L'entreprise devrait être reprise avec 30 personnes pour fabriquer des parapluies. Entretemps, un plan social concernant 20 personnes a été mis en place. « Nous assumons nos responsabilités, nous payons ce que nous devons, sans rien demander à l'Etat. » L'effectif touché étant surtout composé de salariés de 55 à 60 ans, le chèque de départ est vécu comme une préretraite. En 2005, Sauvagnat Loisirs employait encore 79 personnes pour un chiffre d'affaires de 7,6 millions d'euros.

Mêmes causes et mêmes effets pour l'entreprise Neyrat-Peyronie, située à Allonnes, dans la région de Saumur (Maine-et-Loire).

Mi-juin dernier, les 127 salariés ont eu la nouvelle par fax : l'administrateur judiciaire qui gérait la mise en liquidation judiciaire de leur entreprise leur annonçait que le dernier repreneur en lice ne déposait plus de dossier. L'administrateur judiciaire a demandé au juge-commissaire de déclencher la procédure de licenciements, dès la semaine suivante.

En septembre 2007, le fabricant de parasols et d'articles de plein air était placé en redressement judiciaire. La trésorerie ne suivait plus. Un montage financier, avec la vente des murs, avait permis de trouver 4 millions d'euros pour assurer la saison. Les élus du personnel dénonçaient de mauvaises stratégie et gestion. Fin mai 2008, le tribunal de commerce prononçait la liquidation de l'entreprise, avec poursuite d'activité jusqu'au 30 juin. Le tissu est découpé ailleurs, et certaines productions ont été délocalisées en Pologne.

Créée en 1963, Neyrat-Peyronie, société industrielle d'articles textiles pour le plein air, la maison et l'animalerie, a employé jusqu'à 150 personnes permanentes et réalisé un chiffre d'affaires d'environ 20 millions d'euros. C'était la première entreprise de son bassin d'emploi.

Ironie de l'histoire : Neyrat-Peyronie s'enorgueuillissait d'être « la première société de production de parasols et coussins de plein air à être labellisée Max Havelaar », pour ses modèles fabriqués en 100 % coton équitable. Et sa devise proclamait : « Que la vie est jolie avec Neyrat-Peyronie. »