logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Enquête

Obut, la boule au ventre

Enquête | publié le : 15.07.2008 |

Envolée du prix des matières premières et concurrence chinoise secouent durement la PME forézienne La Boule Obut, marque emblématique de la boule de pétanque.

La Boule Obut aurait sans doute rêvé d'un meilleur trentième anniversaire. L'histoire était pourtant belle. L'entreprise de St-Bonnet-le-Château (Loire), un village du Forez perché à 900 mètres d'altitude, où fut inventée (en 1927) la première boule en acier soudé, s'est taillé au fil de ces trois décades une solide notoriété et une réputation de qualité. Ses boules racées font le bonheur des compétiteurs internationaux et... des boulistes du dimanche.

La PME a aussi mis sur le carreau ses principaux concurrents hexagonaux. Dont JB, à l'origine de la première boule en acier. Et, miracle, l'entreprise a assisté à l'extension de la pratique de la pétanque, longtemps associée aux loisirs de masse, version camping et casquette Ricard.

Obut, qui fabrique 100 % de ses produits sur ses terres foréziennes pour un chiffre d'affaires annuel de 15 millions d'euros, n'a pu profiter de ce qui aurait pu être un état de grâce. Premier coup dur : la hausse des matières premières, en particulier de l'acier, qui, depuis dix ans, a amputé de moitié sa rentabilité. Pour produire, chaque mois, 300 000 unités, l'entreprise en consomme, chaque année, 4 000 tonnes.

Le phénomène s'est aggravé depuis le rachat d'Arcelor par l'indien Mittal. « Depuis cette opération, nous avons subi une hausse de 60 % du prix de l'acier à la tonne. En outre, nous sommes trop petits pour peser dans la négociation commerciale par rapport à des mastodontes comme les constructeurs automobiles », indique Pierre Souvignet, le président de La Boule Obut, qui a la main sur les RH de l'entreprise.

Arrivée de la Chine

Pour ne rien arranger, la concurrence chinoise s'est invitée au pays des tireurs et des pointeurs. Dans la grande distribution, vecteur de ventes crucial pour Obut, les jeux de boules «made in China» se vendent trois à quatre fois moins cher. « Nous ne pouvons pas nous aligner. Nous préférons nous démarquer par la qualité de nos produits, par des innovations, comme le prouve notre nouvelle gamme de boules «tatou», et par des services aux consommateurs », explique Pierre Souvignet.

Pour contrer l'offensive asiatique, la PME a aussi diversifié ses canaux de distribution en lançant ses propres points de vente. Elle en possède quatre : Vallauris, Béziers, Saint-Bonnet-le-Château et Paris.

Situation préoccupante

Pour les 130 salariés, cette conjoncture défavorable s'est traduite par une perte de pouvoir d'achat. Depuis deux ans, ils n'ont reçu ni participation, ni prime d'intéressement. Les augmentations salariales ont été alignées sur l'inflation. « La situation est préoccupante. Si nous n'avions pas eu une population vieillissante (moyenne d'âge de 46 ans, NDLR), nous n'aurions pas échappé au plan social. C'est à la fois notre chance et notre malheur », soulève Dominique Martin, secrétaire du CE.

Départs naturels à la retraite - au rythme de 5 à 6 par an -, mesures d'âge, inaptitude, aides à la reconversion, la direction de La Boule Obut allège chaque année sa masse salariale pour ne pas virer dans le rouge. « Les départs ne sont pas compensés, observe Dominique Martin. Nous recourons à l'intérim lorsque nous sommes en flux tendus à la production. »

Innovation

Délocaliser ? « On ne peut jamais dire jamais, mais, pour l'instant, ce n'est pas dans mes intentions. Nous sommes dans une situation où les effectifs continueront à baisser naturellement, tandis que nous devrons concentrer nos efforts sur l'innovation pour que nos produits soient toujours à la pointe de la technique et de l'esthétisme », martèle Pierre Souvignet. Pour ce faire, la PME s'est rapprochée de plusieurs écoles de design à Lyon et à Grenoble. Boules high- tech foréziennes contre boules de plomb asiatiques, tel est le sens de la prochaine bataille pour Obut.

La boule obut

• Activité : fabrication et vente de boules de pétanque.

• Effectifs : 130 salariés.

• Chiffre d'affaires 2007 : 15 millions d'euros.

L'été à La Boule Obut

A La Boule Obut, la date de la fête des Pères, en juin, est «stabilobossée» dans tous les calendriers. Elle marque le coup d'envoi de la commercialisation des produits et la fin du coup de fouet pour les équipes de production qui ont travaillé d'arrache-pied depuis mars. Au mois d'août, seul l'atelier ferme ses portes.

La période la plus délicate à gérer pour la direction est celle des premiers mois d'automne. Pour pallier le manque d'activité, elle encourage ses collaborateurs à prendre leurs jours de RTT (le temps de travail est de 38 heures hebdomadaires). Une aubaine pour les nombreux salariés amateurs de chasse et de pêche.

« En période creuse, nous demandons également aux salariés volontaires de donner des coups de main dans les autres services. Il m'est arrivé, par exemple, de demander à des employés de l'atelier de faire des travaux de rénovation dans nos boutiques », indique Pierre Souvignet.