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Enquête

Une organisation américaine à l'heure chinoise

Enquête | publié le : 01.07.2008 |

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Une organisation américaine à l'heure chinoise

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L'organisation militante américaine FLA, qui fédère ONG, syndicats et une soixantaine de multinationales, veut aller au-delà de l'application des codes de bonne conduite dans les «sweatshops» asiatiques et s'efforce d'accompagner les fournisseurs.

La Fair Labor Association (FLA) fait sa révolution chinoise. L'organisation américaine avait vu le jour en 1996, sous l'impulsion du président Clinton, avec pour vocation d'améliorer les conditions de travail dans les usines des pays en voie de développement. Ces fournisseurs des géants occidentaux du sportswear avaient une réputation détestable auprès des jeunes étudiants consommateurs, prêts à boycotter les marques établies sur la misère du monde.

L'Asie, nouvelle cible

Si le militantisme américain s'est beaucoup exercé auprès des employeurs d'Amérique latine à la fin des années 1990, les représentants de l'association réalisent, désormais, 75 % de leur travail en Asie, là où se sont concentrées les commandes des donneurs d'ordres. Et Auret Van Heerden, son président, passe deux mois de l'année en Chine.

La FLA fédère des ONG et des syndicats, plus de 200 universités américaines - acheteuses de T-shirts, maillots, pulls, shorts... badgés à leur nom - et une bonne soixantaine d'entreprises internationales, parmi lesquelles Russell Corp, Hanes, Adidas, Puma, Nike, H et M, le fabricant de vêtements Liz Claiborne, les grands magasins Nordstrom, Patagonia, Columbia Sportswear, Calvin Klein... Ces multinationales font vivre un réseau de 4 000 entreprises en tous genres, où oeuvrent un million de petites mains. Tous ces groupes ont transmis à leurs sous-traitants un code de bonne conduite. Et ils se reposent sur la trentaine de permanents de la FLA pour vérifier son application.

Sans préavis, Auret Van Heerden envoie des auditeurs et consultants sur le terrain. « C'est une méthode exigeante, dit-il, car nous travaillons dans la transparence. Les résultats de ces visites sont publiés et les mauvais employeurs risquent d'être épinglés. » Le représentant de FLA exige, en outre, la mise en place de corrections, et revient sur les lieux des délits.

150 usines visitées

L'association visite, ainsi, chaque année, près de 150 usines. Et espère avoir une influence sur les salaires, le paiement des heures supplémentaires, le travail forcé, le travail des enfants, le harcèlement, la discrimination syndicale... « Mais nous traitons les symptômes, pas les causes », reconnaît volontiers Auret Van Heerden.

Au-delà de la seule «compliance», il prône donc la mise en place de ce qu'il appelle FLA 3.0, un outil de troisième génération censé mieux cerner le monde de l'entreprise. Dans ce cadre, les dirigeants des sociétés sous-traitantes évaluent eux-mêmes leur site. Mais ils acceptent que des consultants indépendants s'entretiennent avec les ouvriers. Une enquête récente auprès de 1 700 ouvriers de 18 usines chinoises a, ainsi, révélé que le problème numero un des salariés était la nourriture, devant le salaire, les droits de l'homme ou la liberté syndicale : les OS, souvent originaires de l'intérieur du pays, aiment une cuisine épicée, alors que les directions d'usine installées sur la côte leur proposent des mets plus fades.

Pas d'anticipation

Autre découverte réalisée au fil de ces longues enquêtes : la mauvaise organisation des chaînes de production. « Le fournisseur ne refuse jamais de commandes, explique Auret Van Heerden. Mais il ne sait pas combien de temps cela va prendre, ni combien de machines vont être mobilisées. Et il est souvent victime de coupures d'électricité ou d'inondations. » Pour tenir ses délais de livraison, il multiplie le travail de nuit et de week-end. Dans ce cas, les experts de la FLA lui proposent des formations sur la planification du travail. Ils poussent aussi à la mise en place d'un service minimal de ressources humaines pour gérer salaires, heures supplémentaires et cotisations. En Chine, constate Auret Van Heerden, « les RH n'existent pas ».