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Le droit à l'erreur

Enjeux | Chronique de Meryem Le Saget | publié le : 24.06.2008 |

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Le droit à l'erreur

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Certaines entreprises ne supportent pas l'idée du droit à l'erreur. Leurs dirigeants sont exigeants, en chasse de la moindre faille, et c'est devenu une culture collective. Dans ces sociétés, critiquer se pratique comme une langue courante, encourager les autres reste une langue étrangère. Résultat : personne ne se risque à faire une action qui sort du cadre. Comme on a peur de se faire repérer ou de déplaire, on répète ce que l'on sait faire, avec un certain succès parfois, mais sans génie ; en tout cas, sans enthousiasme ni innovation.

D'autres organisations annoncent qu'elles encouragent vivement l'initiative, mais c'est faux ; dans la réalité, l'erreur commise par une personne la suit partout. On oublie ses succès, on se souvient de ses faux pas, souvent, même, d'une seule erreur. Il n'y a pas vraiment de sanction explicite, mais partout, cette vieille mémoire qui maintient la personne à l'écart ; on hésite, notamment, à lui confier de nouveaux projets. Pour lutter contre ce phénomène, un dirigeant a instauré dans son entreprise cette règle du jeu : « On remonte à cheval dès qu'on fait une chute. » Tout collaborateur ayant commis une erreur importante se trouve immédiatement catapulté dans un nouveau projet exigeant. Le message est clair : pas de rupture de confiance, pas de mise à l'écart, on se remet en selle tout de suite. Bien sûr, cela s'accompagne d'un debriefing pour que la personne apprenne à ne pas refaire la même erreur.

Mais, parfois, le problème n'est pas du côté de l'entreprise. Certaines personnes se brident par peur de rater ce qu'elles pourraient entreprendre. D'autres s'autocensurent en restant sagement au centre du terrain, noyées dans le groupe, pour ne pas s'exposer. Devant toute décision, elles en réfèrent à leur manager et le parapluie fonctionne à fond. C'est plus facile, ensuite, de dire « j'ai appliqué ce qu'on m'a dit ». C'est sûr qu'avec ce principe, difficile de faire un faux pas. Le parapluie prend progressivement la taille d'un parasol, puis d'un parachute.

Certains sont conscients qu'ils s'impliquent peu, même quand leur entreprise soutient la prise de risque et le droit à l'erreur. Leur argument est simple : pas envie de sortir de ses habitudes, pas envie de se casser les pieds avec des idées nouvelles qui produisent du travail en plus... et, sans doute, également, peu d'aisance pour se confronter aux autres, expliquer son projet, motiver, convaincre. Bref, pour rester cool, oublions les initiatives.

Ce qui est rarement évoqué, ce sont les conséquences de ces comportements. Pour l'entreprise, ne pas donner le droit à l'erreur la conduit, à terme, à une performance médiocre, car beaucoup d'apprentissages essentiels aujourd'hui (sur les marchés, les consommateurs, les méthodes de travail, les opportunités d'innovation...) se font à travers l'action et l'exploration et non par des plans savants. Du côté de l'individu, pas d'initiatives signifie peu d'expression de soi, peu de travail en équipe, et donc, peu de développement et faible énergie. Car c'est en se sentant progresser, apprendre avec d'autres, grandir, que l'individu est en phase avec la vie qu'il mène. C'est toute la différence entre rester en permanence confiné chez soi ou sortir se mettre au soleil.

Meryem Le Saget est conseil en entreprise à Paris. <lesagetconseil@wanadoo.fr>