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« Construire les nouvelles fondations du dialogue social »

Enjeux | Plus loin avec | publié le : 24.06.2008 |

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« Construire les nouvelles fondations du dialogue social »

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A la rentrée prochaine, cadres syndicaux et directeurs des relations sociales se retrouveront côte à côte sur les bancs de Paris-Dauphine pour faire l'apprentissage du dialogue social et des nouvelles conditions de la négociation. Une première.

E & C : En novembre prochain, débuteront, à l'université Paris-Dauphine, les premiers cours du master «négociations et relations sociales». Qu'est-ce qui a motivé la création de ce master ?

Gérard Taponat : Nous sommes à un changement de générations sociales. On assiste à plusieurs phénomènes : le départ d'acteurs historiques, l'effacement de repères avec des nouveaux venus qui héritent des pratiques de négociations passées, d'un monde coupé originellement en deux courants de pensée. Notre défi est de construire les nouvelles fondations permettant aux relations sociales de vivre et de s'enrichir, dans le monde d'aujourd'hui. De plus, nous constatons la raréfaction des cadres RH et syndicaux sur ces questions sociales fondamentales, à l'heure où, paradoxalement, tout passe par la concertation et la négociation. Aujourd'hui, les syndicats forment leurs cadres ; les entreprises, les leurs. Nous n'avons aucun lieu neutre, et l'université retrouve, avec ce master, son rôle originel d'acteur de la Cité. Ce voyage dans la négociation, c'est également vivre la diversité et l'interculturalité ! Je rêve de voir, demain, dans l'entreprise, des délégués syndicaux centraux et des DRH, chacun dans leurs positions respectives, qui auraient suivi notre formation. Culturellement, cela apporterait les moyens de se reconnaître et de redéfinir un protocole relationnel contemporain.

E & C : Quelles sont les particularités de cette formation ?

G. T. : Ce cursus présente deux originalités. La première est de vouloir réunir dans une même promotion des cadres syndicaux - délégués syndicaux centraux, secrétaires fédéraux... -, des cadres des ressources humaines - relations sociales -, mais également des fonctionnaires de l'administration du travail. Le projet est de faire travailler ensemble tous ceux qui s'occupent, ou qui prendront la responsabilité, des relations sociales dans les entreprises.

La seconde originalité consiste à diffuser un enseignement réalisé, bien sûr, par des professeurs expérimentés en la matière, mais également par des professionnels de ces questions - DRH, syndicalistes, experts - pour obtenir une formation très concrète et pratique. Dans ce cadre, nous présentons également la dimension internationale des relations sociales, telles qu'elles existent dans d'autres pays d'Europe, en Amérique, au Moyen-Orient ou en Extrême-Orient, pour montrer que le modèle franco-français n'est pas unique, dans le contexte du développement des échanges économiques actuel.

E & C : Quel est son fil conducteur ?

G. T. : On touche à la sociologie du dialogue social, aux modes d'animation et d'organisation des entreprises, aux modes de relations et d'actions. Cela fait appel aux mécanismes internes, aux héritages culturels, ainsi qu'à la prise en compte des perspectives et des défis. Autant de réflexions qui vont nous amener à travailler sur de nouvelles natures d'accords. C'est une manière d'initier une démarche plus qualitative et singulière que quantitative et globale. C'est également faire appel à une méthodologie de partage, d'échange, et non plus seulement d'opposition. C'est une approche pragmatique, qui nous fait travailler au-delà des nécessaires acquis théoriques, sous forme d'ateliers, pour construire des architectures d'accords, issus de problématiques réelles d'entreprise. Nous partons d'un vrai problème et nous utilisons les outils élaborés durant cette formation et les échanges entre participants. Avec, en tête, l'élaboration d'accords pédagogiques, compréhensibles des salariés, qui associent l'économique et le social.

E & C : Que pensez-vous de l'état du dialogue social aujourd'hui dans les entreprises, et qu'espérez-vous y apporter avec cette formation ?

G. T. : Le dialogue social dans les entreprises est, actuellement, et généralement, au seuil minimal des nécessités réglementaires. Il manque de souffle, et cette formation cherche modestement à redonner du sens et de l'élan, à la fois dans la connaissance - et la reconnaissance - des acteurs, mais également dans un mode de réponse aux énormes défis socio-économiques de nos sociétés.

E & C : D'un point de vue pratique, comment s'organise cette formation ?

G. T. : Elle se déroule sur 50 journées, réparties sur dix-huit mois*. Le choix s'est porté sur une formation en alternance afin que chacun poursuive son activité et l'enrichisse des apports de l'enseignement. Le contenu des neuf modules porte sur les principes de la négociation - ses différentes formes, ses acteurs, ses outils, son éthique, l'arbitrage, la conciliation, la gestion des conflits... - ; la théorie des organisations ; les nouveaux terrains et les nouvelles frontières de la négociation collective ; les relations sociales dans la dimension globale et mondiale ; les acteurs dans les échanges de relations sociales ; l'héritage historique et, enfin, la conception, l'architecture et les modes de construction du dialogue social. S'ajoute un ensemble de conférences et de débats constituant un espace de réflexion théorique et d'échanges sur des pratiques.

Les participants devront travailler à l'élaboration d'un mémoire, tutoré par l'équipe pédagogique, et présenté en fin de cursus devant un jury.

* Les inscriptions sont ouvertes depuis le mois de mai. Informations accessibles auprès du département d'éducation permanente : Véronique Furois <furois@dep.deauphine.fr>.

Parcours

Gérard Taponat conjugue ses fonctions de DGRH dans un groupe mutualiste, de consultant RH et d'enseignant dans un statut revendiqué de «DRH militant». Ses sujets d'intervention en entreprise concernent les stratégies, les architectures sociales et la GPEC.

Ses lectures

L'homme compassionnel, Myriam Revault d'Allonnes, Seuil, 2008.

La tentation relativiste ou la démocratie en danger, Jacques Rollet, Desclée de Brouwer, 2007.

Le sens du progrès : une approche historique et philosophique, Pierre-André Taguieff, Champs Flammarion, 2004.

Tout négocier, sous la direction de Henry-Pierre Jeudy, Autrement, 1996.

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