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Le Cesi joue le rôle de «proviseur»

Dossier | publié le : 10.06.2008 |

Depuis dix-huit ans, le groupe de travaux publics Colas confie au Cesi (Centre d'études supérieures industrielles) la coordination opérationnelle de son école de formation interne, le «Campus Colas». Une école sans murs, où la plupart des programmes sont confiés à un partenariat de vingt organismes de formation.

A la fin des années 1980, l'entreprise, qui s'est organisée en filiales régionales, se développe essentiellement par croissance externe et a besoin, pour poursuivre son développement, de s'appuyer sur des équipes compétentes à tous les niveaux, capables de s'adapter à leur environnement local tout en respectant une cohérence d'ensemble.

Colas dispose déjà d'une offre de formation structurée, en grande partie fondée sur des animateurs internes. Mais l'organisation, les métiers et les fonctions, et, avec eux, les besoins en compétences, ont évolué ; les formateurs internes, pour beaucoup des spécialistes maison, sont de moins en moins disponibles, retenus sur le terrain pour assurer le développement de l'activité. « Il a donc été décidé de tout remettre à plat », explique Philippe Morvan, directeur de la formation groupe.

Une étude complète des besoins en compétences a abouti à la définition, pour toutes les populations de l'entreprise, de filières modulaires de formation, comportant, pour chaque métier ou fonction, des programmes relevant de l'initiation, du perfectionnement ou du développement des collaborateurs. Les cahiers des charges de 110 programmes on été rédigés.

La démarche ? Offrir aux filiales composant le groupe Colas (aujourd'hui au nombre de 20 : 7 Colas, 6 Screg, 3 Sacer, Spac, Smac, Somaro, ColasRail) un tronc commun de formations construit autour des métiers et compétences clés de l'entreprise.

Pour dispenser ces formations, il a été décidé que seuls quelques programmes très spécifiques à l'entreprise resteront dispensés en interne. Des appels d'offres on été lancés auprès d'organismes de formation pour couvrir l'ensemble des champs de compétences : techniques, organisation et suivi des chantiers, commercial, études gestion, informatique, etc. A l'issue de cette consultation, 15 prestataires ont été retenus en fonction de leurs domaines d'excellence et ont, ainsi, permis de construire une offre de 110 programmes «sur mesure».

Appel d'offres spécifique

Pour coordonner ces intervenants et les mettre en cohérence, Colas a fait le choix d'un coordinateur externe. Ainsi, parallèlement au choix des organismes, un appel d'offres spécifique a retenu le Cesi pour tenir ce rôle. Une convention a été signée pour deux ans avec ce groupe, le pilotage étant confié à une équipe du Cesi Méditerranée... Cette convention est, depuis lors, régulièrement reconduite.

Enfin, le groupe Colas n'a pas retenu l'idée d'un centre de formation interne fixe, parce que l'activité formation se concentre aux périodes hivernales, du fait de la forte saisonnalité des travaux. Mais aussi parce qu'étant au service des filiales, il souhaitait pouvoir assurer les formations au plus près de celles-ci. Colas Campus se présente donc, concrètement, sous la forme de séminaires résidentiels dans tout l'Hexagone.

Plans annuels de formation

« Le Cesi intervient après que nous avons recensé nos besoins dans le cadre des plans annuels de formation, résume Philippe Morvan. Il a la charge de coordonner la mise en oeuvre de l'ensemble des sessions. Il met en place la programmation des moyens (formateurs et hébergement) et le suivi des réalisations. Il assure le règlement des aléas, notamment logistiques. Il visite les formations pour vérifier l'adéquation d'un lieu de stage, accompagner de nouveaux intervenants, s'assurer du respect des cahiers des charges des programmes... Toutes proportions gardées, c'est un rôle un peu comparable à celui d'un proviseur, tout à la fois en charge d'assurer un fonctionnement optimal des moyens, mais aussi de fédérer les formateurs pour donner à l'ensemble une cohérence, un air de famille. » Les sessions terminées, le Cesi collecte et valide le dossier pédagogique, administratif et comptable du stage : attestations de présence et documents d'évaluation, factures des prestataires, etc. Mais c'est Colas qui, ensuite, effectue les règlements correspondants.

Pour 2008, les inscriptions dans le Campus Colas représentent 6 100 collaborateurs, soit 38 % du volume total des heures réalisées, et sont en progression de 10 % à 12 % par rapport à 2007. Les entités du groupe sont invitées à réaliser 30 % de leurs formations en recourant à celles du tronc commun Colas Campus. Cet objectif a, dès l'origine, été dépassé. Les 62 % de réalisations restantes sont organisées au sein de chaque filiale. Elles concernent la sécurité, les formations individuelles, mais aussi des projets spécifiques à une filiale ou à une agence.

Adaptation tout en souplesse

« Le bilan des dix-huit ans de cette externalisation est un succès. Cette formule, très novatrice, s'est adaptée en souplesse à la croissance du groupe. Aujourd'hui, avec 150 programmes proposés, les 6 000 inscrits en 2008 représentent 485 sessions, dont 75 % sont, d'ores et déjà, réalisées depuis janvier, sans faux pas. »

Côté qualité de l'offre, l'externalisation des formations a permis à Colas de développer un partenariat entre les acteurs internes et externes de la formation, en associant, autour de ses besoins en compétences, le Cesi et les organismes partenaires prestataires à sa démarche qualité : compréhension des publics et de leurs attentes, adaptation aux évolutions de l'entreprise en matière technique, informatique, commerciale, etc., optimisation de la pédagogie, de l'organisation et de la logistique... « Ces échanges permettent d'optimiser non seulement la qualité des programmes, mais aussi de renforcer tous les maillons de la chaîne : stagiaire, encadrement, services formation et formateurs », assure Philippe Morvan. Côté coût de cette externalisation, le Cesi est rémunéré sur la base d'un forfait annuel actualisé selon un indice Syntec, auquel, au fil du temps, a été adjointe une part variable du fait de la croissance importante du nombre de sessions réalisées.

Quant aux organismes de formation, même si Colas n'est pas tenu de leur assurer un carnet de commandes, dans les faits, les formations Colas Campus représentent pour eux un chiffre d'affaires récurrent et non négligeable. Les forfaits d'animation évoluent également chaque année en fonction de l'indice Syntec.

Maîtrise de la définition des besoins

Point fondamental de cette forme d'externalisation, explique Philippe Morvan, elle maintient à l'intérieur du groupe la responsabilité de définir les besoins en compétences, l'ingénierie pédagogique correspondante, le recueil des besoins, « tout ce qui fait partie d'une politique ressources humaines d'ensemble ».

De même, ajoute le responsable formation central, « si l'externalisation répond bien à nos besoins en réalisation des actions de formation, elle ne serait pas adaptée à la gestion financière et fiscale de la formation pour le grand nombre d'entités de tailles diverses qui constituent le groupe. Cette gestion est conservée en interne, sur la base d'un outil informatique de gestion bien adapté, commun à toutes les filiales du groupe ». Le siège comme les filiales assurent donc en direct leurs relations avec l'Opca Bâtiment et l'Opca Travaux publics, et leurs interlocuteurs régionaux des Aref-BTP.

Vincent Cohas Directeur Cesi SAS
« Dix-huit ans d'une histoire singulière »

« La prestation que l'on réalise pour Colas reste, pour nous, une singularité. Leur modèle d'externalisation tient, bien sûr, à l'histoire du groupe, à son organisation et à sa culture. La formation est là pour accompagner une très forte croissance interne et externe, et joue, au niveau d'entités fortes, un rôle fédérateur. Bien des DRH nous ont demandé des explications sur Colas Campus et le mode de fonctionnement avec le Cesi. Il n'y a rien de secret. Pourtant, nous n'avons jamais réussi à nous mettre avec eux dans une configuration équivalente.

D'ailleurs, en l'espèce, le terme d'externalisation au sens de «simple prise en charge à l'extérieur d'une activité» n'est pas le bon. Il s'agit plutôt d'une coproduction, et nous assumons volontiers notre rôle administratif et logistique, car nous sommes étroitement associés à la coordination pédagogique. Nous partageons les mêmes finalités que nos interlocuteurs de Colas Campus. C'est, selon moi, ce qui fait que c'est efficace et que ça tient dans la durée. On s'adapte ensemble aux évolutions du groupe. Pour le Cesi, nous revendiquons cette compétence pédagogique, alors qu'un schéma classique de sous-traitance logistique ne correspond ni à notre métier ni à nos convictions en termes d'efficacité.

Quant à savoir si l'externalisation de la gestion de la formation est un marché d'avenir, c'est probable, dans la mesure où cela s'inscrit bien dans un mouvement général d'externalisation de la production RH. Je suis beaucoup plus réservé en termes de résultats et je pense que la logique d'intégration de compétences par le partenariat qui régit l'approche Colas Campus avec le Cesi est plus fructueuse. »