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Le management de transition à l'âge de raison

Les pratiques | publié le : 20.05.2008 |

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Le management de transition à l'âge de raison

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Autrefois pompier de l'entreprise, le manager de transition est, aujourd'hui, l'accompagnateur des mutations. Une nouvelle approche pour un métier qui se nourrit de l'expérience des seniors.

Hier, le management de transition était irrémédiablement lié à une crise. Restructuration, licenciements massifs, vente d'une entité... Le manager de transition, appelé en renfort, était chargé d'éteindre l'incendie. Aujourd'hui, il intervient dans un climat plus serein. Pour preuve, ces situations tendues ne représentent plus que 20 % du chiffre d'affaires de MCG Managers, un des cabinets pionniers en France, créé il y a dix-huit ans. Fort de vingt-cinq managers, dont les deux tiers sont salariés, il mène entre 20 et 25 missions par an. « Notre métier s'est adapté à des demandes de développement, d'intégration, de mutation, voire de transmission d'entreprise », explique Marc Grivel, son fondateur. Une tendance confirmée par Philippe Soullier, président de Valtus Transition (250 managers de transition) : « Nos missions sont d'accompagner nos clients. Il s'agit, par exemple, de redonner de la performance à une usine, de déployer un ERP, de créer une activité en France pour le compte d'un industriel étranger... »

Partager et transmettre

Mais, au fond, ce métier n'a pas changé. « Il s'agit toujours d'apporter une expertise et une expérience opérationnelle », confirme Françoise Bussy, spécialisée en stratégie et gestion des ressources humaines au sein de l'association Amadeus-Dirigeants, réunissant une cinquantaine de professionnels de haut niveau. « On ne se situe pas à l'extérieur de l'entreprise, mais en son sein, pour partager et transmettre. On apporte une méthodologie et un comportement d'écoute et de confrontation qui fait avancer », ajoute-t-elle. C'est là toute la différence avec le travail temporaire, qui consiste à occuper une fonction. Le manager de transition invente, en quelque sorte, sa fonction au regard du cahier des charges. Avec, en plus, une certaine appétence pour le management. « Il faut à la fois maîtriser sa propre technique et savoir manager », souligne Marc Grivel. En effet, les missions des managers de transition s'intègrent au niveau des directions générales. Finance, ressources humaines, direction industrielle, logistique sont les principales sphères dans lesquelles ils officient. Et ce, quel que soit le profil de l'entreprise - grands groupes, PME ou fonds d'investissement - et la manière dont est structurée la mission. « Après une prise en main de quelques semaines, on doit présenter un plan d'action aux responsables. La mission se déroule ensuite avec des jalons intermédiaires jusqu'à son issue, la présentation des résultats et la transmission du savoir-faire », détaille Philippe Soullier.

Un métier reconnu et accepté

Et, à en croire les spécialistes du secteur, le management de transition est promis à un développement certain. D'abord, parce que le métier est désormais reconnu et accepté. « Les dirigeants se rendent compte, aujourd'hui, qu'ils ne peuvent pas tout savoir, ni tout comprendre, ni tout faire », commente Françoise Bussy. Ensuite, parce que les organisations sont, par nature, rigides. « Les entreprises sont dimensionnées au plus juste, disposant de compétences nécessaires à une activité normale », complète-t-elle.

Or, il existe aujourd'hui, selon Françoise Gri, présidente de Manpower France, beaucoup plus de circonstances qui exigent de l'entreprise une réponse aux sollicitations du marché. Les événements imprévus, nécessitant le renfort d'expertises ponctuelles, sont plus fréquents. Le management de transition apporte donc une certaine flexibilité. Cette entreprise de travail temporaire ne s'y est d'ailleurs pas trompée. Elle projette le lancement pochain d'une activité sur ce créneau pour les cadres supérieurs, baptisée «Manpower Professional».

Le fruit de l'expérience

Enfin, il est souvent moins engageant de faire intervenir quelqu'un de l'extérieur pour gérer et régler une opération délicate.

Les seniors ont donc une carte à jouer. Leur âge est, en effet, un atout puisque le manager de transition se nourrit de son expérience. « On ne peut pas résoudre une situation si on ne l'a pas vécue avant. Ainsi, plus qu'une planche de salut, le management de transition réhabilite les plus de 50 ans », confirme Marc Grivel. Dans son cabinet, la fourchette d'âge oscille entre 46 et 62 ans, pour une moyenne de 54 ans. Chez Valtus, le benjamin a 41 ans, le doyen, 64 ans. « Non seulement notre métier propose un aménagement pour une seconde partie de carrière, mais en plus, il offre aux seniors la possibilité d'apporter leurs compétences sans avoir à subir les pressions de la hiérarchie et de quelconques enjeux de pouvoir, chose dont ils n'ont plus envie », avance son président. C'est un autre rapport au travail. La formule séduit donc les seniors, la plupart licenciés ou mis à la retraite d'office, à un moment de leur vie où les enfants ont grandi et où les investissements financiers personnels ont abouti. La prise de risque est donc à nouveau possible... pour qui est prêt. Car, en effet, tout le monde ne peut pas devenir manager de transition. Certes, ces experts n'ont plus à supporter les conflits d'intérêt internes et ils disposent d'une grande autonomie et d'une certaine liberté de choix. Mais, revers de la médaille, les revenus sont incertains, leur mobilité doit être à toute épreuve et leur disponibilité totale. Le management de transition est également un choix de vie.

« Des missions pour s'enrichir d'expériences »

Alors âgé de 49 ans, Hervé Catta revient en France après avoir passé deux ans à Montréal dans un poste de consultant, un emploi qu'il avait créé de toutes pièces. Cette expérience cumulée à près de vingt ans passés dans les ressources humaines lui fournissait un bagage intéressant qui l'a conduit, tout naturellement, à envisager le management de transition. « La meilleure solution pour ma réinsertion sur le marché français. »

En France et en Suisse

Renseignements pris, il contacte, en septembre 2004, MCG Managers. Un mois plus tard, il débute sa première mission. Depuis, d'autres lui ont été confiées et l'ont conduit un peu partout en France et même en Suisse. « Je viens de finir la mise en oeuvre d'un système de classification et de répertoire des compétences pour une chambre de commerce, tout en gérant une activité ressources humaines classique. » Cette mission a duré huit mois.

Aujourd'hui, et depuis le 2 avril, il est chargé d'accompagner une direction opérationnelle dans la gestion de ses compétences. « Il s'agit d'instaurer une stratégie de ressources humaines liant optimisation des métiers demandés et optimisation des compétences détenues. »

Comprendre tous les enjeux

A chaque fois, il doit faire la preuve de son opérationnalité et de sa compréhension de la stratégie de l'unité dans laquelle il est placé. « Il faut rapidement comprendre tous les enjeux de la mission, entre ce qui est dit et ce qui est sous-entendu, avec, en toile de fond, une opération de changement qui ne dit pas toujours son nom. C'est là la grande différence avec l'intérim, qui consiste à prendre une situation dans l'état. » Et cela lui plaît. Comme il aime à le dire : il veut continuer à découvrir et à comprendre.

Le pouvoir ne l'intéresse pas. Malgré des propositions de CDI, toujours refusées, il souhaite continuer à échanger et à démultiplier ses connaissances du monde du travail : « Je ne sais pas où je serai dans huit mois. Pourtant, une chose est sûre : je me serai enrichi d'une expérience supplémentaire. »

C. L.

L'essentiel

1 Le management de transition ne consiste plus seulement à gérer des crises, mais aussi à accompagner des situations complexes.

2 La mouvance des marchés et la configuration des entreprises sont telles qu'elles promettent à ce métier un bel avenir.

3 Le management de transition ne pourrait exister sans l'expérience des seniors. Il réhabilite, ainsi, ces profils sur le marché du travail.

6 % des managers de transition sont des femmes ;

75 % résident en région parisienne ;

76 % des missions se déroulent dans des grandes entreprises du secteur industriel ;

59 % des missions pallient un manque de ressources internes ;

70 % des missions sont inférieures à douze mois ;

16 % des interventions débouchent sur un emploi fixe.

Source : Valtus Transition