On parle beaucoup du déclin du salariat au profit de la multiplication, d'une part, de relations commerciales (sous-traitance/intérim) et, de l'autre, du chômage. Pourtant, pour Ali Boulayoune et Lionel Jacquot, sociologues, chercheurs au Groupe de recherche sur l'éducation et l'emploi de l'université de Nancy-2, le salariat n'est pas en phase de régression mais d'expansion. Voyageurs de commerce, représentants, courtiers, démarcheurs, qui se considéraient autrefois comme indépendants, ont peu à peu rejoint les rangs du salariat.

En outre, le statut salarial a progressé avec la mondialisation, à telle enseigne qu'aujourd'hui, un travailleur indépendant n'est, dans la majorité des cas, qu'un salarié caché que l'on a privé de garanties légales. Pourtant, dans le même temps, la tendance à l'individualisation des conditions de travail semble avoir pour conséquence l'émiettement des figures du salariat en catégories qui n'arrivent plus à se penser comme solidaires : cadres, précaires, intermittents, CDI, CDD...

Ali Boulayoune et Lionel Jacquot tentent d'appréhender la logique de ce double mouvement. Les auteurs ne prétendent pas que le rapport salarial gardera, à l'avenir, la même importance, mais ils entendent comprendre les mutations qui, en altérant sa forme, le perpétuent, et rappeler que le travail reste, aujourd'hui plus que jamais, une institution dans laquelle s'expriment tous les rapports sociaux.