logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Enquête

Deux ans pour éviter l'accident social

Enquête | publié le : 15.04.2008 |

L'usine bordelaise de Ford FAI cessera de produire en avril 2010. Les syndicats alertaient les pouvoirs publics depuis des années sur la pérennisation de ce site. Des groupes de travail locaux et, depuis peu, un comité national, n'ont plus que deux ans pour limiter la casse.

Le 7 janvier dernier, l'annonce de la fin du site Ford FAI (Ford Aquitaine industrie) n'a guère surpris sur le site de Blanquefort, à quelques kilomètres au nord de Bordeaux. Depuis plus d'un an, les syndicats s'efforcent, en effet, d'alerter sur l'impasse dans laquelle se trouvent les 1 600 salariés de cette usine qui produit des boîtes de vitesses automatiques pour le seul marché américain.

Faiblesse du bilan

C'est lors de la deuxième réunion du groupe de travail sur l'avenir du site, rassemblant les élus locaux et la direction de Ford Europe, que son vice-président, Jim Tetreault, est venu annoncer l'arrêt de la production en avril 2010.

A la sortie de cette réunion, les élus de la communauté urbaine de Bordeaux, de la capitale girondine et de la région devaient aussi constater « la faiblesse du bilan de six mois de travail » sur l'avenir du site. Et ils s'interrogeaient sur « la réelle bonne volonté de Ford d'aboutir à de véritables solutions opérationnelles ». Les syndicats ont choisi, eux, de bloquer les entrées de leur usine pendant douze jours en février, handicapant l'activité de l'autre usine du site, Ford Gertrag, une joint-venture qui produit des boîtes manuelles pour le marché européen, et dont l'activité n'est pas directement menacée. « Nous n'avons aucun détail fournis par la direction sur les démarches de pérennisation du site, de réindustrialisation, de recherche de repreneurs, s'indigne Francis Wilsius, secrétaire (CFTC) du CE et seul syndicaliste membre des groupes de travail. Aucun échange de courrier, aucune mention de contacts avec des décideurs. »

Perte de temps

Les représentants des salariés sont d'autant plus amers qu'ils ont l'impression d'une terrible perte de temps. « Dès 2001, nous avons identifié les premiers signes d'une menace pour le site, se souvient Antoine Martos, aujourd'hui secrétaire adjoint du CE (CGT). Alors que, depuis trente-cinq ans, les évolutions des produits avaient toujours justifié des investissements sur notre site, cette fois, ils n'avaient eu lieu que dans les usines américaines. L'augmentation des prix du pétrole et la pression des normes environnementales ont accéléré le processus. » De fait, Ford, qui a annoncé la suppression de 40 000 emplois dans le monde, et d'une quinzaine d'usines aux Etats-Unis, n'a pas l'oeil sur les salariés de Bordeaux, selon leurs élus. « Ford Etats-Unis, qui est l'investisseur et le client unique de ce site depuis plus de trente ans, demande, aujourd'hui, à Ford Europe de se débrouiller avec Blanquefort », résume Francis Wilsius. Problème : FAI, depuis toujours tourné vers les Etats-Unis, n'a jamais fait partie de la stratégie de développement de Ford Europe.

Gestion opaque

« L'influence des pouvoirs publics locaux est faible sur une entreprise dont 97 % de la production part aux Etats-Unis, reconnaît Vincent Feltesse, maire socialiste de Blanquefort et président de la Communauté urbaine de Bordeaux. En plus, nous avons le sentiment d'une opacité dans la gestion du dossier par Ford. » Les impacts à court terme du désengagement de Ford seront importants pour le bassin d'emploi de Bordeaux, avec un risque sur plusieurs milliers d'emplois indirects et une perte de taxe professionnelle de 9 millions d'euros, également répartie entre 542 communes.

« Ford n'a pas dit que le site serait fermé, réplique la communication du constructeur en France. Hormis la situation du marché américain et la parité euro-dollar, ce site souffre d'un bassin de sous-traitance moins important que celui des usines américaines. Néanmoins, entre aujourd'hui et avril 2010, des contacts directs de Ford, ou d'autres, à l'initiative des autorités françaises, peuvent déboucher sur une solution. » La société a commencé à travailler avec l'agence française des investissements internationaux et mandaté Oneïda, un cabinet spécialisé dans la revitalisation.

Comité de pilotage national

Pour les représentants des salariés, qui ont eux-mêmes identifié des pistes d'avenir pour leur site - éoliennes, voitures électriques, recyclage industriel - et demandent qu'elles soient explorées, les deux ans impartis sont extrêmement courts pour un projet industriel. A tel point que Christine Lagarde, ministre de l'Economie, s'est récemment saisi du dossier en créant un comité de pilotage national, et a obtenu la désignation d'un interlocuteur stratégique de Ford Europe. Un nouveau comité était prévu mi-avril.

Faute de solution globale, le site serait vendu «par appartements», ce qui sauverait peut-être 200 à 300 emplois. Entre le plan social, la convention de revitalisation et la dépollution, Ford devrait dépenser plusieurs centaines de millions d'euros en cas de fermeture.

Ford aquitaine industrie

• Secteur : fabrication de boîtes de vitesses pour le marché américain.

• Effectifs : 1 700 salariés pour FAI ; 2 000 contrats Ford sur le site.

• Chiffre d'affaires 2007 : environ 400 millions d'euros.

TotalPetrochemicals France compense 243 postes par anticipation

Fin 2007, TotalPetrochemicals France a signé avec la préfecture de Lorraine une convention de revitalisation et de développement économique de l'Est mosellan pour compenser la suppression progressive de 243 postes sans licenciement sur la plate-forme pétrochimique de Carling. Conclue en dehors de toute obligation légale, la convention vise à créer 300 emplois directs d'ici à trois ans et 250 emplois à moyen terme, en développant de nouvelles activités industrielles à haute valeur ajoutée à proximité de la plate-forme et en aidant les entreprises locales créatrices d'emploi.

Le chimiste s'engage, par ailleurs, à contribuer à la création de l'Institut supérieur européen de l'entreprise et de ses techniques (Iseetech), qui s'implantera à Saint-Avold l'an prochain.  Les syndicats jugent le montant de cette convention - 8 millions d'euros - bien modique par rapport aux 70 millions d'euros que mobilise le seul démantèlement du vapocraqueur II de Carling. Ils craignent, en outre, un désengagement du chimiste, qui déstabiliserait quelque 5 000 emplois directs et indirects dans l'Est mosellan.

Chef de file du projet Iseetech, le conseil général se réjouit, en revanche, de cette opportunité d'ancrer des activités chimiques de pointe. Il a, ainsi, lancé les appels d'offres d'un scanner de nouvelle génération, d'un coût de 2 millions d'euros, qui servira de support aux actions de formation, de recherche et de prestations pour le compte de PME de la chimie et de la plasturgie.