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La qualité de vie s'invite au travail

Enquête | publié le : 25.03.2008 |

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La qualité de vie s'invite au travail

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Alors que les entreprises ne cessent de diminuer leurs surfaces de travail, certaines cherchent parallèlement à préserver la santé mentale de leurs collaborateurs en leur offrant des aménagements qui répondent aux notions de qualité de vie et de bien-être. Les besoins de la «génération Y» commencent aussi à être intégrés dans les projets d'emménagement. Sans compter la mode du développement durable. Tendances.

Optimisation toute ! C'est plus que jamais le leitmotiv des entreprises qui conduisent des projets de déménagement. Second poste de dépenses après la masse salariale, l'immobilier reste un centre de coûts névralgique surveillé comme le lait sur le feu par les directions financières. Outre le lieu d'implantation du futur site, la rationalisation des espaces de travail reste l'autre vecteur d'économie qui oriente les stratégies immobilières. « Les entreprises ont, comme première demande, le souci de réaliser des économies sur la surface locative. Cela est valable aussi bien à Paris, où la pression tarifaire est très sensible, qu'en province. C'est le premier des paramètres que nous devons prendre en compte chez nos clients », confirme Jacques Simonian, Pdg de Tertiam, une agence spécialisée dans les aménagements d'espaces de travail.

Vers de substantielles économies

Diminution de la surface individuelle du poste de travail, mise à disposition de postes partagés pour les travailleurs nomades (desk sharing), voire développement du télétravail à domicile, comme récemment chez Renault, tous les moyens sont bons pour réaliser de substantielles économies. Un signe qui ne trompe pas : en démarrage de projet, certaines entreprises étudient avec la plus grande minutie le prévisionnel du niveau des absences de leur personnel. Tout y passe : congés annuels, jours de RTT, formation, arrêts maladie, congés maternité... L'enjeu ? Adapter leurs surfaces en conséquence.

Pour celles plus soucieuses de développer la qualité de leur climat social, l'ambiance de travail, la productivité de leurs collaborateurs et leur capacité à travailler en équipe, ce prisme budgétaire comporte toutefois des limites. L'exigence de performance, de flexibilité et de réactivité, la pression induite par les nouvelles technologies, la porosité de la frontière vie privée/vie professionnelle sont autant d'éléments qui concourent à générer des troubles psychosociaux dans les entreprises, que les récents suicides liés au travail ont mis cruellement en lumière.

Sentiment de bien-être

Du coup, les notions de qualité de vie au bureau et de bien-être s'immiscent dans les projets d'aménagement des espaces de travail. Objectif : apporter aux salariés des contreparties au regard des efforts demandés. « Optimiser les espaces de travail et améliorer le confort et le sentiment de bien-être des salariés ne sont pas des notions incompatibles », atteste François Delatouche, directeur immobilier et des services aux collaborateurs de Bouygues Telecom et président de l'Arseg, l'Association des directeurs et responsables de services généraux.

Taille humaine

Si l'open space, qui permet de conserver une flexibilité dans les aménagements futurs tout en favorisant la collaboration des équipes, reste la norme, les agencements sont, désormais, pensés pour préserver la santé mentale des collaborateurs. Exit les espaces partagés démesurés où s'entassaient les salariés dans un vacarme assourdissant ! Les open spaces se veulent à taille humaine. « 20 à 25 salariés maximum pour un ratio d'une personne pour 7 m2 minimum », conseille Philippe Meurice, directeur général du cabinet d'architecture et de conseil DEGW.

Les open spaces sont aussi complétés par des lieux collectifs dédiés au travail en équipe, à la détente ou à la relaxation, et par des isoloirs ou des box privatifs où les salariés peuvent mieux se concentrer ou bien s'adonner à des affaires d'ordre privé. « La prise en compte de la qualité de vie au travail se matérialise par la préservation de zones individuelles et par des éléments de confort. Les entreprises n'hésitent plus à investir dans des sièges ergonomiques », remarque Thierry Coste, directeur marketing de Steelcase.

Niveau sonore en question

Les entreprises soignent également la qualité de l'éclairage et surtout celle de l'acoustique. Le niveau sonore dans les open spaces reste, de loin, selon les enquêtes, l'élément le plus décrié par les salariés. « Un open space ne se résume pas à enlever les cloisons. Cette configuration répond à des règles précises et à des exigences. On doit, ainsi, penser à abriter les salariés. Cela veut dire qu'il faut porter l'effort sur l'acoustique - moquette, plafond - et l'éclairage. Tout cela a un prix, qui doit être compensé par les économies réalisées sur la diminution des surfaces de travail », souligne Philippe Meurice.

Univers domestique

Autre tendance : pour conquérir leurs salariés, les entreprises habillent leurs locaux d'éléments qui rappellent fortement l'univers domestique : couleurs vives, matériaux nobles, canapés dans les couloirs, sans compter, parfois, comme chez Laser (société détenue par les Galeries Lafayette et Cetelem), l'introduction d'oeuvres d'art et de design. Et l'esthétisme ne coûte pas forcément plus cher ! « Les sociétés françaises commencent tout juste à le comprendre. Elles y ont tout intérêt, car, pour rester concurrentielles, elles doivent conserver un potentiel d'attractivité et savoir ensuite conserver leurs meilleurs éléments », observe le directeur général de DEGW. « Cette notion d'attractivité liée à des aménagements concerne, en priorité, des entreprises des secteurs high- tech et de la connaissance. Cela commence à bouger dans la banque et les assurances », avance Thierry Coste.

Métabolisme des métiers

Le «tout open space» a également du plomb dans l'aile. C'est, selon Jérôme Galletti, associé fondateur de la société Projective, la mort du modèle unique. Les aménagements se pensent, désormais, en fonction de l'ADN des collaborateurs. Le métabolisme des métiers est regardé à la loupe. Mieux : certaines entreprises raisonnent, aujourd'hui, en fonction de la typologie de leurs différents groupes culturels. « A mon sens, explique Jérôme Galletti, l'élément nouveau, c'est l'acceptation de la diversité et du multiculturalisme. Concrètement, une entreprise disposera ses équipes RH dans un univers cloisonné, alors qu'elle consacrera un espace partagé pour un service qui accueille des jeunes créatifs. »

Pour son nouveau siège social de Vélizy (78), qui sera livré cet été, Dassault Systèmes a ainsi privilégié un double aménagement : des bureaux cloisonnés de 4 personnes et des «team spaces» pour des équipes dépassant cette taille critique, qui souhaitent se rassembler sur un même espace.

Génération zapping

Les experts l'affirment : les aménagements doivent aussi répondre aux desiderata de la «génération Y» (les moins de 30 ans). L'arrivée de l'univers de la maison au bureau va dans ce sens, tout comme la mode des aménagements durables (lire encadré ci-contre), mais la génération zapping a la bougeotte. Plus question de terrer ces «échos boomers» sur un même poste de travail ! « Les demandes des plus jeunes sont nettement moins codifiées, explique Thierry Coste. Il est nécessaire de leur offrir des parcours dans l'espace de l'entreprise. Il doit être possible de dire à un salarié qu'il peut travailler, lors d'une même journée, dans un bureau individuel, puis dans un endroit dédié à la détente pour, enfin, rallier un espace collectif. »

Accompagnement et prise en compte des besoins

Une chose est certaine, les projets d'aménagement se gagnent sur l'accompagnement et la prise en compte, en amont, des besoins des collaborateurs. C'est la voie suivie par Bouygues Telecom, pour ses futures implantations à Meudon (92), fin 2009, pour son technopole (2 000 salariés), et à Issy-les-Moulineaux (92), pour son nouveau siège social (1 600 salariés), dont l'inauguration est prévue un an plus tard.

« Les IRP, CHSCT en tête, sont des interlocuteurs naturels mais ce ne sont pas les seuls. Pour concevoir un nouveau mobilier, nous organisons des tests auprès des salariés, nous diffusons des questionnaires et des enquêtes. Des idées émergent. Par exemple, dans nos centres de relation clientèle, nous avons, grâce à ces consultations, installé sur les postes de travail des petits crochets pour pendre le casque téléphonique ou le sac à main. Des détails, certes, mais qui simplifient la vie de nos collaborateurs. Ce recueil des besoins est, en tout cas, capital dans la réussite d'un projet », note François Delatouche.

Seul regret : les DRH s'emparent encore trop peu de ces sujets. « Ils devraient pourtant en être les fers de lance », martèle Philippe Meurice. Et Dassault Systèmes, où la DRH groupe, Muriel Pénicaud (partie, depuis, chez Danone), était le sponsor du projet au comité exécutif, fait figure d'exception.

L'essentiel

1 La réduction des espaces de travail reste de mise, mais les entreprises investissent dans des éléments censés améliorer la qualité de vie au bureau.

2 Si l'open space tient toujours la corde, les aménagements prennent davantage en compte les spécificités des métiers.

3 Les besoins de la «génération Y» et le recours aux aménagements durables commencent à intégrer les projets des entreprises.

La fin des réunions interminables ?

- La «réunionnite», le poison qui ronge les entreprises ? Qu'à cela ne tienne, les «space planeurs» ont l'antidote. Le concept est simple, encore fallait-il y penser : c'est l'aménagement de la salle qui va dicter la durée, voire le concept, de la réunion. Une pièce exiguë, des chaises hautes en plastique, de type bar, relativement inconfortables, une petite table ronde montée sur un pied, et la réunion n'excédera pas 30 minutes. Impossible de tenir plus longtemps sous peine de se briser le dos. Très utile, en tout cas, pour un debriefing express.

- La version longue (il existe aussi une configuration intermédiaire) : une salle spacieuse, truffée d'outils de communication high-tech et, surtout, des sièges tout confort. Le «meeting» peut alors aisément excéder les deux heures.

- Reste le modèle «lounge» : chaises longues et tables basses pour la réunion de fin de journée, « très adaptée au brainstorming, selon Jérôme Galletti, de Projective. C'est le début de soirée, on met les pieds sur la table ».

Les bureaux se mettent au vert

- Des bâtiments qui répondent aux normes de la démarche HQE (haute qualité environnementale), des éclairages qui favorisent les économies d'énergie, des systèmes de récupération des eaux de pluie, des mobiliers de bureau marqués du sceau de l'écoconception, des comportements équitables (tri sélectif, diminution de la consommation de papier)... Les entreprises ont pris note de l'avènement du concept de développement durable. « La thématique HQE est devenue systématique pour les grandes entreprises. Les demandes de certification en attestent. Mais le label ne suffit pas. Il faut vérifier les points sur lesquels il porte et, ensuite, déployer une politique pour gérer de manière durable l'exploitation de votre site », prévient Jérôme Duc, Pdg de la société D5X et directeur du projet Campus Dassault Systèmes. D'autant qu'à ce jour, il n'existe pas encore de certification HQE attestant une exploitation durable d'un bâtiment.

- Cette «écolo attitude» bute sur la frilosité de certains propriétaires d'immeubles ainsi que sur la capacité des entreprises elles-mêmes à ouvrir les vannes de leur budget pour des retours sur investissement parfois improbables. « Pour le futur site de Dassault Systèmes à Vélizy (78), nous avons calculé que l'investissement complémentaire pour le système d'éclairage serait rentabilisé en trois à quatre ans. Nous escomptons une économie annuelle d'énergie d'environ 60 % par rapport à un système classique », indique cependant Jérôme Duc.