Louis Schweitzer a profité de la restitution d'un sondage CSA et d'une étude de l'agence de notation sociale Vigeo, le 14 février, pour annoncer que la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde) allait rendre publics, « dans quelques semaines », vraisemblablement mi-mars, les résultats d'un test de discrimination effectué dans des entreprises, dont les noms seront divulgués, que leurs résultats soient bons ou mauvais. Soulignant qu'il présidait une autorité de « lutte », il a estimé que celle-ci ne pouvait se contenter d'un appel aux bonnes volontés.

Le testing consiste à envoyer de fausses candidatures en réponse à de vraies offres d'emploi, et à relever des différences de traitement entre des candidats de référence et des candidats qui ne se distinguent des premiers que par une variable (par exemple l'origine). Lorsqu'une différence est constatée, on peut conclure à une discrimination.

L'opération, menée à l'initiative de la Halde, a concerné 20 entreprises, dont 15 du CAC 40. Selon nos informations, les résultats de ce testing n'auront pas valeur de preuve juridique.

Toutefois, les entreprises au sein desquelles le testing aura permis de constater des discriminations n'en seront pas quittes pour autant. « Au moment de l'examen d'une vraie plainte, de tels résultats plaident contre l'entreprise », déclare Eric Cediey, d'ISM Corum, un cabinet de conseil spécialisé dans la lutte contre les discriminations.

Jean-François Amadieu, directeur de l'Observatoire des discriminations, qui a déjà mené une enquête de ce type auprès de trois entreprises, estime que « dès l'instant que le testing est mené auprès de 20 entreprises, il ne peut que donner des résultats significatifs ». Autrement dit, il y a de fortes chances que ces nouveaux testings fassent effectivement remonter des discriminations.

Louis Schweitzer a effectué cette annonce à l'occasion de la publication de deux études sur les discriminations, peu flatteuses pour les entreprises. La première, effectuée par Vigeo pour le compte de l'OIT, évaluait les stratégies de non-discrimination de 562 grandes entreprises européennes à l'aune de la « pertinence » de leur politique en la matière, de la « cohérence » de leur déploiement, et des résultats obtenus. Ces dernières reçoivent des notes « relativement médiocres », a déclaré Nicole Notat, directrice de Vigeo.

Le sondage CSA, effectué en janvier 2008 auprès de 603 salariés du secteur privé, fait apparaître que 25 % d'entre eux ont été victimes au moins une fois d'une discrimination dans le monde du travail, que 16 % ont quitté leur emploi suite à cette expérience, et que 38 % « n'ont rien dit ». Ils pensent, à 74 %, que la dénonciation anonyme auprès de la direction (whistleblowing) est un dispositif efficace, avant l'incitation des entreprises à s'évaluer, la délivrance d'un label diversité (68 %), et l'obligation du CV anonyme (62 %). Seuls 45 % pensent que les quotas de recrutement seraient efficaces.