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Des DRH plutôt favorables à la détaxation

L'actualité | L'événement | publié le : 05.06.2007 | Emmanuel Franck, céline Lacourcelle

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Des DRH plutôt favorables à la détaxation

Crédit photo Emmanuel Franck, céline Lacourcelle

Alors que le gouvernement met une dernière main à son projet visant à défiscaliser et à décharger les heures supplémentaires, plusieurs DRH se déclarent favorables à la mesure, sans pour autant en attendre une révolution de l'organisation du travail.

En fin de semaine dernière, on ne connaissait pas encore les détails de la proposition gouvernementale de détaxation des heures supplémentaires, mais ses deux grands principes étaient acquis : l'employeur ne paie pas de cotisations sociales sur les heures travaillées au-delà de la durée légale, le salarié ne paie pas d'impôt sur ce revenu supplémentaire. Sur cette base, les DRH contactés par Entreprise & Carrières ont réagi favorablement à la mesure.

Intervenant sur un marché international, Philippe Bouquet-Nadaud, DRH des Chantiers de l'Atlantique, estime que « tout ce qui améliore la compétitivité des entreprises françaises et augmente le pouvoir d'achat des salariés est une bonne chose ».

Thibault Lanxade, Pdg de Gazinox (30 salariés), société spécialisée dans le commerce de gros de produits connectiques pour le gaz, qualifie la proposition gouvernementale de «démarche équilibrée» : « D'un côté, les salariés, via le compte épargne-temps valorisé, comme c'est le cas dans certaines entreprises, vont pouvoir se constituer un capital conséquent. De l'autre, les chefs d'entreprise vont pouvoir inciter leurs salariés à travailler davantage. Tout le monde s'y retrouve. »

Récupération

Chez Conforama (10 000 salariés), le ton est moins enthousiaste, car, contrairement aux deux entreprises précédentes, le distributeur spécialisé a peu recours aux heures supplémentaires. Toutefois, souligne Philippe Achalme, DRH France, « si on nous annonce une défiscalisation des heures supplémentaires, nous ne cracherons pas dans la soupe, mais je pense que cette disposition intéresse davantage les entreprises du BTP ou certaines sociétés de services. » Ces DRH n'envisagent pas que cette mesure du gouvernement révolutionne leur organisation du travail. Jean-Baptiste Labrusse, DRH du laboratoire pharmaceutique Lilly (3 000 salariés en France), explique que les salariés ont actuellement le choix entre récupérer leurs heures supplémentaires sous forme de congés, ou se les faire payer. « Or, les deux tiers des salariés concernés optent pour la récupération. Même si les heures supplémentaires sont défiscalisées, il n'est pas sûr que davantage de salariés décident de se les faire payer. »

Bénéfice qualitatif

De son côté, Philippe Bouquet-Nadaud note que la mesure gouvernementale « ne changera pas significativement l'organisation du travail ». Il y voit tout de même un bénéfice qualitatif. Pour lui, les heures supplémentaires « permettent de prolonger le travail de ceux qui savent faire », plutôt que de recourir à une compétence extérieure moins expérimentée. Mais attention, prévient Pascal Bernard, DRH d'Eaux de Paris, « la question des heures supplémentaires devient délicate dès lors qu'on aborde les métiers pénibles. Elle doit être traitée au cas par cas ».

Enfin, les DRH n'ont pas manqué de réagir à un rapport très critique signé par Patrick Artus, Pierre Cahuc et André Zylberberg, publié la semaine dernière par Les Echos. Les trois économistes soulignaient les risques de fraudes créés par la détaxation des heures supplémentaires, et ses effets incertains sur l'emploi et les revenus.

Travail disponible

Pour Philippe Bouquet-Nadaud, « limiter le nombre d'heures supplémentaires n'augmente pas la quantité de travail disponible ». A contrario, la détaxation des heures supplémentaires serait donc favorable à l'emploi. Ce n'est pas l'avis d'un autre DRH, qui estime que la mesure va « créer un effet d'aubaine pour ceux qui travaillent », et, ainsi, augmenter les écarts entre ceux qui sont dans l'emploi et les autres.

S'agissant des risques de fraude, salariés et employeurs pouvant trouver avantage à déclarer beaucoup d'heures supplémentaires détaxées plutôt que des heures normales, Philippe Bouquet-Nadaud déclare : « Aucune grande entreprise ne peut imaginer cela : elles ne cherchent pas en permanence à contourner la loi ; en outre, leurs organisations syndicales veillent. » Mais la plupart des petites entreprises n'en ont pas.

Les logiciels devront s'adapter

La détaxation des heures supplémentaires va nécessiter de paramétrer les logiciels de paie des entreprises. « Tout sera prêt dans les délais », assure Eddy Corcos, directeur des services clients d'ADP France, prestataire de services paie et RH. Mais les délais ne sont pas encore fixés. Il y a, en fait, deux possibilités. Soit le gouvernement souhaite que les salariés bénéficient des mesures fiscales au titre de leurs revenus de 2007, soit il retarde leur bénéfice d'une année. Dans le premier cas, les éditeurs de logiciels devront être prêts « dès le mois de septembre ou d'octobre », explique Eddy Corcos. Or, la loi n'est même pas encore votée. Pour autant, « la mesure ne sera pas reportée pour des problèmes techniques », assure-t-il.

Dans le second cas, il suffit que les nouveaux paramètres permettant de produire la déclaration automatisée des données sociales unifiée (DADSU), dont se servent les services fiscaux pour préremplir les déclarations d'impôts, parviennent aux éditeurs au début de l'année prochaine.

Auteur

  • Emmanuel Franck, céline Lacourcelle