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Enquête

Un accord pour rapprocher l'encadrement et les syndicats

Enquête | publié le : 29.05.2007 | Laurent Poillot

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Un accord pour rapprocher l'encadrement et les syndicats

Crédit photo Laurent Poillot

Le constructeur de poids lourds a conclu en 2006 un accord de dialogue social qui reconnaît le fait syndical et encourage un traitement local des enjeux sociaux.

Signé en juin 2006 par la direction et par les cinq syndicats représentatifs de l'entreprise, l'accord de dialogue social de Renault Trucks, filiale à 100 % du groupe AB Volvo, remplace un texte vieux de 22 ans. Selon Pascal Montagnon, directeur des politiques d'emploi et des relations sociales, l'accord marque l'avènement d'une « maturité des relations sociales », dans un contexte très éloigné de l'époque où le premier employeur industriel rhônalpin s'appelait Renault VI et totalisait près de 30 000 salariés - soit deux fois plus qu'en 2006 -, avec une population ouvrière nombreuse et globalement moins qualifiée qu'aujourd'hui.

Négociations centralisées

Principaux points forts de l'accord : la reconnaissance du fait syndical et l'aménagement des carrières des délégués syndicaux ; la mise à disposition d'outils modernes de communication et la prise en charge de voyages d'études en Europe pour les représentants du personnel.

Une autre évolution de fond concerne les «négociations décentralisées». L'accord souligne qu'il est dorénavant possible de débattre sur « des thèmes qui, traditionnellement, ne sont pas des domaines de négociation », et que la négociation collective peut, localement, s'ouvrir sur des expérimentations.

Thèmes récurrents

Les thèmes abordés au niveau central restent, classiquement, le dialogue social, les orientations de gestion de l'emploi, l'égalité professionnelle, la retraite et les seniors, la politique salariale, la participation et l'intéressement, les grandes orientations en matière de temps de travail, la protection sociale et la convention d'entreprise. Mais, certains d'entre eux peuvent être ensuite déclinés à l'échelle des établissements et déboucher sur un accord local, à condition d'éviter l'écueil des «multinégociations». Les différents sites peuvent alors s'emparer de l'organisation du temps de travail, de l'emploi-formation des jeunes, de la sécurité et conditions de travail, ou encore du handicap.

Une relation de terrain

Cette approche conforterait à la fois le rôle des syndicats et celui de l'encadrement dans le dialogue social. « Le management de proximité est pour nous essentiel, affirme Pascal Montagnon : la meilleure relation sociale est d'abord celle du terrain. La DRH n'a pas vocation à traiter tous les problèmes rencontrés localement. Nous avons pris le parti de traiter la réalité sociale au niveau de chaque établissement, et de réserver la dimension politique pour le niveau central de l'entreprise. »

Concrètement, il a été prévu de former les managers aux fondamentaux de la GRH et de leur fournir des bases juridiques (contrat de travail, rémunération, prévoyance...) pour leur donner la capacité de renseigner les salariés ou de réagir à une situation chaude en connaissance de cause. Ces mêmes managers sont également sensibilisés aux thèmes de la formation et de la sécurité au travail. En un an, une dizaine de managers ont bénéficié de ces formations, pour une centaine d'heures au total.

Séminaire d'intégration

Il est, par ailleurs, prévu d'inciter l'encadrement et les représentants des salariés à se connaître. Courant juin, un premier séminaire d'intégration sera organisé, une semaine au siège, pour tous les Etam et cadres récemment embauchés. Les organisations syndicales disposeront chacune de 20 minutes pour présenter leur fédération et nouer le contact avec les stagiaires. Au niveau des établissements, les directeurs de site pourront organiser des formations dites «partagées», regroupant des membres des organisations syndicales locales et des managers, sur des sujets économiques et sociaux.

Contrainte supplémentaire

Ces initiatives ne sont pas toutes entrées dans les faits. L'appropriation de l'accord est inégale d'un établissement à l'autre. Bernard Grand, délégué central CGT, estime que l'accord témoigne d'une ouverture d'esprit de la direction centrale. Mais, selon lui, « la hiérarchie de proximité n'en partage pas encore les vues. Beaucoup de managers trouvent ainsi contradictoire d'exercer des responsabilités syndicales tout en menant une activité professionnelle ». Le délégué central CFDT, Jean-Claude Rude, explique ce décalage : « Les managers ont des objectifs élevés de production et de qualité. Pour eux, la gestion des questions sociales est une contrainte supplémentaire. Ils auraient besoin d'être davantage soutenus. Les former n'est pas suffisant, sachant qu'il existe un turn-over important parmi la maîtrise. Nous avons des RH de liaison, par site, mais ce sont trop souvent des personnes jeunes, peu aguerries, alors qu'il faudrait d'authentiques spécialistes. »

Bilan satisfaisant

Le directeur des relations sociales tire, pour sa part, un bilan très satisfaisant. « Nous n'avons pas encore assez de recul pour mesurer tous les effets bénéfiques de notre accord. J'observe pourtant que, depuis 2006, nous sommes parvenus à conclure trois accords unanimes, notamment sur l'intéressement. C'est presque historique. »

Renault trucks

> Effectifs Renault Trucks : 14 000 salariés.

> Effectifs Volvo : 80 000 salariés.

> Implantations : Blainville, Bourg-en-Bresse, Limoges, Vénissieux et Saint-Priest.

> Chiffre d'affaires groupe Volvo : 25 milliards d'euros en 2006.

Auteur

  • Laurent Poillot