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Enquête

Le ciment des communautés

Enquête | publié le : 17.04.2007 | Patricia Sudolski

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Le ciment des communautés

Crédit photo Patricia Sudolski

Chez Schneider Electric, les hommes ont un point d'ancrage : leur communauté de métiers. C'est notamment elle qui les attache à l'entreprise, dans l'environnement en mutation d'un groupe international.

Une communauté chez Schneider est un réseau réunissant les collaborateurs d'une même branche qui ont vocation à s'échanger avis, expériences, documents... sur leur pratique professionnelle, par Internet et lors de rencontres. Les solutions utiles au savoir-faire y circulent. Et, à l'intérieur du réseau, les salariés se soutiennent. Ainsi, il y a un mois, la communauté «power monitoring » a été appelée au secours par un commercial slovène qui devait préparer une communication technique sur les économies de consommation d'énergie. Dans les trois jours, il a reçu dix argumentaires, de tous pays.

La capacité d'innovation, déterminante pour l'entreprise, a trouvé dans ces communautés un second souffle. « On a clairement constaté que l'attachement à l'entreprise se renforçait, détaille Martin Roulleaux Dugage, directeur efficacité commerciale, alors qu'entre 1990 et 2000, années de fusions, on avait observé des pertes de repères, prémisses d'un désengagement. Les communautés ont permis de reconstruire du lien grâce à l'identité du métier à un moment où la marque ne pouvait plus fédérer. Et, aujourd'hui, émerge la «famille Schneider». »

Défi commercial

A l'origine, en 2002, l'idée a été lancée pour répondre à un défi commercial. Il fallait passer d'un système de vente par catalogue à une solution personnalisée. Aujourd'hui, les communautés de métiers sont une cinquantaine, rassemblent 20 à 250 salariés et concernent le management intermédiaire du secteur marketing, achat, recherche et développement. A leur tête, un animateur, choisi dans une population d'ingénieurs, y consacre un jour par semaine. Et si le bon fonctionnement de la communauté est compté parmi ses objectifs, il n'en va pas de même pour les participants, dont la seule bonne volonté motive la participation. « Parce que ce système joue sur la reconnaissance du métier, la valorisation de l'homme, il mobilise, décrit Martin Roulleaux Dugage. Du lien social s'y tisse. »

L'impact a été mesuré au niveau des prises de commandes. Là où les communautés de métiers sont vivantes, elles progressent. « En 2005, par exemple, cite Martin Roulleaux Dugage, la communauté des tableautiers, dont le marché est l'armoire électrique, s'est réunie. A cette occasion, les Autrichiens ont fait une présentation de leur programme de partenariat avec le client. Les Brésiliens ont décidé de l'appliquer chez eux. Neuf mois plus tard, les ventes au Brésil sur ce segment avaient augmenté de 25 %. »

Formule coûteuse

Mais la formule est coûteuse : au bas mot, 100 000 euros par an et par communauté, en rémunération du temps passé, financement des voyages et hébergement d'un logiciel. C'est pourquoi, aujourd'hui, seuls 10 % des salariés sont fédérés en communauté. Mais elles essaiment. Ainsi, la filière technique, qui, en avril 2006, a été soumise au défi de fidéliser ses ingénieurs, enclins à s'orienter trop vite vers le management. Dans le cadre de son projet Edison, appelé à développer la fierté d'appartenance, elle a choisi, entre autres outils, de promouvoir le travail collaboratif. « Dans le hit-parade des attentes des ingénieurs figurait, en tête, la connaissance des attentes du client, détaille Philippe Metayer, directeur projet. Il fallait les aider à voir l'utilité commerciale de leur travail. »

Communautés transmétiers

Des communauté, trans-métiers réunissant collaborateurs à compétences techniques et commerciaux ont été mises sur pied. Pour le moment, elles vivent au travers de séances de proximité clients où le marketing et la technique échangent leurs connaissances. « Cette façon de gérer les hommes au plus près de leur métier et de bonifier les talents, conclut Philippe Metayer, est source d'engagement. »

Schneider Electric

> Secteur d'activité : distribution électrique et automatismes.

> Effectifs : 100 000 salariés, dont 13 000 en France.

> Chiffre d'affaires 2006 : 13,7 milliards d'euros.

Fives-Lille veille sur les «sleeping beauties»

t Chez Fives-Lille, une catégorie de personnel retient toute l'attention des comités de carrière : celle des «sleeping beauties». L'ensemble des salariés a adopté cette dénomination anglaise, plutôt que son pendant francophone de «talent latent». Cette catégorie désigne les salariés qui n'utilisent pas leur potentiel. Elle fait partie d'un dispositif de classement, aux côtés des «professionnels prometteurs», «solides professionnels» et «sous-performeurs». Le tout a d'ailleurs fait l'objet d'un inhabituel accord d'entreprise, signé en décembre 2005, sur l'évaluation des savoir-faire techniques et managériaux.

t Ce travail sur la méthodologie des évaluations et sur la gestion des évolutions de carrière permet de donner une vision plus claire de l'avenir du salarié dans l'entreprise, et accroît la transparence et la confiance nécessaires à l'exercice. « L'identification des salariés en position difficile permet aux comités de carrière de rechercher rapidement des solutions, indique Paule Viallon, la DRH. Avec des plans d'action incluant, par exemple, de la formation au management, un repositionnement de la fonction... permettant le plus souvent d'éviter un glissement de «sleeping beauty» vers «sous-performeur». Et, pour cette dernière catégorie, l'affectation sur un projet spécifique peut fournir une solution. »

t Dans cette société de 5 000 personnes, l'afflux de jeunes recrues a entraîné une réflexion sur les modes de management. « Le fait que les jeunes générations de salariés soient dans une relation contractuelle avec l'entreprise nous a obligés à travailler sur nos pratiques », précise Paule Viallon. L'entreprise, qui veut fidéliser cette population, réalise aussi des bilans d'intégration, six à dix-huit mois après l'embauche, sorte de debriefing de l'intégration, qui analyse aussi les motifs de satisfaction professionnelle. « Cela nous a d'ailleurs rassurés sur notre capacité à offrir des jobs intéressants », confie Paule Viallon.

t Il est vrai que Fives-Lille possède des atouts indéniables : une organisation en entreprise de «taille familiale», mais dans un groupe permettant des mobilités, une activité structurée en projets souvent transversaux, et une culture technique et industrielle sur laquelle il est possible de construire des communautés et une fierté de métier.

Auteur

  • Patricia Sudolski