A l'heure où l'écart ne cesse de s'élargir entre les plus riches et les plus pauvres, au sein même de nos pays développés, l'éthique semble une valeur en hausse dans l'entreprise.

Quel sens lui donner, alors que le décrochage entre l'économique et le social est de plus en plus avéré ?

Il semble que l'éthique soit devenue un enjeu pour les entreprises internationales. Elle est le vecteur par lequel celles-ci tentent de combler le hiatus entre des moyens techniques et économiques, d'une part, les finalités humaines de l'autre. Tout se passe comme si l'éthique revêtait, en fait, un caractère stratégique. Pour continuer d'engranger des bénéfices, il faut mobiliser les salariés. Il faut que ceux-ci continuent ou recommencent à croire qu'ils travaillent non seulement pour leur patron ou pour les actionnaires mais aussi pour eux et, plus généralement, pour le bien-être des gens. Cette finalisation humaine de l'activité des firmes est la base de nouvelles formes de coordination du travail et de la production.

Les grands groupes internationaux tentent de promouvoir des repères pour les salariés travaillant aussi bien dans les maisons mères que dans les filiales. L'internationalisation de l'éthique des entreprises se présente alors comme un discours à vocation universelle.

Pour comprendre la morale à l'oeuvre dans le monde des affaires, l'auteure tente de dégager la réalité des pratiques des discours idéologiques, dans un contexte où la demande de sens est notoire.

t Philosophe et sociologue de formation, Anne Salmon est maître de conférences à l'université de Caen.