L'entreprise a beau généraliser l'individualisation des rémunérations et des carrières, elle n'est pas une simple collection d'individualités mais bien une totalité qui doit faire travailler ensemble ces individus. Vingt ans d'économie libérale dans un contexte de concurrence généralisée tendent à occulter cette dimension fondamentale du collectif sans laquelle il n'est pas de réussite économique possible, parce qu'elle est une condition du sens du travail dont ni les individus ni l'entreprise ne peuvent se passer. Florence Osty et Marc Uhalde, sociologues, chercheurs au Laboratoire interdisciplinaire pour la sociologie économique (Lise CnamCNRS), posent donc la question du renouvellement de la compréhension des bases sociales de la performance collective.

Selon les auteurs, cinq grands modèles principaux de fonctionnement peuvent être distingués. Le premier n'est, en fait, qu'un dépoussiérage de l'entreprise bureaucratique traditionnelle. Le second est le modèle communautaire fondé sur la compétence et les valeurs du métier.

L'entreprise en crise, qui n'arrive pas à assurer le passage des valeurs traditionnelles à celles de la modernité, est d'une telle banalité en ces temps de mutation qu'elle est constituée en catégorie à part entière par les deux auteurs.

L'entreprise modernisée offre une image plus intégrée et motivante des mutations économiques en cours, tandis que l'entreprise duale, qui présente un double principe d'organisation, à la fois moderne et ancien selon les catégories de travailleurs, constitue le dernier modèle retenu par les sociologues. Un ouvrage qui a le mérite de décaper le discours idéologique sur la compétence individuelle.