E & C : L'INRS a organisé, les 15 et 16 mars, un colloque intitulé «Pour en finir avec le cancer de la vessie en milieu professionnel». Cette pathologie est-elle si répandue ?

M. H. : Il s'agit, après le cancer du poumon, de la deuxième cause de cancer d'origine professionnelle en France. Selon une étude de l'Institut de veille sanitaire, il y a, chaque année, entre 600 et 1 100 nouveaux cas de cancer de la vessie liés au travail. En outre, d'après une estimation de l'OMS, les facteurs professionnels sont la deuxième cause de ce type de cancer derrière le tabac. Grosso modo, nous estimons qu'entre 10 % et 15 % des cancers de la vessie sont d'origine professionnelle. Les familles d'agents les plus incriminées sont les amines aromatiques, les hydrocarbures aromatiques polycycliques et les solvants chlorés.

E & C : Où en est la prévention ?

M. H. : Des efforts importants en matière d'interdiction et de restriction ont été accomplis dans les années 1980 et 1990, notamment concernant les amines aromatiques. Par ailleurs, nous avons assisté à des évolutions favorables dans les procédés industriels. Par exemple, l'avènement de la pétrochimie a permis de réduire l'utilisation des brais de houille. Cela dit, des activités sont à la traîne. Il y a aussi des secteurs, comme la pharmacie, où règne une certaine opacité sur l'utilisation des substances. Par ailleurs, la substitution est encore insuffisante.

Ce cancer doit aussi être mieux connu des médecins du travail et des urologues qui en ignorent les origines professionnelles. Le dépistage est pourtant fondamental dans la guérison de cette maladie. L'un des objectifs de ce colloque était justement de mobiliser encore davantage pour porter nos efforts sur ces poches de résistance de manière à éradiquer ce cancer en milieu de travail.