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Les Pratiques

Les licenciés restent mobilisés

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 27.02.2007 | M. R.

Quatre ans après la liquidation de la fonderie de Noyelles-Godault dans le Pas-de-Calais, les licenciés sont toujours en attente d'une reconnaissance des préjudices subis et de leur exposition aux produits cancérogènes.

«Sur les 830 licenciés de Metaleurop Nord, nous comptons encore 130 demandeurs d'emploi et 109 personnes en situation précaire. » Un bilan « contrasté », pour Albert Lebleu, secrétaire de la très dynamique association Choeurs de fondeurs, créée dès la liquidation et la fermeture de la fonderie de Noyelles-Godault (Pas-de-Calais), début 2003. D'autant plus que, parmi les « 414 solutions stabilisées », 299 salariés en CDI et 22 créateurs d'entreprise côtoient retraités et chômeurs dispensés de recherche d'emploi. S'ajoutent ceux partis directement en préretraite FNE, d'autres en invalidité ou décédés et ceux dont on ne connaît pas le sort.

Mais Albert Lebleu se félicite de la forte solidarité et de l'efficace coordination entre tous les acteurs après l'abandon brutal du site par Metaleurop SA, dont l'actionnaire principal est la multinationale suisse Glencore.

Accompagnement social à caractère exceptionnel

Mobilisation et médiatisation avaient favorisé un plan d'accompagnement social « à caractère exceptionnel et dérogatoire » dans ce bassin minier sinistré. L'Etat a versé 38 millions d'euros pour l'antenne emploi, pour 637 congés de conversion et 132 préretraites. Sans compter une avance de 15 000 euros à chaque ex-salarié. C'est notamment pourquoi ces derniers sont particulièrement intéressés par les résultats des procédures judiciaires en cours (lire encadré). Quant à la Conférence des financeurs, réunissant Etat, région, Assedic, ANPE, Afpa, et Opca de la métallurgie, elle a permis 300 formations.

Contexte difficile pour l'antenne emploi

Philippe Dingeon, directeur du travail du Pas-de-Calais, estime que l'antenne emploi « a fait du bon travail dans un contexte difficile ». Mais la jeunesse des intervenants des cabinets Altedia et Raymond Poulain Consultants, ainsi que l'absence d'homogénéité dans les ateliers de recherche d'emploi ont été critiquées. Christian Rodziewicz, de la commission emploi de Choeurs de fondeurs, s'étonne aussi de « dossiers de 50 à 60 pages à remplir » remis à des licenciés « traumatisés ». Bernadette Szlapka, responsable de cette commission, se félicite, pour sa part, des 25 parcours de VAE : « Plusieurs salariés de niveaux CAP ou BEPC ont décroché des BTS maintenance. » D'autres se sont reconvertis dans le médico-social. Certains, déjà qualifiés, ont quitté la région. « Sur place, dénonce un ancien métallo, on crée des emplois basiques, de caristes ou de magasiniers sans technicité... Ce n'est pas de la revitalisation. »

Pourtant, c'est bien la revitalisation du secteur, avec la création de 1 000 emplois, qu'ambitionne le contrat de site (44 millions d'euros) lancé dès 2003 ; 828 emplois ont déjà été créés. D'autres sont prévus, notamment 200 par la reconversion de l'ex-fonderie. Il a fallu nettoyer le site de l'usine, classée Seveso 2, et raser les bâtiments. Les travaux (40 millions d'euros), confiés à Sita, filiale de Suez, ont fourni quelques emplois aux ex-Metaleurop.

Puis, 2006 a vu l'arrivée sur le site des premières sociétés de la future Ecopole, centrée sur les activités de collecte et traitement de déchets. Notamment la Scop ACE (Activ coeur environnement) créée par sept ex-Metaleurop. « Les déchets, c'est notre nouvelle mine », assure Albert Lebleu. Mais il craint de voir les emplois échapper aux licenciés encore sur le carreau.

Un autre sujet contrarie le secrétaire de Choeurs de fondeurs : l'absence de reconnaissance de Metaleurop comme entreprise ouvrant droit à la préretraite amiante. Outre l'amiante, le personnel a été exposé au plomb et au cadmium, également cancérogènes, ce qui a justifié un suivi post-professionnel.

Préjudice financier et sanitaire

Et c'est au titre du préjudice moral et financier, mais aussi sanitaire que chaque ex-salarié réclame 30 000 euros à Metaleurop SA. Cette dernière, en conciliation aux prud'hommes de Lens, n'a chichement proposé qu'un mois de salaire. Amers, les licenciés se mobilisent avant les jugements sur le fond. Et pour « poser des questions » aux candidats à la présidentielle.

Les «patrons voyous» ne sont toujours pas condamnés

Au lendemain de l'abandon du site de Metaleurop Nord, le président Jacques Chirac avait fustigé les «patrons voyous» et le gouvernement avait promis des poursuites. En effet, en abandonnant sa filiale, Metaleurop SA échappait à ses responsabilités sociales et environnementales.

Dès 2003, le ministère de l'Environnement et l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) avaient réclamé une expertise pour connaître une éventuelle gestion de fait par Metaleurop SA, ce qui aurait pu leur permettre de se faire rembourser la remise en état du site. Mais ils ont été déboutés.

De leur côté, les liquidateurs de Metaleurop Nord ont vainement tenté d'étendre la procédure à Metaleurop SA pour « confusion des patrimoines ». Ils l'ont, depuis, assigné en « comblement de passif » et lui réclament 50 millions d'euros comme « dirigeant de fait ». Délibéré attendu ce 27 février.

Auteur

  • M. R.