L'heure est au désengagement de l'Etat au profit du privé. Le service public coûte cher et, à une époque où la dette publique est particulièrement lourde, il semble sensé de penser à faire des économies sur le budget de fonctionnement de l'Etat. Mais, à force de privatisations, de délégations de services, de réductions d'effectifs..., le sens du service public s'est perdu et la cohésion sociale bat de l'aile.

Cette frénésie de privatisations se fonde sur le postulat que la gestion privée est plus efficace et se traduit par des avantages pour le citoyen-consommateur. Ce postulat n'est vrai qu'à court terme. Certes, les cessions de biens représentent un avantage quand il s'agit de boucler le budget, et le privé, par définition, cherche à optimiser le rapport coût/profit. Mais, à long terme, la logique du profit risque de se révéler particulièrement onéreuse. Quel sens cela a-t-il de transformer, par exemple, l'aide sociale, le logement social... en marchés comme les autres, soumis à la loi du profit, quand les citoyens n'ont jamais eu autant besoin du social et du collectif du fait de la montée du chômage et de la précarité ? Sans compter que la tyrannie du quantitatif, qui veut qu'on ne serve les citoyens qu'en raison de la rentabilité de leur pratique, met à mal les principes de proximité, d'égalité d'accès aux services publics qui fondent notre république.

A regarder l'allure à laquelle se multiplient les fermetures de lignes de chemin de fer, de bureaux de poste, de services «non rentables», il faut bien reconnaître avec l'humoriste que, si nous sommes tous égaux au pays de Voltaire, certains le sont largement plus que d'autres !

Dominique Decèze est journaliste, spécialiste des relations sociales et de la santé au travail.