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Enquête

La loi motive les entreprises

Enquête | publié le : 13.02.2007 | Laurent Gérard

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La loi motive les entreprises

Crédit photo Laurent Gérard

Les sanctions renforcées de la nouvelle loi sur l'emploi des personnes handicapées poussent les entreprises à réaliser des actions en faveur de cette population. Mais c'est l'accompagnement et l'aide aux entreprises sur ce dossier qui feront vraiment tomber les dernières barrières.

48heures. Il reste 48 heures aux établissements de plus de 20 salariés pour envoyer leur «déclaration annuelle obligatoire d'emploi des travailleurs handicapés, des mutilés de guerre et assimilés» à leur Direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP). Passé le 15 février 2007, ce sera trop tard, et un contrôle de la DDTEFP est possible.

Ces établissements doivent compter au moins 6 % de personnes handicapées dans leurs effectifs. Si ce n'est pas le cas, ils doivent verser une contribution spécifique à l'Agefiph (Association de gestion des fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées). Cette contribution est aujourd'hui, selon la taille de l'entreprise, de 400 à 600 fois le Smic horaire par personne handicapée manquante. En 2010, les entreprises qui n'auront réalisé aucune action en faveur de l'emploi de personnes handicapées verront leur contribution Agefiph passer à 1 500 fois le Smic horaire !

Changement d'attitude

Ces sanctions renforcées proviennent de la loi du 11 février 2005 et des 80 décrets qui ont suivi. Depuis le 1er janvier 2006, cette loi est juridiquement complète et pleinement applicable. Et la date du 15 février 2007 est la première échéance qui permettra de vérifier son application et son influence. De l'influence de la loi, justement, Claudie Buisson, directrice de l'Agefiph, témoigne. Selon elle, l'attitude des entreprises a commencé à se modifier dès les débats parlementaires sur la loi. A l'époque, davantage de sociétés se sont adressées à l'Agefiph pour avoir des informations, exprimant au passage beaucoup d'inquiétudes sur le renforcement des contributions-sanctions. « Dès ce moment, le nombre de contacts directs provenant d'entreprises a été multiplié par 2 ou 3 », se souvient-elle. Depuis le vote de la loi, les demandes d'information ont «explosé».

Sursaut des entreprises

L'Agefiph pointe deux autres indices forts, témoignant du sursaut des entreprises. Suite à un mailing envoyé lors de leur campagne d'information auprès des 45 000 entreprises versant une contribution Agefiph (sur 120 000 établissements de plus de 20 salariés théoriquement assujettis à la loi), le taux de retour a atteint 8 %, bien au-dessus de la moyenne habituellement constatée de celui des autres mailings, tournant autour de 3 %. Suite à cette campagne, les demandes d'information et les renvois de coupon-réponse pour un rendez-vous ont, eux aussi, explosé.

Autre indice du changement d'attitude : depuis trois ans, la collecte de la contribution Agefiph a baissé de 10 %, le nombre de recrutements de personnes handicapées a augmenté, et le nombre d'entreprises en situation de pur reversement (c'est-à-dire ne faisant aucune intégration de personnes handicapées) a diminué. Claudie Buisson en est donc certaine : « Le choix délibéré, idéologique, de ne pas embaucher de personnes handicapées devient extrêmement minoritaire. Et le nombre d'entreprises n'ayant pas du tout de personnel handicapé devrait baisser dans les deux ans à venir. »

Au-delà de la sanction

Mais, attention, poursuit-elle, « la sanction ne suffit pas, il faut aider ». Aider, par exemple, les entreprises très high-tech qui trouvent peu de personnes handicapées de niveau bac + 2 ou 3 sur le marché ; soutenir les patrons de PME, hommes-orchestres, à assumer les nouvelles obligations sans couler leur entreprise... Pour elles, et pour eux, l'Agefiph finance de la formation professionnelle et fait la promotion de l'alternance. Aider et démontrer que ce n'est pas insurmontable est le credo de l'Agefiph, qui met en avant de nouvelles campagnes d'information et des approches plus fines. Mi-2007, l'association produira une base de données sur les bonnes pratiques, segmentées par thématiques, secteurs et tailles d'entreprises.

Quel contrôle ?

Reste une question : quel sera le contrôle de cette loi par les DDTEFP ? Certaines entreprises comptabilisent des salariés handicapés intégrés depuis moins de six mois, estimant qu'embauche vaut bonne volonté et que celle-ci doit être valorisée. Et les 10 % déductibles de l'obligation Agefiph, pour cause de financement d'actions internes aux entreprises, ne sont pas clairement définis par l'Administration. Des contentieux juridiques à venir ?

L'essentiel

1 Février 2007 est la première échéance pour vérifier les effets de la loi de 2005 sur l'insertion des personnes handicapées. 2010 sera un véritable couperet. Les entreprises qui, d'ici là, n'auront rien fait en la matière seront sévèrement taxées.

2 Les entreprises ont tout intérêt à se rapprocher de l'Agefiph (Association de gestion des fonds pour l'insertion des personnes handicapées) pour signer des conventions.

3 A l'avenir, la question ne peut que se durcir, car, selon une étude Agefiph, un actif sur deux sera touché par un handicap au cours de sa vie active, dont 60 % suite à des maladies invalidantes : cancer, maladies cardio-vasculaires, maladies endocrines...

Auteur

  • Laurent Gérard