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Les Pratiques

Les ouvrières passent du grille-pain à la construction

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 06.02.2007 | Olivier Berthelin

Un an après l'annonce de la fermeture, fin 2007, des usines de Vecoux et du Syndicat, le géant électroménager Seb pourrait bien éviter les licenciements parmi les 440 salariés ; 200 d'entre eux sont repris par le canadien Modulex, fabricant de maisons en bois. Seb collabore à la formation-reconversion et prend en charge les salaires jusqu'à fin 2008.

En janvier 2006, le groupe Seb annonçait la fermeture, fin 2007, de ses usines de Vecoux et du Syndicat, dans les Vosges, employant 440 salariés. A l'approche de l'échéance, différentes mesures sociales devraient éviter les licenciements secs (lire encadré ci-dessous). La singularité du bilan tient à la reconversion externe. Elle se concentrera vers un seul employeur : le canadien Modulex réembauche 200 personnes dans son unité de construction de maisons en bois qu'il démarre en septembre prochain dans les locaux de Vecoux et du Syndicat.

Reconversion vers un seul employeur

Cette PME, qui compte actuellement 125 salariés à Québec, envisage avec optimisme la reconversion rapide des ouvrières vosgiennes, qui fabriquaient jusqu'alors des grille-pain. « Les salariées ont une solide expérience de la production. Elles ne devraient pas avoir trop de difficultés à s'adapter à nos procédés de fabrication très automatisés », explique Nicolas Auger, vice-président de Modulex.

Une adaptation qui reste à prouver

S'il réussit, ce changement massif et apparemment radical deviendrait exemplaire. « Depuis les débuts de la crise du textile, nous avons vu passer de nombreux projets de reconversion des salariés sur d'autres métiers. Ils n'ont abouti qu'à des échecs. Sur le papier, c'est bien, mais il ne faut pas oublier que les effectifs de Seb comptent 70 % de femmes à la moyenne d'âge de 47 ans. Pourront-elles s'adapter à des tâches si éloignées de leur savoir-faire de petites mains de l'électroménager ? », remarque Denis Schnabel, secrétaire de l'union départementale CGT des Vosges. Cette interrogation est partagée par le patronat local : « Nous avons déjà essayé de recruter des femmes venant d'autres industries, sans succès, car le travail du bois nécessite des compétences très particulières », remarque Pascal Cuny, dirigeant des chalets éponymes. « Les Canadiens travaillent depuis longtemps avec de la main-d'oeuvre féminine. Leur démarche industrielle n'a rien à voir avec la tradition artisanale de la filière bois vosgienne, elle correspond aux méthodes de management auxquelles sont habitués nos salariés », rétorque Patrick Mazard, DRH de l'usine Seb. Son service travaille activement avec le repreneur à un programme de formation taillé sur mesure de quatre mois.

10 millions d'euros mobilisés

Cette opération s'inscrit dans le cadre des accords passés, l'an dernier, par Seb avec l'Etat et les collectivités territoriales. Mobilisant 10 millions d'euros, ils prévoient que l'industriel assure les salaires, quoi qu'il arrive, jusqu'en 2008.

Le service des ressources humaines du site a mis en place sa propre cellule de reconversion, avec un dispositif de reconnaissance des acquis. En outre, il vient de créer une plate-forme de travail avec les services sociaux et de santé pour résoudre les cas particuliers jusqu'à présent sans solutions, qui sont évalués à une trentaine de personnes par le CE. Et quand le conseil général des Vosges a mis en relation les dirigeants de Modulex avec le géant de l'électroménager, en mai 2006, celui-ci a poussé l'investisseur potentiel à revoir son projet industriel à la hausse. « Ils voulaient implanter une petite unité de fabrication de charpentes, nous les avons encouragés à y ajouter un site d'assemblage de maisons », rappelle Harry Touré, directeur général adjoint du groupe Seb.

Développement sur le marché européen

Mais les 200 personnes en voie de réembauche par Modulex ne cachent pas leurs interrogations. « Que feront nos nouveaux patrons quand Seb ne sera plus obligé de leur payer nos salaires ? », remarque une opératrice, inquiète face à la campagne de recrutement auprès des centres de formation de la filière bois lancée par la nouvelle entreprise. De son côté, l'investisseur se veut rassurant : « Nous n'avons pas pour vocation de résoudre les problèmes sociaux créés par le départ de Seb, mais nous sommes une entreprise familiale avec une longue tradition de fidélité vis-à-vis de nos collaborateurs », affirme Nicolas Auger. Nourrissant un ambitieux projet de développement sur le marché européen, il escompte créer, au final, plus d'emplois que ceux détruits par la fermeture de Seb.

890 suppressions d'emploi en France

La disparition des usines Seb de Vecoux et du Syndicat (Vosges) s'inscrit dans le plan de restructuration annoncé début 2006 par le groupe et qui porte sur 890 suppressions d'emploi en France. Elles employaient 440 salariés à la fabrication de grille-pain.

Outre les 200 personnes qui seront reprises par Modulex, 40 se voient proposer des mesures de mobilité à l'intérieur du groupe, 80 développent un projet personnel et 120 partent en préretraite.

Troisième site fermé, l'usine Tefal de Dampierre (Jura), qui employait 180 salariés, a trouvé une solution de reprise partielle par le franc-comtois PSP (Poivrières et salières Peugeot).

Auteur

  • Olivier Berthelin