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Un salarié protégé peut-il en cacher un autre ?

Demain | Chronique | publié le : 30.01.2007 | d'avosial, le syndicat des avocats d'entreprise en droit social

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Un salarié protégé peut-il en cacher un autre ?

Crédit photo d'avosial, le syndicat des avocats d'entreprise en droit social

Les salariés que l'on dit protégés bénéficient de règles particulières visant à s'assurer qu'ils ne font l'objet d'aucune discrimination, non seulement en cas de rupture du contrat de travail, mais également au cours de son exécution.

Les salariés nommés ou élus à des fonctions au titre desquelles ils représentent ou assistent les salariés sont protégés contre :

- la modification non seulement de leur contrat de travail mais également de leurs conditions de travail, toute modification unilatérale étant interdite ;

- le licenciement et toute rupture du contrat de travail, même d'un commun accord, la rupture ne pouvant intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail après, le cas échéant, consultation du comité d'entreprise ;

- le transfert de leur contrat de travail par application de l'article L.122-12 du Code du travail, celui-ci devant être autorisé par l'inspecteur du travail, en cas de transfert partiel d'entreprise ou d'établissement.

La protection vise à s'assurer que le salarié n'est pas victime de discrimination du fait de son mandat.

En cas de non-respect de la procédure requise, la mesure prise à l'encontre du salarié protégé est nulle. Les parties sont donc replacées dans la position où elles se trouvaient avant l'annulation de la mesure. S'agissant d'un licenciement, l'employeur risque d'être condamné à verser au salarié une indemnité égale à la rémunération courant depuis le licenciement.

Or, certains salariés peuvent bénéficier de la protection sans que l'employeur le sache.

Il connaît nécessairement ceux qui sont protégés dans le cadre de l'entreprise : les délégués du personnel et les membres du comité d'entreprise, les membres du CHSCT, les délégués syndicaux et/ou représentants syndicaux au CE, les membres du comité d'entreprise européen, les candidats malheureux aux élections, les demandeurs d'élections.

Pour d'autres, cependant, le mandat étant sans lien avec l'entreprise, l'employeur ne sait pas toujours qu'ils sont protégés. Il s'agit :

- des administrateurs d'un organisme de sécurité sociale ;

- des conseillers et anciens conseillers prud'homaux ainsi que des candidats aux élections prud'homales ;

- des conseillers des salariés, c'est-à-dire ceux qui sont nommés dans chaque département pour assister les salariés dans les procédures de licenciement, dans les entreprises sans représentants du personnel ;

- des salariés mandatés pour négocier un accord de réduction du temps de travail (lois Aubry) ;

- des salariés mandatés pour négocier un accord collectif ;

- des membres du groupe spécial de négociation pour la mise en place du comité d'entreprise européen ;

- de ceux qui représentent les salariés lors d'un redressement judiciaire.

Le salarié attend parfois d'avoir été licencié pour annoncer sa protection et ainsi négocier une transaction ou en augmenter le montant. Or, la Cour de cassation considère que, sauf fraude caractérisée, le salarié n'a pas à informer son employeur de sa nomination et que c'est à l'employeur de se renseigner, l'annonce des mandats étant publique. Elle estime, en outre, que la protection demeure même si le salarié n'a pas eu à accomplir son mandat : il se peut donc que l'employeur ne se soit pas aperçu de l'existence de la protection si le salarié ne s'est pas absenté.

On peut se poser la question de la légitimité de cette position ; le législateur ne devrait-il pas intervenir pour que la protection ne prenne effet qu'à partir du moment où l'employeur en a été informé, comme c'est le cas pour les mandats dans l'entreprise ?

Entretemps, on ne peut qu'inciter les employeurs à la plus grande prudence plutôt que de risquer une nullité du licenciement ou du transfert du salarié protégé.

> Viviane Stulz

avocate, cabinet Clifford Chance

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  • d'avosial, le syndicat des avocats d'entreprise en droit social