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Les Pratiques

Un outil de pilotage à manier avec précaution

Les Pratiques | Point fort | publié le : 16.01.2007 | Rodolphe Helderlé

Le sondage interne pour mesurer le degré d'adhésion des salariés à la politique sociale et à la stratégie de l'entreprise est devenu un outil de pilotage quasiment incontournable pour les grandes entreprises. Il permet de diagnostiquer des faiblesses et de lancer des actions correctives, mais la restitution des résultats aux salariés reste délicate.

Les politiques ne sont pas les seuls à accorder une grande importance aux sondages d'opinion. Les directions d'entreprise sont tout autant friandes des enquêtes internes pour s'assurer de la cohérence de leurs actions RH ou de leurs projets de réorganisation. Le taux de participation des salariés constitue le premier indicateur de leur adhésion. Surtout lorsque ce sont tous les salariés qui sont invités à répondre, sur papier, par téléphone et, de plus en plus, par Internet.

Chez Renault, on se félicite des 87 % de taux de réponses à la première enquête d'opinion mondiale, organisée du 11 au 22 septembre 2006, qui visait 126 500 salariés dans 24 pays. Le management avait été, au préalable, sensibilisé sur son indispensable rôle de relais pour convaincre les collaborateurs de participer à cette enquête baptisée «Engagement» ; 84 questions étaient proposées pour mesurer le niveau d'engagement des salariés et l'efficacité managériale, dans la perspective du «Contrat 2009», annoncé par Carlos Ghosn en février 2006, qui vise à faire de Renault le constructeur européen le plus rentable. Un taux de participation en forme de revers pour la CGT, qui avait appelé au boycott au motif que l'enquête « vise à s'assurer que les salariés sont réellement orientés vers l'atteinte inconditionnelle des objectifs fixés et à montrer aux gros actionnaires qu'ils seront gagnants chez Renault, à court terme, plus qu'ailleurs ». « Répondre à l'enquête, c'est donner des indications précises à la direction pour renforcer les pressions », ajoute le syndicat.

Les résultats sont contrastés. Cette enquête révèle un fort niveau d'engagement des salariés, mais la capacité à faire circuler l'information entre les différentes branches (transversalité), la satisfaction au travail et les modalités d'évaluation de la performance ne sont, en revanche, pas jugées satisfaisantes. L'enquête de septembre confirmant les résultats d'un sondage pilote réalisé en mai 2006, la direction se trouve ainsi confortée dans sa décision de revoir le mode d'évaluation. Désormais, l'entretien annuel distinguera l'atteinte des objectifs et la façon de les atteindre. « Il s'agit, d'un côté, d'évaluer la performance, tandis que, de l'autre, on cherche à mesurer le potentiel d'évolution », confirme Michel de Virville, le DRH groupe de Renault.

Sondage mondial chez Total

Chez Total, le dernier sondage mondial de 2005 a révélé que, globalement, 40 % des répondants estimaient que le groupe n'en faisait pas assez en matière de féminisation et d'internationalisation des recrutements. Mais les salariés français en poste au siège ont jugé, quant à eux, que le groupe en faisait déjà suffisamment sur ce terrain. « Cela confirme bien les craintes d'une certaine catégorie de personnel », explique Catherine Ferrant, directrice de l'innovation sociale et de la diversité de Total. Ce sondage s'est révélé, en outre, assez tranchant à l'égard des gestionnaires de carrière. Les salariés préfèrent s'adresser à leur supérieur hiérarchique ou à des contacts informels pour être conseillés sur leur évolution. Les gestionnaires de carrière n'arrivent qu'en 3e position. Un constat qui a généré une réflexion de fond sur leur rôle, et le lancement d'une enquête qualitative complémentaire.

C'est après la fusion avec Elf, en,1999, que Total a commencé à réaliser un sondage tous les ans. Le taux de participation est passé de 42 % en novembre 2003, à 51 % en 2004, pour finalement stagner. La direction a décidé que le baromètre se déroulerait désormais tous les deux ans. Le prochain aura lieu cette année. « Il faut se laisser le temps de mettre en oeuvre les actions correctives », estime Catherine Ferrant. A l'inverse, Renault compte bien donner un rythme annuel à son enquête. Pour Michel de Virville, « notre vitesse de transformation est très rapide. Cela permet de vérifier que l'on est sur la bonne voie ».

La crainte du benchmark interne

Alors que l'enquête de septembre 2006 a pointé le manque de transversalité chez Renault, paradoxalement, la direction s'est bornée à une restitution des résultats branche par branche. Les salariés n'ont pas pu les comparer par directions, établissements et filiales. « Nous valorisons les meilleures pratiques sans pour autant encourager un benchmark interne systématique. Les situations ne sont pas comparables », indique Michel de Virville.

Chez Total aussi, on se montre assez prudent dès lors qu'il s'agit d'informer les salariés sur les résultats. Pour Catherine Ferrant, « la transparence ne consiste pas à dire tout à tout le monde et au même moment. Nous ne tenons pas, par exemple, à stigmatiser une population ». Chez PSA, les syndicats pointent du doigt un manque de transparence : « La restitution du sondage téléphonique annuel que mène la DRH sur un échantillon représentatif se borne à quelques lignes adressées par courriel », rapporte Bruno Bodin-Hullin, délégué CFE-CGC du site PSA de Vélizy (78).

Comparaisons entre sociétés

Les directions se montrent, en revanche, plus enclines à se comparer avec d'autres entreprises. Le baromètre annuel mondial de Schneider, baptisé «People Scop», est en partie administré par ISR (International Survey Research), un institut de sondage américain qui propose une grille de questions standards permettant aux directions de comparer leurs résultats ; 39 des 59 questions du «People Scop» viennent ainsi d'ISR.

Renault a également choisi ISR comme prestataire de son enquête (52 des 84 questions proposées par l'institut) afin de s'étalonner par rapport aux 33 entreprises, dont Toyota, qui composent le panel «haute performance» d'ISR. La question est posée chez Total de comparer ses résultats avec un panel d'autres entreprises. La formule, jusqu'à maintenant gérée par Ipsos, ne le permet pas. Mais les questions standards n'ont aucun intérêt lorsque le sondage interne se trouve directement lié à la stratégie de l'entreprise.

Plan stratégique chez Météo France

La direction de Météo France vient de sonder ses cadres sur le nouveau plan stratégique. Le questionnaire anonyme demande, par exemple, de classer par ordre d'importance les missions de ce service public ou encore de se prononcer sur les moyens accordés à la gestion des ressources humaines.

Auteur

  • Rodolphe Helderlé