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Le débat sur l'ouverture des commerces le dimanche est relancé

Demain | Chronique juridique | publié le : 19.12.2006 | d'avosial, le syndicat des avocats d'entreprise en droit social

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Le débat sur l'ouverture des commerces le dimanche est relancé

Crédit photo d'avosial, le syndicat des avocats d'entreprise en droit social

Les dossiers Vuitton, Usines Center, et les particularités du calendrier 2006 relancent le débat de l'ouverture des commerces et du travail des salariés le dimanche. Il convient de bien distinguer la question de l'ouverture dominicale, d'une part, de la possibilité de faire travailler les salariés le dimanche, d'autre part.

Sur la question de l'ouverture, le principe repose sur la liberté totale de chaque commerce, sauf arrêté préfectoral ordonnant la fermeture au public des commerces relevant d'une profession spécifique (L 221-17 du Code du travail). Dès lors qu'un tel acte administratif existe et sous réserve de sa légalité (notion de profession, accord de la majorité des membres de la profession intéressée, désuétude de certains arrêtés d'après-guerre...), la question du travail des salariés le dimanche ne se pose plus, les magasins ne pouvant ouvrir.

En l'absence d'arrêté préfectoral, on doit alors s'interroger sur la possibilité de faire travailler les salariés le dimanche (question qui est sans objet pour les commerces fonctionnant sans salarié). La réponse de principe est négative, la loi rappelant que le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche (L 221-5 du Code du travail), sauf dérogation de plein droit ou sur autorisation.

Indépendamment des hôtels, cafés, restaurants, débits de tabac, magasins de fleurs naturelles (L 221-9 du Code du travail), la dérogation de plein droit à la règle du repos dominical vise les commerces de vente de denrées alimentaires au détail (incluant les supermarchés, mais pas les hypermarchés), et ce, exclusivement pour le dimanche matin (L 221-16 du Code du travail).

Les autres commerces doivent, pour faire travailler les salariés le dimanche, justifier d'une autorisation accordée par arrêté préfectoral.

Cette dérogation vise les commerces fournissant des biens et des services destinés à faciliter l'accueil ou les activités de détente et de loisirs d'ordre sportif, récréatif ou culturel, dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques à forte affluence. C'est, par exemple, à ce titre que le magasin Virgin Megastores des Champs-Elysées fonctionne le dimanche (sur la base exclusivement du volontariat), alors que celui de Barbès ou celui de Lyon ne le peuvent pas.

Enfin, les commerces de détail habituellement fermés le dimanche peuvent déroger à la règle du repos dominical des salariés, dans la limite de cinq dimanches par an désignés par arrêté municipal.

Dans le cadre du débat global politique, syndical, voire religieux (débat et enjeu de société) afférent au travail du dimanche, deux observations doivent être prises en considération :

la négociation collective de branche ou d'entreprise doit être privilégiée, quant aux conditions, modalités et compensations (financière et/ou en termes d'emplois) du travail du dimanche. Ainsi, par exemple, plusieurs entreprises, sur la base d'accords collectifs, ont instauré le recours exclusif au volontariat pour le travail du dimanche ;

l'intervention essentielle des maires et des préfets en la matière ne repose pas seulement sur l'intérêt des salariés, mais fréquemment sur des considérations de concurrence entre les commerçants.

Ainsi, comment justifier un arrêté de fermeture visant exclusivement les commerces alimentaires de plus de 300 m2 ?

Les contentieux sur cette problématique sont, aujourd'hui, plus fréquents entre commerçants qu'entre salariés et employeurs. Ces compétences locales génèrent par nature des situations incohérentes pour les salariés, les consommateurs et les entreprises. Ainsi, le 24 décembre 2006, les magasins seront fermés à Nantes, mais ouverts dans les communes limitrophes. Toutefois, tous les commerces nantais fonctionnant sans salarié pourront accueillir la clientèle... dont celle habituelle de la grande distribution !

Pour son centième anniversaire (loi du 13 juillet 1906), le principe du repos dominical est toujours aussi complexe ; aujourd'hui, ce n'est plus seulement l'intérêt des salariés qui est visé, mais également la prise en considération des attentes et des besoins du consommateur (également salarié) et les positionnements concurrentiels entre les différents types de commerces, sachant qu'a priori, les commerces en ligne demeurent «ouverts» le dimanche.

> Philippe Clément

Avocat associé, cabinet Fromont Briens

Auteur

  • d'avosial, le syndicat des avocats d'entreprise en droit social