Dans la course à la flexibilité et à la précarisation, la France apparaît fréquemment comme le mauvais élève de l'économie libérale. Là où les Etats-Unis et l'Angleterre auraient réussi, par une politique d'emploi réaliste, à enrayer le chômage, la France resterait prisonnière d'une logique de protection sociale rétrograde.

La défense des contrats à durée indéterminée, notamment, et des minima sociaux, par les raideurs qu'elle occasionne, paralyserait la dynamique sociale, l'important n'étant apparemment pas tant l'emploi que l'employabilité. Mais l'important pour qui ?

S'il est incontestable que l'entreprise a tout à gagner à fluidifier l'emploi pour s'adapter et répondre à l'extrême volatilité des marchés, l'intérêt des salariés à aller dans le même sens reste à prouver.

Michel Husson, économiste, chercheur à l'Institut de recherches économiques et sociales, tente de revenir sur une évidence trompeuse. Pour lui, la flexibilité en France est déjà un fait acquis et le débat sur la nécessité de déréglementer davantage le travail masque des questions autrement plus importantes, comme le déclin de la part salariale dans la production de richesse et l'augmentation des profits financiers. La globalisation n'implique d'ailleurs pas nécessairement de flexibiliser davantage l'emploi.

Il existe d'autres stratégies comme, par exemple, la réorientation de l'économie nationale vers des secteurs à haute technologie ou le recentrage sur le marché intérieur et la satisfaction des besoins sociaux. Encore faudrait-il se poser la question et, pour cela, commencer par poser réellement, honnêtement, les problèmes, plutôt que de s'aligner passivement sur les discours alarmistes - et intéressés - des chefs d'entreprise.

- Michel Husson est économiste, administrateur de l'Insee et chercheur à l'Ires (Institut de recherches économiques et sociales). De nombreux auteurs ont participé à l'ouvrage : O. Chagny, P. Concialdi, T. Coutrot, C. Dejours, G. Filoche, F. Lefresne, D. Plihon, E. Renault, F. Vergara.