logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Les Pratiques

La loi sur l'égalité affole les sociétés allemandes

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 28.11.2006 | Marion Leo, à Berlin

La loi contre les discriminations, appliquée depuis la fin août en Allemagne, contraint les entreprises à prendre des mesures rapides. Déjà, des dizaines de plaintes s'accumulent dans les cabinets d'avocats.

Le 6 novembre dernier, un procès pilote a débuté outre-Rhin. Pour la première fois, la nouvelle loi sur «l'égalité de traitement» (AGG), entrée en vigueur le 18 août, est invoquée dans un procès. Trois pilotes de Lufthansa ont saisi le tribunal du travail de Francfort pour exiger le droit de pouvoir travailler jusqu'à 65 ans alors que la convention collective conclue entre Lufthansa et Cockpit, le syndicat des pilotes, prévoit un départ à la retraite à 60 ans, notamment pour des raisons de sécurité.

Les pilotes, qui s'estiment en excellente santé, rappellent que la nouvelle loi ne permet « une discrimination à cause de l'âge que dans des cas très limités et seulement quand c'est inévitable ». Ils s'appuient également sur la loi et les règlements des autorités internationales de surveillance autorisant les pilotes à travailler jusqu'à 65 ans.

Climat d'insécurité juridique

Le jugement est attendu pour mars prochain, mais les observateurs partent du principe que l'affaire sera sans doute renvoyée au tribunal fédéral du travail (BAG), voire portée devant la Cour européenne de justice. Car les enjeux sont énormes. Depuis l'entrée en vigueur de la loi, qui prohibe toute discrimination sur le lieu de travail, fondée sur la religion, les convictions, la race, l'appartenance ethnique, le sexe, l'orientation sexuelle, l'âge et le handicap, un climat d'insécurité s'est établi dans les entreprises. Les grands cabinets d'avocats reçoivent, chaque jour, des dizaines de plaintes. Les organisations patronales exhortent les entreprises membres à étudier de près la nouvelle législation. Car la loi, qui va au-delà des exigences des directives européennes qu'elle transpose, oblige les employeurs non seulement à sanctionner toute discrimination, mais aussi à prendre des mesures préventives.

Offres d'emploi «minées»

Dans une brochure de 120 pages, la fédération allemande des CCI (DIHK) explique ainsi à ses membres les mesures à prendre : envoyer les cadres suivre des formations spéciales, désigner un «délégué aux discriminations», vérifier que toutes les tâches accomplies par les DRH (offre d'emploi, licenciement, salaire, contrat de travail, convention collective...) soient bien conformes à la nouvelle loi. Les offres d'emploi peuvent se révéler dangereuses et doivent éviter toute formulation illicite, telle que «jeune équipe» (discrimination par l'âge) ou «candidatures avec photo» (discrimination ethnique). Et le DIHK de conclure qu'en cas de procès, la preuve de la charge incombe à l'accusé. Lufthansa a déjà pris les devants en modifiant ses offres d'emploi : désormais, la compagnie aérienne ne recherche plus des salariés «de 18 ans à 40 ans», mais «à partir de 18 ans».

Auteur

  • Marion Leo, à Berlin